Barjac 2019. Sire au château, succès royal !
Sauvé dans En scène, Festivals
Tags: Barjac 2019, David Sire, Nouvelles
30 juillet 2019, Esplanade Jean-Ferrat, festival Barjac m’en chante,
Et un vocable de plus dans l’escarcelle des amoureux des mots. Désormais, mesdames, messieurs, au bureau comme devant la caissière; vous parlerez aussi de « bidulosophie ». Et découvrirez que, sauf à être un ermite, même à l’insu de votre plein gré, vous bidulosophiez depuis longtemps déjà.
Ces deux-là, il y a des chances que vous ne les connaissiez pas, mais c’était avant. Et que désormais vous en parliez tout le temps, même dans votre correspondance, vos SMS cachetés à la Sire.
Ils sont arrivés sur scène et, en deux mots trois mouvements (car ça se meut, beaucoup ; ça émeut aussi), vous ont construit un univers aussi insolite que franchement familier. Qui parle de nous, de vous, d’eux un peu, de petites choses individuelles et de grande mémoire collective. Ils bidulosophent.
BIDULOSOPHIE. n.f. De bidule (personne indéterminée, « J’ai croisé bidule hier au Café du Midi, à Barjac »), et du grec ancien ?????, sophia : « sagesse » ou « savoir »). Terme créé au 21e siècle par le troubadour et alchimiste des mots David Sire. La bidulosophie est la collecte ainsi que la restitution de trésors tels que des bouts de vie, objets, promesses, histoires, souvenirs et talismans. De la bidulosophie naissent invariablement des chansons, des poèmes. La bidulosophie est, selon son inventeur, « une science inexacte, une sagesse approximative, un poème qui dessine sa danse sur le fil du présent ».
Et vous êtes là, le cul confortablement posé sur un siège en plastique ou, nettement plus rudimentaire, sur les gradins, à écarquiller les yeux plus que d’habitude, ouvrir vos esgourdes plus que nécessaire, bouche bée, à les voir évoluer avec des mots, des musiques, avec des pompes à vélo ou un énorme ballon rouge gonflé d’espérance, à les voir jouer, chanter et danser, à faire de cette scène bien plus qu’un cirque. A vous estomaquer, vous époustoufler. La chanson c’est aussi cela, quant elle ose sortir de sa chrysalide pour prendre le large : elle papillonne autrement.
« Si j’étais moins… / Mais un peu plus… / M’aimeras-tu comme l’opium ? / Si j’étais moins… / Juste un peu plus… / Mystère et boule de gomme. » C’est surtout Sire qui parle, qui chante ; si Badin cause, c’est dans la répartie des notes, des attitudes, des expressions : dans la plénitude des sons, il souligne, il surligne, il travaille, il stabilo bosse. Etonnant de naturel, poète et bonimenteur, David Sire est acrobate du verbe. Cerf Badin badine-t-il au moins ? Oui. Sur l’affiche, le nom du complice est accolé à celui de la vedette. Même corps, même typo : il suffit de le voir en scène pour bien comprendre. C’est un duo, pas l’un sans l’autre, comme si l’un anticipait l’effet de l’autre, le prolongeait. Des faux jumeaux, certes, mais des qui frèrent comme personne. Des qui se passent l’humour comme à table on se passerait le sel. Inséparables.
C’est aussi impressionnant de douceur. Porteur d’audace et purgeur d’angoisse. De la chansonthérapie ? Je ne sais ni n’ose l’expression (la preuve que si !) mais il y a un peu de ça. Tout ça par des pitres, pas désordonnés, non. Stylés au contraire, bien sapés : nœud pap’ (vous voyez, je vous parlais de papillon…) et cravate, vestes bien taillées. La différence est dans le propos, dans l’esprit : « Moi, pour m’amuser, il me faut pas grand chose / Un morceau de nuage qui se métamorphose ! »
Tant d’esthétiques, tant de propositions, tant de démonstrations font qu’on n’élira pas « le plus beau concert de ce festival ». Mais il est sûr que ce Barjac-là restera celui de Sire, mets de choix, mets de roi. Il est évident que son nom est désormais ciselé dans la mémoire des gens. Largement de quoi amorcer de nouveaux cercles bidules. De parler, de se parler, de se confier, d’échanger. En fait exactement ce à quoi sert la chanson quand elle n’est pas frelatée par le chaud biz.
Une chose encore : on doit pour partie ce superbe spectacle tout en relief à Marina Tomé, celle qui « tria mon âme » (c’est sa parfaite anagramme, que Sire tient pour bidulosophique, et ça ne s’invente pas !).
Le site de David Sire, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui (nous avons à plusieurs reprises parlé de ce concert, c’est là.
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