Tom Poisson, bonne pêche !
Il a le sens de la belle formule, des jolis mots, de ce vocabulaire qui sait fixer une pensée furtive, une image, de ces phrases qu’on lui envie. Poisson écrit bien, du lisse sans écailles, d’Ulysse pour sa Pénélope. Tom Poisson parle de la vie, de ce qui la traverse. Les visages, dont il faut se passer, de l’amour, avec ou sans faille : « Mais si le ciel bleu se taille / Qui tiendra le gouvernail ? / Me lâcherais-tu au milieu ? »
C’est un disque, dix titres, empreint de doutes. De présence et d’absence. Et de peur. « Ô ma peur / Tu m’embryonnes / Tu tourbillonnes / Autour de chaque instant / Viens me montrer les dents ». Peur d’un peu tout. « Qui a peur, qui a peur / Qui fait peur, qui fait peur ».
Et de soi. S’il est, en ce nouvel opus, une chanson qui frappe plus particulièrement, c’est bien ce Trois bleus de plus : « J’aurais bien aimer flâner / Sous tes coups de poing, tes coups de pied / J’aurais bien voulu trois bleus de plus / Mais je suis pressée ». Une terrible contribution, écrite et chantée par un homme, aux témoignages de et sur les femmes battues, sur lesquelles en ces temps confinés pleuvent plus encore courroux et coups.
Quand il daigne s’absenter de ces irrésistibles Fouteurs de joie, il recouvre son identité première, celle de Tom Poisson, auteur compositeur et interprète certes par intermittence mais de premier plan. Chacun de ses albums mérite votre discothèque. Il n’est guère possible que vous soyez passé à côté.
Ça fait pile vingt ans que Poisson navigue dans les eaux de la chanson. Au début dans un groupe puis dans des collectifs, dont celui du « Petit monde de Georges Brassens ». Il faut attendre quatre ans pour qu’il sorte en 2004 son premier album solo qui acte le présent et annonce la suite : Tom Poisson fait des chansons. Se passer des visages est son septième. C’est un album admirable, au sens où tout résiste et s’oppose à la critique.
Une voix ferme, qui secrète sa douceur, parfois ses douleurs, épouse la poésie, portée par des rythmes soutenus par guitares, clavier et percussions. Des vers parfois somptueux.
Deux duos, l’un avec Laurence Jaillet qui par ailleurs fait les chœurs en d’autres titres, sur Les fantômes ; l’autre avec Clio sur La chanson, qui clôt l’album : « Mais y en a qu’une seule qui me ramène à toi / Je la chante tout bas / Quand tu n’es pas, quand tu n’es pas là… »
Par gros temps, par temps de confinement, posez ce disque sur la platine. Laissez-vous aller, embarquer par les vers de Poisson. Gobez. Vous serez bien.
Tom Poisson, Se passer des visages, Super-Chahut 2020. Le site de Tom Poisson, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui.
Le nouveau spectacle de Tom Poisson, 2+1 (2 hommes et un micro) avec Paul Roman, devrait être présenté du 1er au 5 juillet 2020 à Venelles (13) dans le cadre de la tournée « hors-les-murs » de la MJC. Sous toute réserve il va de soi.
Trois bleus de plus « dans mon salon »
Off 2018, répétitions
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