À Yor et à cris
« Là, je suis bien / Je pense à rien / Je me concentre sur l’instant / Que je tiens fort dans ma main / Dans ma main, maintenant ».
Certes l’histoire est inscrite au fronton de son site, mais cette re-naissance, cette résurrection, vaut le coup d’être relatée, surtout pour qui découvre Yor par ce présent article : « Cet album marque une sacrée étape dans l’aventure commencée il y a quelques années dans un hôpital où un médecin m’annonçait que j’allais mourir. Je m’étais alors demandé ce que j’avais vraiment envie de faire avant de « partir ». La musique fût pour moi une évidence. L’évidence du chemin que je devais prendre pour retrouver mon énergie vitale (…) Le médecin s’était trompé. J’étais condamné… à vivre. J’ai repris la route et j’y ai croisé de belles âmes qui ont tiré des notes de ma guitare, mais aussi des mots de ma plume. Cela a fait exister, comme par magie, toutes mes chansons, dont celles présentes ici… « Là, je suis bien ». Ce sont les premiers mots de Maintenant. »
C’est une chanson d’après, un après où tout re-commence, avec distance, avec on imagine plus encore de sagesse, conséquence de cette épreuve. C’est de la chanson, paroles et musiques, mais ça aurait pu être toute autre forme d’expression : c’est se jeter dans la création, avoir envie de dire, de témoigner. Se réapproprier le sens de la vie, ses émotions. Par la musique, pour lui une évidence…
C’est une chanson touchante, impliquée, qui se pare volontiers des épices et parfums des musiques du monde pour parler de lui, d’elles, des autres. De sa maman défunte, des femmes…. Une chanson qui regarde et tente de traduire ces regards attendris, amusés, tristes parfois, par des mots. « C’est mon cœur qui brille / Mon cœur, mon cœur d’enfant ». Des mots qui s’étonnent, détonnent, questionnent, puis cessent de questionner : « Et alors, à quoi bon ? / Bel effort, je regrette dans ma tête ces questions / Pour un temps, car le vent / Emporte presque toutes les fois / La torture des questions / Que c’est dur, on avance / A qui bon ? »
Une chanson qui tente de mettre les choses à leur juste place, qui secrète une belle philosophie, qui respire la vie. Où rien n’est futile. Les mots y coulent de source, ne négocient pas, ne calculent rien, sentent le vrai. « Que faire face à un con / Qui te donne des leçon / Rien de rien y a rien à faire / A part sourire et de taire / Si ya p’être une chose mon frère / C’est d’lui siffler cette chanson ».
Quelques incursions dans le monde, notre société, où pouvoir et médias crétinisent à tours de bras, interdisent tout : « Légalisons l’intelligence / Ils ont dépénalisé la connerie / Allons, pressons, il y a urgence / On commence déjà à être envahis… » Et cette autre où les couplets chaque fois enfoncent le clou : « Comment pourrais-je manger / Si mes frères sont affamés ? (…) Comment pourrais-je chanter / Si mes sœurs sont bâillonnées ? Comment pourrais-je exister / Si les liens sont disloqués ? Comment être humain en somme ? Je suis parce que nous sommes... »
Émouvante, l’évocation de sa maman qui tombe, craque, met genou à terre, vit l’enfer : « Je sais que je n’ai pu guère / Te protéger, ma mère / Du tourment, de la misère / Maintenant / Djo quido djo guetedo… »
Introspection faite chanson, Yor pose sur chaque chose un regard presque distant, en fait juste le recul nécessaire pour comprendre, expliquer. Sur l’amour physique, sur les liens qui nous relient aux autres. La voix est belle, grave et douce à la fois ; on dirait un folk-singer américain et c’est peu dire. Il y a fusion entre ce qu’il chante et comment il le chante : comme on raconte, comme on transmet, sans en faire des tonnes. Cette voix fait autorité comme elle fait amitié. Étonnant et passionnant chanteur que celui-ci : il vous faut le découvrir.
Yor, Maintenant, autoproduit 2020. Le site de Yor, c’est ici.
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