Barjac 2019. Ben Herbert Larue… à la scène comme à la vie !
Sauvé dans Anne-Marie Panigada, En scène, Festivals, Francis Panigada, L'Équipe
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28 juillet 2019, chapiteau du Pradet, festival Barjac m’en chante,
Que les choses soient claires, cette chronique de concert, encore plus que d’autres, n’aura rien d’objectif tant elle s’appuie sur un lien affectif, noué au fil de rencontres, autant qu’un coup de cœur artistique. C’est en mai 2017 que nos chemins se sont croisés lors de l’inauguration à Rouen de la place Leprest et de la présentation de l’exposition photo réalisée par Anne-Marie (la même qui fut présentée à Barjac). A cette occasion une scène ouverte nous aura permis de le découvrir, digne « enfant de Leprest » certes, mais artiste singulier à la personnalité affirmée, humain plein de générosité… depuis nous n’avons cessé de le suivre, de près ou de loin, jusqu’à ce concert de Barjac tant désiré, tant attendu.
Ben Herbert Larue c’est d’abord un « ogre de parole » tel qu’il se définit lui-même, un affamé de mots, un artiste formé au monde du cirque et à celui du théâtre, un chanteur-poète tour à tour poignant, lunaire ou drôle, un charisme et une force de l’imaginaire. Sa voix puissante et rocailleuse rappelle le Vintrignier de la Rue Kétanou mais aussi quelques grands écorchés vifs de la chanson française.
D’emblée le public aura été conquis et « La première » chanson autour des humeurs et des émois des artistes entrant en scène aura habilement ouvert le spectacle. Puis subtilement, bienveillant et souriant, Ben Herbert saura installer l’émotion, d’abord avec « Nos 15 ans », ode au temps qui passe, à l’amour qui se batit tout au long d’une vie, avec une magnifique reprise de Leprest (« C’est peut-être ») et l’évocation sensible des « mains de ses grands-mères ».
Aléas du format obligé du concert au chapiteau qui contraint à réduire son tour de chant et se priver de certains titres, Ben Herbert aura fait le choix, au détriment de moments plus denses, de la participation du public. On a les défauts de ses qualités et sa générosité, cette envie de partage autour de « J’aime les gens », chanson fantaisiste non sans rappeler ce « Je hais les gosses » de Leprest, dont il fera reprendre le refrain, aura marqué une rupture dans ce concert pour certains spectateurs. Et oui ! Le public barjacois est autant « affamé de mots » que l’artiste lui-même !
Qu’importe ! Ben Herbert n’est pas un chanteur uniforme et possède de nombreuses facettes: comédien, mime, circassien… en témoigne le délire onirique de « Je fuis », folle course poursuite menée tambour battant. Enfin pour ceux qui n’auront pas lâché, il nous offrira encore quelques moments de grâce, évocations de l’enfance : « Myriam », fleur s’épanouissant sous les bombes et chantant pour couvrir les cris, ce gamin du « Deuxième », histoire intime, avec ses questionnements, son regard touchant, ce passé qui l’a fait chanteur. Viendra ensuite ce final, interpellation du public, florilège de nos tics, nos travers, nos petites obsessions, nos pensées absurdes avec cette reprise en chœur : « Nous ensemble, se battre des ailes qui rassemblent ».
Ben Herbert Larue allie lyrisme, fantaisie, poésie mais la magie ne serait pas totale s’il n’y avait pour magnifier l’ensemble ses deux acolytes de scène : le contrebassiste Xavier Milhou et le multi-instrumentiste (claviers, trompette, bugle) Nicolas Jozef Fabre. A eux deux, ils créent un environnement sonore qui souligne avec justesse et beauté les mots de l’artiste.
Pari réussi donc ! Pour le public qui le verra comme une des belles découvertes de cette édition et qui aura l’envie d’aller plus loin dans cet univers si singulier, pour l’artiste enfin dont le passage à Barjac est un coup de projecteur et une foison de rencontres. Gageons que le moisson fut bonne en témoigne la dédicace laissée sur sa page facebook :
De retour de Barjac m’en chante
De ces mille souvenirs
De ce chapiteau debout
De ces rencontres naissantes
De ce ballet de petites mains qui se sculpte en Chant Libre
De ce merci que je confie à l’écho
Pour le glisser à l’oreille
De toutes et tous
Qui ont œuvré à oeuvrer!
A vite
Le site de Ben Herbert Larue, c’est ici ;ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.
Merci Francis, je souscris à ton papier. Je le revis ici J’ai été ému touché… tu dis de façon mesurée ce que j’ai ressenti très fort. Vraiment et j’ai regretté de ne pas pouvoir rester dans les émotions du début coupés par des moments de paroles et l’envie qu’il a eu de nous faire chanter. Si j’insiste autant c’est parce que j’aime et j’ai envie d’aimer plus. Cet homme et ces deux musiciens ont de quoi nous embarquer loin. En tout cas ce que j’attends d’un auteur interprète comme lui et de ces deux magnifiques musiciens c’est qu’ils m’embarquent et ne me lâchent plus.
Quand on l’a vu pour la première fois il y a deux ans, énorme coup de coeur, en forme de claque, comme je n’en prends que tous les cinq ou dix ans, rien qu’en n’entendant que deux ou trois chansons. On en côtoie beaucoup, pourtant, des chanteurs. Comment, mais comment a-t-on pu passer à côté de celui-là? Je n’ai eu de cesse de questionner tous les gens bien « informés ». Et bien non, personne ne connaissait Ben Herbert ! Nous sommes allés, quelques mois après, le voir près de Rouen. Plus de 600 places dans la salle et c’était plein à craquer ! Il a donc bien un public fidèle et conquis, mais… seulement en Normandie. Un peu plus tard, en région parisienne, dans un tout petit lieu : une dizaine de spectateurs, un concert magique, tout en acoustique, au milieu des gens attablés. Bon, il faut vraiment faire quelque chose, me dis-je, on ne peut pas priver les gens d’un tel talent ! En vieille festivalière, j’étais persuadée qu’il était capable de faire un tabac à Barjac et enfin d’être connu et reconnu dans la France entière, voire en Suisse, Belgique, Québec même, pourquoi pas ! Mais, en donnant l’an dernier son EP à J-C Barrens qui ne le connaissait que de nom, je ne me faisais pas d’illusions. Peut-être, tout au plus, avait-il senti mon enthousiasme. Quand, en décembre, il m’a appelée pour me dire qu’il le programmait cette année, j’ai explosé de joie. Merci, merci, Jean-Claude, pour ton écoute, ton ouverture d’esprit, ta curiosité, ton appétit de découvertes, ta prise de risques. Ensuite, il a fallu expliquer Barjac à Ben Herbert, le convaincre de ne pas repartir sitôt son concert terminé… Et… je crois que j’ai eu raison ! La journée du lendemain a été riche en convivialité, en échanges avec les festivaliers, en interviews, en propositions de dates de la part de programmateurs…
Alors oui, certes – et il le reconnait – il a un peu trop parlé, nous privant de deux ou trois chansons qui auraient permis de rester tout du long dans la magie du début du spectacle, mais il a su retomber sur ses pattes pour nous offrir une fin de concert époustouflante et surtout, nous, vous, donner envie de retourner le voir. J’aime tout, chez lui : les textes, les musiques, le grain de voix, le jeu de scène, la complicité avec ses musiciens, mais j’aime surtout le bonhomme, attachant, franc, simple et, ce qui m’importe le plus, au fur et à mesure que j’avance en âge: il est à la ville le même que ce qu’il est en scène, comme le dit Francis. Je suis sûre que, comme moi, vous connaissez des artistes qui vous transportent en poésie, vous submergent d’émotion, vous bercent d’humanisme mais qui, une fois le rideau baissé, sont odieux, insupportables, froids et prétentieux. Personnellement, j’ai tiré un trait sur ceux-là, je ne supporte plus l’hypocrisie.
A titre indicatif, Ben Herbert est programmé le 17 mai 2020, au Théâtre Clavel à Paris. Qu’on se le dise !
Venant de toi, amateur de mots, fin connaisseur de bons auteurs et interprète de talent comme tu l’es, Christian, ton commentaire me touche beaucoup.
Je souscris à tout ce qu’ont écrit Francis & Anne-Marie Panigada et Christian Camerlynck.
Oui, Ben Herbert Larue est un artiste protéiformes et kaléidoscopique.
Une espèce de diamant brut qui brille de mille facettes et un brasier intense qui brûle de mille feux.
Et, même si je peux entendre les réserves de Christian à propos des propos du milieu de concert, j’ai aussi apprécié ce moment, qui n’était en rien fait de parlotes, mais a permis au public de découvrir des aspects attachants de la personnalité du mec.
Parce que, même s’il y a en lui quelque chose des Higelin (père et fils), de Ferré, mais aussi de Michèle Bernard et Anne Sylvestre (pour des raisons différentes, bien entendu), il développe ce ton unique qui fait la singularité d’un artiste.
C’est pourquoi je comprends ô combien l’enthousiasme des Panigada et que je le partage avec ardeur.
Car il y a bien longtemps que je n’avais pas ressenti un tel souffle et pressenti un tel potentiel chez un jeune artiste en devenir…
Merci pour vos commentaires à tous trois. Bien qu’ayant affirmé au début de ma chronique le parti pris de la subjectivité, je me rend compte que j’ai, malgré cela, porté un regard objectif sur ce concert, bridant, peut-être, quelque peu mon enthousiasme. J’ai tenté de restituer autant que possible les ressentis d’amis dont le jugement était sur, dont le tien Christian. Je suis heureux que tu ais, malgré tes remarques, pris la mesure du talent de cet artiste. Il est bien aussi, Anne-Marie, que tu complètes cette chronique avec cet élan du cœur, cette passion qu’a engendré notre rencontre avec Ben Herbert. Et ton regard, Frank, me conforte dans notre admiration pour cet « ogre de parole ». Et oui ! C’est un formidable coup de cœur tant artistique qu’humain ! Un de ceux des dernières années, l’autre étant, d’un point de vue artistique plus qu’affectif, Jérémie Bossone.