Festival chansons sous les étoiles, Joce, la princesse (en attendant les croque-notes)
17 juillet 2020, Bouc-Bel-Air, esplanade du château.
Premier concert et premier (seul?) Festival de l’été depuis quatre mois, le retour au spectacle vivant après ce long sommeil de la musique.
Combien de fois les organisateurs, Josette et Henri Bonifay, ont-ils observé les étoiles, regardé voler les oiseaux, consulté les augures municipaux, dans l’angoisse d’une annulation définitive de cette belle rencontre, à peine née et déjà menacée. L’an dernier nous inaugurions ce premier festival placé sous le signe de la poésie, de la chanson et du jazz dans ces lieux magiques que sont l’esplanade du château haut-médiéval du village, et des jardins d’Albertas (XVIIIeme siècle) en ce qui concerne le jazz.
Et puis début juillet la nouvelle tant attendue est arrivée, au lieu du 3 et 4 juillet, le festival aurait bien lieu, les 17 et 18 juillet, puis le 24 pour le jazz, grâce aux efforts conjoints de l’association JH Font-Saulière.
Comme l’an dernier, c’est le comédien poète Christian Duneau qui assure la présentation du spectacle, avec son élégance et son humour habituel.
Une centaine de personnes, distanciation oblige, pour cette soirée toujours placée sous le parrainage de Louis Chedid, qui passait à Bouc Bel Air ses vacances d’enfant, avec la poésie de sa mère Andrée Chedid : « Enlacé d’ombres vertes / Et de fêtes / Le plaisir / Ruisselle / Sur les épaules de l’été. » On dirait bien qu’elle a écrit ce poème ici, sous le grand pin, devant le cyprés dont les branches dessinent des chemins de lumière, sur cette esplanade dominant le village, le bois-Bel-Air, La Sainte-Victoire et le massif de l’Etoile.
C’est Joce Ballerat qui a repris à l’impromptu le flambeau d’Isabelle Fraval, empêchée au dernier moment par un souci auditif, suite à un effet Larsen. Tâche difficile d’autant que c’est pour elle aussi son premier concert depuis le confinement. Inconnue du public, elle a emporté haut-la-main le défi, avec humour, avec tendresse, en faisant le pari de mettre en avant ses propres chansons en intercalant quelques pépites du répertoire français, mais pas de celles que tout le monde connaît déjà par cœur.
Dans le registre de l’émotion, Leprest : Edith (Piaf) qui repose « Entre le mur des Fédérés / Couvert de roses et le carré / Maudit de Modigliani »), ou Jamait : Vierzon, qui est à l’auteur ce que Nantes est à Barbara.
Dans l’humour, elle prouve tous ses talents de comédienne avec la reprise de La cassette vidéo de Linda Lemay, qui se moque gentiment de notre propension, nous la gent féminine, à vouloir nous conformer aux normes de minceur imposées. Même si la ligne de Joce, moulée dans son pantalon de cuir noir, en ferait pâlir de jalousie plus d’une. Si la technologie a changé, le phénomène est bien toujours présent, et on a vu fleurir les cours de gym sur les plateformes pendant le confinement… Joce est autant capable de chanter la gaudriole bien écrite de Bernard Joyet avec la version féminine du gérontophile, que la drôlerie féroce de Juliette, Maudite clochette et Mémère dans les orties, duo acide sur les relations de couple, où son pianiste Benjamin Barria tient le rôle originel de François Morel. Benjamin, qui avait quelques problèmes à se retrouver dans ses « partos », a joué le rôle de souffre-douleur (consentant et non dénué de répartie) pendant le concert.
La seule reprise que la plupart devaient connaître est Je me suis fait tout petit de Brassens, avec l’audace d’être une femme pour chanter cet aveu masculin.
Joce ne se contente pas d’être une magnifique interprète, elle a aussi sous sa plume de jolis talents d’autrice et même de compositrice (quand elle ne fait pas appel aux dons d’Eric Miller) qui ont touché le public. Elle a d’ailleurs commencé son concert avec Qui me cherche me trouve, une profession de foi qui donne une idée de son tempérament. Les chansons les plus personnelles de son récent album ont su trouver des échos dans les souvenirs et les sentiments de chacun, depuis Les vacances dans le Lot (ah les voisins, les cousins, Et puis les cousins des voisins… la maison, le pigeonnier) jusqu’à Ces anciens, ces phrases qui nous font mal : « Il disent : c’est pour mon bien », et qu’ils m’aiment d’amour », en passant par cette belle déclaration, Mon ange, ma vie : « Moi je suppose, qu’il est la cause, de mes balbutiements / Grâce à la rose, qu’il me dépose / Toujours au bon moment ». Les joies et les chagrins d’une vie, et à travers elle son intérêt pour des sujets d’actualité, les migrants des Origines, ou la dérision amère d’En traversant la rue : « Il vit pour la chanson (…) Il n’a qu’à traverser, il finira charcutier »
Il fait encore jour, et les cigales s’efforcent de couvrir la voix claire et bien posée de la chanteuse, lorsqu’elle dédie à Barbara Weldens la si émouvante Si j’étais avant de reprendre Je ne veux pas de ton amour dans une version qui tient la comparaison avec l’originale. Presqu’une heure et demi après le début du concert, la nuit tombe enfin et Joce nous quitte sur ses Fausses idées : Il ne faut pas que tu crois modifier les gens…
La page facebook du Festival sous les Etoiles, c’est ici. Ce que nous en avons déjà dit sur NosEnchanteurs, là.
Le site de Joce, c’est ici. Ce que nous en avons déjà dit sur NosEnchanteurs, là.
Qui cherche me trouve
Mon ange, ma vie (en confinement)
Mise à jour des 02 et 10 novembre 2020 : Extraits du Festival 1, 2 et 3
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