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Entre 2 Caisses, l’éternel masculin

Entre 2 caisses à Venelles en 2013 Photo d'archives Nicolas Blanchard

Entre 2 Caisses à Venelles (photo d’archives 2013 Nicolas Blanchard)

7 septembre, MJC de Venelles, « On voudrait vous dire au revoir »,

 

La nouvelle est tombée comme un couperet : Entre 2 Caisses arrête de chanter. Quoi ? Nous allons devoir nous passer de ce quatuor qui depuis plus de vingt ans régulièrement réchauffait nos cœurs, remplissait nos verres de vers gouleyants, étiraient nos coins de bouche vers le le haut, inondaient nos oreilles de musique mélodique, rythmée, déchirante, chaleureuse, cuivrée ?

Je rappelle pour ceux qui étaient sur une île déserte, ces Dalton là sont composés de : Jean-Michel Mouron au chant, il est grand et c’est le seul qui ne joue pas d’un instrument – auparavant il s’occupait de faire chanter les autres en tant que tourneur, producteur et manager. C’est actuellement celui de Sarcloret. Bruno Martins, également comédien, joue de la contrebasse et se sert d’un coffre naturel pour faire vibrer l’air autour de vous de sa voix puissante. Gilles Raymond chante et voltige avec ses guitares et ses instruments étranges (dulcimer, sorte de piano simplifié traditionnel d’origine médiévale à cordes frappées aux marteaux ; cajón, simple caisse pour les percussions…). Enfin Dominique Bouchery est une sorte d’Éole chantant avec son merveilleux accordéon chromatique et ses clarinettes, et un visage aussi élastique que celui de Jim Carey. Qu’ils chantent en solo ou ensemble, que la guitare ou l’accordéon les accompagnent ou qu’ils laissent la place à de superbes impro jazz cuivrées, le mélange de ces personnalités particulièrement affirmées est détonant.

Après nous avoir enchanté(e)s pendant trois ans sous la peau des filles, le quatuor revêt à nouveau la peau des garçons qu’ils n’ont cessé d’incarner depuis la formation du groupe, faisant revivre les chœurs polyphoniques a cappella, les chansons de marin, les chansons à boire du « groupe un peu hydrophobe » et les chansons grivoises traditionnellement viriles, mais toujours avec le petit détail distancié qui fait ressortir la tendresse sous la gaudriole et la satire sociale sous la rigolade. C’est ce patrimoine sans âge qu’ils nous prouvent être toujours d’actualité, mêlant chansons anciennes traditionnelles, œuvres du XXe et XXIe siècle poétiques ou humoristiques avec légèreté, profondeur et dérision.

C’est donc dans un petit tour de leurs sept albums de 2000 à 2014 qu’ils nous entrainent, après une entrée en matière hilarante, en lieu et place de Bruno Durruty. Ce sera l’occasion de nous conter leurs aventures au long de toutes ces années de tournée. L’accordéon virtuose de Dominique et les chœurs mâles font des merveilles sur la danse macabre de Saint-Saens, avec Francis Blanche rendant hommage parodique à la médecine, ou au divin alcool sur une rhapsodie de Lizst, chantée naguère par Les quatre barbus. Musique classique à l’honneur encore dans l’inénarrable Bouilleur de grue de Bernard Joyet sur L’air du froid de Purcell, ou le Sacha chanteur d’opéra de Thibaud Defever.

Puis Gaston Couté et sa belle langue patoise, bouche pleine de terre cheminant – chemineux éternel sous les étoiles, jusqu’à Gainsbourg couché dans l’herbe tendre, ou Claude Semal, qui s’oublie dans une comptine-berceuse déconseillée aux enfants : « Je pète au lit / Mon mâchicoulis sent le brocoli ». Tous personnages peu éloignés de ce Clodi-clodo de Nougaro : « Litron dans la poche / Traînant la galoche / Voici que s’approche le clodo ».

Des Filles de Lorient aux chants de corps de garde, en passant par Loïc Lantoine en cette épique virée à Bréhal, du cryptorockeur Yanowski et sa satire blasphématoire de L‘histoire du Christianisme, avec la complicité d’une dame du public, à l’odyssée des spermatozoïdes de Ricet Barrier, le répertoire masculin est au top.

Mais ils savent aussi manier la poésie au quotidien : Le temps qui passe « Dans un univers qui fout l’camp / j’fais des boulettes avec le temps ». L’hommage à la grande petite Edith, sans oublier Modigliani, par les mots de Leprest  et son superbe solo final de clarinette, basculant en une hilarante hymne à l’andropause, « le doux repos des sens » - d’Yvon Rosier, le maçon poète drômois de Chantemerle. Ou l’absurdité humaine, Tout fout l’camp vue « là-haut [des] oiseaux / Qui nous voient tout petit, si petits »

Un spectacle sur le fil entre rire et émotion, qui en fait toute sa valeur humaine. Il faut l’avoir vu une fois – au minimum – dans sa vie. Malgré nos demandes réitérées, leur décision est sans appel : il vous reste jusqu’au 9 janvier 2021 pour les écouter, pas un jour de plus. Alors un conseil : regardez bien leur agenda et précipitez vous.

 

Le site d’Entre 2 Caisses, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.

En concert en Suisse en janvier 2020, à Donzère le 18, le 26 mars au Bijou à Toulouse. Autres dates sur leur site.

« Le bouilleur de grue »
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« Clodi-clodo » à Barjac
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