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JeHaN, la parure et l’apparence du rock’n'roll

JeHaN cet été à Barjac (photo Anne-Marie Panigada)

JeHaN cet été à Barjac (photo Anne-Marie Panigada)

Le disque en vers car il n’est pas en prose
Le disque en verre car il est fragile
Le disque en vert car c’est pour le printemps
Le disque envers car il n’est pas à l’endroit

Est-ce son prénom tiré d’un lointain moyen-âge, la simple évocation du chanteur JeHaN (dont la singulière typographie, à bien y regarder, peut faire songer aux créneaux d’un château fort) nous ramène aux trouvères et troubadours, suggère un peu François Villon. Ce n’est pas faux : il suffit pour s’en convaincre plus encore d’aller le voir en tour de chant, seul ou avec son complice accordéoniste Lionel Suarez. JeHaN y a cette dimension sans âge, ce timbre de voix qui nous semble venir de loin, du fond de notre mémoire. C’est dire si le savoir poser sa voix sur des rythmiques rock’n'roll est en soit, sinon une révolution au moins un singulier événement dans le microcosme de la chanson.

JeHaN a toujours une collection de chanson, qu’il aime à dire « de saison ». « Ce sont des chansons que je cueille ou qui me cueillent, qui sont consentantes ». Des chansons prêtes à s’offrir, au cas où.

Un de ses copains, Christophe Aubert, traverse alors une époque difficile, et demande à JeHaN de venir, histoire de parler, de boire des coups. Et de faire de la musique. Le pote a un studio chez lui, sorte d’entrepôt gorgé de brocantes, de bibelots, de lustres et d’instruments vintage. Il rallume son vieil ordinateur et demande à JeHaN d’interpréter quelques chansons, qu’il colore à sa manière. Colorie plutôt, avec ses outils d’avant on se sait quelle guerre et, toujours prête, sa fidèle Gibson. Si ce n’est Éric Robin, un bassiste qui passait par là, posant les basses en dilettante autant qu’en amitié, Christophe Aubert a fait ça tout seul, sans nulle contrainte. Et c’est ainsi que des chansons de l’ami JeHaN sont rhabillées pour l’hiver, vêtues de chaud même si le résultat est paradoxalement aussi frais que léger. Ainsi paré de rock’n'roll, ça vous changerait presque un artiste.

Si on en croit JeHaN, Christophe ne connait rien à la chanson, ni d’Allain Leprest ni d’Anne Sylvestre ni de personne : « un vrai cancre ! ». Mais c’est un musicien très aiguisé. « Là où je suis cancre, il est bon » avoue JeHaN. Les deux complices se sont amusés à mélanger leurs styles, comme ça, en trois séances, rien que pour le plaisir, sans penser au lendemain, sans même imaginer en faire quelque chose. « Et au bout du compte, je me suis dit que c’était possible d’en faire un disque ».

jehan-le-disque-en-vers-jehanTrois reprises dans ce nouvel et étonnant album : Cap au Nord d’Anne Sylvestre, Garde-moi la mer d’Allain Leprest, ainsi qu’une petite oubliée des Frères Jacques, une pépite, La branche qu’on doit à Robert Nyel et Gaby Verlor.

Et des créations, toutes séduisantes, passionnantes. Deux chansons, dont une de jeunesse, de son copain Leprest (Bas les masques et Drôl’ d’ambiance dans le bar). Deux de Patrick Piquet, ami de toujours, éditeur et fidèle de Leprest (Lisa et Une chanson m’appartient-elle). Une de la chanteuse franco-québécoise Marion Cousineau (Le nid vide). Une de Delphine Boubal (Je suis né). Une autre d’Anne Sylvestre, Un bon garçon. Une de Bernard Dimey, Les chiens. Et cet autre encore, Ce qui m’occupe, signé d’une certaine Zelda Cayrecastel : sa fille ! Jolie corbeille de chansons, dont JeHaN a composé plus de la moitié des titres (les autres étant signés Anne Sylvestre, Lionel Suarez, Yves Duteil, Gérard Pierron et Gaby Verlor).

Un disque sans suite, un one shot comme on dit ? Peut-être. Pour l’heure, il n’est pas prévu de donner vie à ces chansons sur scène : « A deux c’est difficile, à trois ou quatre je ne le sens pas. Et le Christophe n’est pas prêt à tourner. » Un album qui, surprenant qu’il puisse être, ne dépare pas de la discographie de JeHaN, qui simplement nous en propose une autre et insolite facette. Un disque forcément collector. Donc indispensable.

 

JeHaN, Le disque en vers, EPM 2019. Pour commander ce CD, c’est ici. Le facebook de Jehan, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

Article rédigé initialement pour EPM sous le titre « JeHaN, Le Disque en vers, EPM 2019″

Pas de vidéo relative à cet album. On se console avec un titre écrit par Leprest, extrait de l’album « Les ailes de Jehan » de 1999 : Image de prévisualisation YouTube

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