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Ilia, la voix à suivre

Ilia (photo de presse non créditée)

Ilia (photo de presse non créditée)

C’est une douce mélopée qui accueille l’auditeur, qui le prend par la main et l’oreille pour l’emmener au loin. Une sorte d’incantation, à l’instar de celles des sorciers chamans. Un chant venu du fond des temps, rien qu’une voix et des sons. Aucun mot pour perturber l’émotion naissante, aucun instrument encore pour l’accompagner. Après une bonne minute, voici des percussions qui se font entendre, dépouillées et primitives. Enfin déboule le verbe : « Je marcherai longtemps / Face au ciel / Face aux vents / Je laisserai la peur et les tourments / Expirer lentement ». La chanson qui ouvre magistralement ce premier disque s’intitule Road song. La chanson de la route. Comme une promesse d’évasion et de voyage. Le pari sera tenu.

72197425_979588395714177_1493841706322231296_nL‘artiste qui nous offre ce périple enchanteur nous vient de Liège. Pas tout à fait une nouvelle venue, puisqu’elle a déjà pas mal bourlingué sous son nom de Géraldine Cozier, en particulier dans le domaine du jazz. Mais nouveau départ, nouveau projet et nouveau nom, elle se présente à nous désormais sous le nom d’Ilia. Son disque – éponyme, comment pourrait-il en être autrement tant elle s’y est investie ? – allie la saveur et la fraîcheur d’une première fois et l’expérience d’une chanteuse aguerrie. Délicieux cocktail pour un résultat enivrant. C’est qu’elles ne sont pas nombreuses, les chanteuses dotées d’une telle technique vocale. Ilia sait tout faire, tout chanter, la voix principale comme les chœurs qui l’entourent. Les orchestrations se font d’ailleurs volontiers discrètes, laissant la place d’honneur au chant, prenant et surprenant, vrai et varié : malicieux dans Il y a, langoureux dans La charmeuse de tympans, emphatique dans A genoux, tribal dans Sonne l’hallali ou torride et sensuel dans La peau… Au risque que parfois la virtuosité prenne le pas sur l’émotion ?

ILIA, LE CONCERT Liège, Cité-Miroir, 26 septembre 2019, Après le disque, le concert. Qui s’ouvre de la même manière : le lancinant Road song, le sautillant Il y a et l’envoûtant Charmeuse de tympans. Trois ambiances pour un bel aperçu de ce que sera la soirée. Sur scène, un batteur et un clavier accompagnent la chanteuse, rejoints par intermittence par un tromboniste. Des musiciens solides pour poser une ambiance propice à l’envolée de la salle dans les sphères de la poésie et de la transe musicale. Le chant d’Ilia est impeccable, bien entendu, malgré un rhume handicapant. Tout sourire, elle nous communique son bonheur d’être là, d’enfin partager ses chansons si longuement mûries, de nous emmener dans son univers à la fois tribal et sophistiqué. L’immense gamme vocale de l’artiste semble défiler (ça mélopée, ça jazze, ça scatte, ça groove), sans ostentation aucune pourtant. Et disons-le, l’émotion est davantage palpable que sur le disque, les petites imperfections scéniques ramenant davantage de vie. Avant de reprendre pour conclure son Il y a accompagnée par le public, Ilia nous offre a cappella une chanson qui l’accompagne depuis des années : La goutte d’eau de Nicole Rieu. Choix surprenant et évident à la fois, tant le timbre de la liégeoise semble façonné pour ce morceau et tant on devine qu’elle s’en sent proche. Ne se termine-t-il pas par : « J'ai quitté la route qu'on m'avait creusée / J'avais trop envie d'être écoutée » ??? (photo Bernard RIE photographies)

ILIA, LE CONCERT
Liège, Cité-Miroir, 26 septembre 2019,
Après le disque, le concert. Qui s’ouvre de la même manière : le lancinant Road song, le sautillant Il y a et l’envoûtant Charmeuse de tympans. Trois ambiances pour un bel aperçu de ce que sera la soirée.
Sur scène, un batteur et un clavier accompagnent la chanteuse, rejoints par intermittence par un tromboniste. Des musiciens solides pour poser une ambiance propice à l’envolée de la salle dans les sphères de la poésie et de la transe musicale.
Le chant d’Ilia est impeccable, bien entendu, malgré un rhume handicapant. Tout sourire, elle nous communique son bonheur d’être là, d’enfin partager ses chansons si longuement mûries, de nous emmener dans son univers à la fois tribal et sophistiqué. L’immense gamme vocale de l’artiste semble défiler (ça mélopée, ça jazze, ça scatte, ça groove), sans ostentation aucune pourtant. Et disons-le, l’émotion est davantage palpable que sur le disque, les petites imperfections scéniques ramenant davantage de vie.
Avant de reprendre pour conclure son Il y a accompagnée par le public, Ilia nous offre a cappella une chanson qui l’accompagne depuis des années : La goutte d’eau de Nicole Rieu. Choix surprenant et évident à la fois, tant le timbre de la liégeoise semble façonné pour ce morceau et tant on devine qu’elle s’en sent proche. Ne se termine-t-il pas par : « J’ai quitté la route qu’on m’avait creusée / J’avais trop envie d’être écoutée » ???
(photo Bernard RIE photographies)

Les chansons brassent divers thèmes, du deuil à la libération intérieure, de l’amour charnel à la passion castratrice, du rêve d’ailleurs à la liberté proclamée. De la poésie simple, pas toujours compréhensible de prime abord, mais à la musicalité affirmée. L’auteure Ilia s’entend à merveille avec la compositrice Ilia pour nous offrir des airs hypnotiques, où paroles et musiques ne font qu’un pour mieux nous attirer dans ses filets aériens.

Saluons enfin le magnifique travail du réalisateur, eRno (dit « le mentholé »), lui-même chanteur dans une vie parallèle, qui a su se mettre à l’écoute des désirs d’Ilia, l’encadrer sans l’étouffer, la guider et la seconder, pour offrir à ses chansons le plus beau des écrins musicaux. Au menu : rythmes exotiques, percussions tribales, envolées orientales, mais aussi des riffs de guitares par ci par là ou des claviers hypnotiques… Une variété de sons au service d’une voix d’exception.

Ilia a peaufiné son disque durant trois ans (le crowfunding qui a permis sa naissance date de 2016 déjà), n’hésitant pas à remettre son ouvrage sur le métier bien plus de 100 fois. Vu le résultat, on ne peut qu’approuver la persévérance dont elle a fait preuve. Sans doute fallait-il tout ce temps pour chasser les doutes et (se) convaincre du bien-fondé de proposer un tel OVNI dans le paysage musical francophone. A notre tour à présent de saluer ce travail en le faisant connaître par monts et par vaux.

 

Ilia, Ilia, Homerecords, 2019. Le site d’Ilia, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

Il y a
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