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Olivier Savaresse « Terres étrangères »

SAVARESSE Le courage des Innocents mai 2018Une navaja dans la main droite
Un Urubu sur l’épaule gauche
Une provision de sagou dans les cales de l’aviso
Nous appareillions sur une mer
D’un bleu qu’on colore
Nous n’étions que deux à manœuvrer


Olivier Savaresse

Paroles et musique Olivier Savaresse. Extrait de l’album « Le courage des innocents » (2018)

Cinquième album de cet auteur compositeur interprète parisien, qui entretient avec soin son anonymat derrière un avatar naïf un peu inquiétant, personnalisant le héros malheureux de son troisième album, Au milieu de nulle part. Les deux premiers albums étaient avec la voix féminine de Cécile Lucas, et Olivier, guitariste autodidacte, nous dit avoir tourné en concert avec deux groupes jazz-rock ou blues une dizaine d’année avant de se tourner vers l’écriture et la composition.

Les quatorze titres constituent la trame d’un récit, qui commence comme un livre d’aventures, où un explorateur débarque dans une île paradisiaque, et rencontre une femme séduisante avec laquelle il ne peut communiquer que sensuellement.

L’épopée tourne vite à la fable dystopique, où un peuple voisin tente d’imposer sa vision hégémonique du monde au nom d’un dieu qu’il instrumentalise : écouter le titre Cratie où la voix déformée vers le grave, inquiétante, décline les pouvoirs qui oppressent : Théocratie, aristocratie, technocratie, phallocratie…

Formellement, une alternance de récit parlé et de chansons mélodiques. Sur une musique où la guitare électrique mène le jeu (écouter le solo instrumental central de Où aller), se promène, raconte autant que les mots, mâtinée d’électro, d’assemblages de bruits, de bulles, de voix chantées ou extraites de discours ou de débats politiques mêlés agréablement ou de façon plus angoissante. Cette Voix, décryptée inflexiblement d’un point de vue physiologique, mais outil de communication ou de pouvoir aussi. Des plages musicales de rock alternatif cèdent la place à des morceaux presque folks, ou à d’autres d’un pop évocateur et construit, au rythme lancinant, lorsqu’il nous entraîne dans ses songes.

Inquiets comme nous sommes, il ose nous chanter « Un jour prochain, nous serons bien», même si l’on ne peut s’empêcher de penser à cette bonne vieille chanson Tout va très bien, Madame la Marquise , écrite en 1935 dans une semblable période de crise économique, sociale et morale. Les très beaux cuivres du final, avec cet ample mouvement orchestral, ne nous rassurent guère. Même s’il faut avoir foi dans Le courage des innocents.

Le tout fait beaucoup penser aux concepts albums de Gainsbourg, dont Savaresse a un peu la voix grave (avant abus) quoique plus douce, comme Daniel Darc. J’aimerais vous indiquer des lieux où le voir en concert, mais je pense qu’Olivier s’attache en ce moment à la création pure. On peut explorer son site et peut-être le contacter.

 

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