Sarah Mikovski, la tendre, la copine
Parait-il qu’on cherche une nouvelle ambassadrice des pôles. En voici une, au sens que son nouvel album s’intitule Pôle Nord et que visiblement elle n’y perd pas le Sud. Sarah Mikovski est, on le sait, une forme de pétillance dans la chanson. Pas particulièrement engagée mais résolument engageante. Enfin, jusqu’à présent. Car chanter Mon mec d’extrême droite, un titre pas bien méchant soit-dit en chantant, lui a valu et lui vaudra encore le vomi, la raclure, les excréments des réseaux sociaux et de tous ceux dont les idées sont aussi courtes que leurs cheveux. Tout y est passé : son blase, sa couleur de peau, sa tignasse. Dédions donc cette chronique à tous ces cons, lepénistes ou non, si courageux qu’ils se parent en général d’un pseudo pour mieux caguer leur haine. Sarah, non : elle signe sous son nom. Un extrait de cette chanson, pour le plaisir : « Il est épouvantable / Avec toutes ses idées / Je le cache sous la table / Quand y’a des invités / Quand il veut m’énerver / Il me parle de Wauquiez / Et quand on fait l’amour / Il cite Éric Zemmour ».
Après trois EP, voici son premier vrai album. Je n’aime pas bien qualifier la chanson de « pop » : j’ai toujours l’impression de l’insulter. Là, c’est quand même le qualificatif qui s’impose, même si on ne saurait résumer ce nouvel opus à ce terme un rien léger et réducteur. D’ailleurs, à certains moments on pourrait aussi qualifier tout ou partie de l’album de slam, de rap. Le tempo souvent lascif, le débit, la texture, les bulles d’air (là, j’imagine), les colorations, l’irrépressible appel à danser, tout y est ou presque.
L’amour y est bien présent. Le sentiment tout autant que l’acte. Faire l’amour recense d’ailleurs pas mal de postures, de possibilités, « avec un cierge ou avec un coussin », même si « tes raisons, elles ne m’importent peu ». Mais c’est surtout les considérations sur l’amour, des enseignements : sur Les gars de mon quartier, sur les mauvais coups, les Cicatrices (en duo avec Karimouche), la pente – même douce – qu’il faut remonter…
Quand bien même Sarah se dit Insensible (« Mais je suis insensible / Et tes caresses ne me font rien du tout »), ses vers avec constance trahissent le contraire. Sarah Mikovski est la copine, parfois l’amante, en tout cas celle qui se veut posée, sereine, celle qui donne la force, l’espoir, celle qui sait consoler, guérir les bobos de l’âme, les bleus de l’existence. De l’écouter, c’en est réjouissant : franchement, on aimerait l’avoir pour amie.
Une seule chanson, ici, en résonance à l’actualité, Désolés : « Et vous les politiques, sortez de la paresse / Et changez de tactique c’est là que le bat blesse / Puisqu’il vous faut vous expliquer toute la morale / Pour gouverner il faut rester irréprochable / Démissionner si son cœur se retrouve meurtri / Se tenir à l’écart de l’or de son ego et ses envies ». Le jour de son procès, ça doit aller droit au cœur de François Fillon.
Le tout fait assez indispensable album, bien réalisé (par l’ancien Fatal Picard Ivan Callot). Qu’il vous faut découvrir.
Sarah Mikovski, Pôle Nord, Label 440/[Pias] 2020. Le site de Sarah Mikovski, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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