André Bonhomme, malgré la bise qui mord

André Bonhomme (photo de presse non créditée)

« Une question se pose cependant / Sont-ils de leur temps / Ou d’un autre temps / Je crois qu’ils s’en fichent éperdument ». Les années passent et « l’enthousiasme est toujours là », nous dit-il. André est sans âge, comme ses chansons, tant que c’en est rassurant : quand, dans vingt ou dans cent ans, la chanson pop-mode qui prévaut de nos jours aura été oubliée, bannie depuis longtemps, on pourra toujours écouter ce Bonhomme-là. Qui nous offre son nouvel album (le dixième) : Pourquoi ?, visuel de paysage nocturne au ciel étoilé. Mais, même dans le livret, pas la moindre photo de lui. Le rimeur-chanteur qu’il est est déjà dans le paysage, d’où ses mots peuvent surgir, impromptus, drôles, pertinents, impertinents, amoureux encore. D’une voix certes vieille mais dansante, d’une énergie qui ne peut que faire songer à celle de Vigneault.

« Suspends ton vol, dit le poète / Stopper les heures, ce n’est qu’un leurre / Inexorable le temps passe / Jusqu’au jour où le grand sommeil / T’emportera et dans ses bras / Tu s’ras guéri du temps qui passe ». Car l’idée de la mort est, plus qu’avant, nichée dans ses vers : « La mort, la mort nous épouvante / Je préconise qu’on la chante ». Chantons !

Bonhomme est poète, ça s’entend. Il est aussi philosophe, fabuliste : en fait c’est un humain de bon sens, un bonhomme qui promène son âme et sa carcasse dans la vie. Et chante l’amour et l’amitié, accompagné par le son du basson, de la flûte traversière, du piano et du violoncelle : « Le besoin d’aimer, il est partout / Le besoin d’aimer, y’a qu’à se baisser / Pour le ramasser ».

Bonhomme est un épicurien qui nous honore de ses mots gourmands jusqu’au tréfonds de notre dedans. Parfois, souvent, la gourmandise cède le pas aux tourments et aux pourquoi : « Il y a tant de science en nous / Amis frères humains / Tant de possible et d’impossible / D’intelligence en nous / Tant de beauté, tant de bonté / Amis frères humains / Alors pourquoi ? ». Le poète est un sage qui tente de poser sur le monde un regard précis, apaisé. Mais à l’évidence inquiet.

Sage oui mais, modeste qu’il est, simple bricolo de la ritournelle : « Constance, patience / Quelle fougue, quel zèle / Chez les bricolos de la ritournelle ». Le poète hirsute n’a beau faire que dans les « p’tits airs de rien, les naïves rengaines », quoique à « la rime ciselée, vibrante musique / le bien charpenté dans le genre classique », il n’en est pas moins pour ceux qui l’aiment, l’écoutent, le repassent en boucle, (bon)homme d’importance, pourvoyeur d’un peu de bonheur, de plaisir de vivre, même si là encore « la camarde monte la garde ».

« Page blanche nécessaire / Pour que mûrisse la moisson / Magie de l’imaginaire / Des mots, des couleurs et des sons », tel est l’art et le nécessité d’André Bonhomme, ce lyonnais sans âge, avec supplément d’âme. Nous n’aurons de cesse de vous le recommander.

André Bonhomme, Pourquoi ?, autoproduit 2019. Pour commander cet album : acibonhomme@laposte.net, 06.68.41.08.38. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est ici.

Pas de vidéo, semble-t-il, extraite de ce nouvel album. On en profite pour réentendre un titre extrait d’un précédent album, De l’aurore au couchant, de 2015 :