Barjac 2019. Il plut, il plut Bergère
Sauvé dans En scène, Festivals
Tags: Barjac 2019, Jean-Louis Bergère, Nouvelles
31 juillet 2019, chapiteau du Pradet, Barjac m’en chante,
Ne tournons pas autour du pot : cet artiste a fait débat. Et c’est bien, ça me semble même être la fonction d’un artiste. J’ai entendu dire, d’une personne qui n’y était pas, qu’il avait vidé le chapiteau, que, pfft, le public avait fui dans l’instant, disparu. C’est très exagéré, j’y étais. Jean-Louis Bergère, dont le précédent album tourne autour du thème de « l’apparition-disparition », en sourira. Convenons simplement que Bergère pratique un art quelque peu éloigné de la chanson-étalon que d’aucuns, tels des archéologues amateurs, viennent encore trouver à Barjac, comme si elle existait. Qu’il peut ne pas plaire à tous, qu’il peut indisposer.
Ceci dit, reconnaissons qu’il faut être résolu, volontaire, engagé, pour vouloir découvrir et pénétrer l’art de ce songwriter angevin, presque casser la glace, briser la vitre (« J’aurai traversé le miroir […] J’aurai jeté dans le mirage / Tout le poids de mon corps »), pour pourvoir s’égayer librement dans ses textes et musiques, son œuvre faite de paysages sonores qui ne s’offrent pas facilement au premier venu, se méritent. Mais dieu que la récompense est belle pour qui décroche le pompon. Bon, on lui reprochera aussi beaucoup de discours entre les titres, et ce moi je qui sans cesse revient, certes malhabile mais qui semble cacher la difficulté de traduire une œuvre organique en mots, un art qui justement tente de trouver les mots à travers la lumière et le son, un art constamment en recherche. N’en parlons pas, vivons-le, « Laissons venir ce qui doit venir… ».
Je parlais de paysages : ils sont par lui tous autant intérieurs qu’extérieurs : l’esprit voyage à travers le corps. C’est tout autant de distances dont Bergère nous entretient, dans toute l’acception du terme. La voix est grave, le propos tout autant quand il laisse percer l’inquiétude. De temps à autres, par une intonation plus marquée que d’autres, Bergère laisse percer de réelles influences, de possibles tutorats. Ici Bashung, là Gainsbourg, Murat, Marchet… Mais c’est Leonard Cohen qu’il revendique par un titre sur le chanteur disparu : « L’homme qui chante / N’est peut-être pas venu / Mais n’est peut-être pas perdu / Gardons sa place chaude et libre. »
La musique pop-rock de Bergère certes prédomine, mais jamais ne ruine l’idée ni les propos. Propos parfois soulignés, surlignés, par la voix d’Evelyne Chauveau, par ailleurs sa compagne. Evelyne est au synthé, Blaise Desol aux guitares électriques, Hervé Moquet à la basse. Bel équipage pour beau voyage. Si les personnage sur scène sont immobiles comme rarement, c’est ce qu’ils jouent, ce qu’ils chantent, qui fait de ce concert une incroyable balade secouée de somptueux mouvements.
Jean-Louis Bergère sur Bandcamp, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
Certes un beau travail. Mais c’est esthétique autant qu’ennuyeux. La musique planante type années 70 a des prétentions qui feraient sourire les amateurs de Magma. Les textes, sans doute bien écrits, n’évitent pas les clichés les plus courus pour nous parler de lui et encore de lui et surtout de lui. Entre ceux qui ont quitté la salle, ceux qui n’ont pas osé et ceux qui sont restés parce qu’ils étaient coincés au milieu des autres, on ne peut pas dire qu’il plut vraiment.
Oui, je sais, il est de bon ton de considérer le public de Barjac comme amateur de chansons comme on en faisait en 1960, réfractaire à toutes musiques hors des ballades ou du jazzy, bref d’ignorer que ce public-là a aussi évolué. De plus, Jean-Louis Bergère et sa chorégraphie statique n’a rien de bien dérangeant si ce n’est le peu d’intérêt que suscitent ses chansons.
Bergère avait sa place à Barjac, ce n’est pas une erreur de programmation, mais sa prestation demeure à ses risques et périls. Une seule chanson c’est très beau ; une demi-heure c’est déjà trop.
Beau et ennuyeux, bien écrit et cliché, tout cela me semble contradictoire. Je ne me suis pas ennuyée un seul instant à l’écoute de ce disque, mais peut-être ai-je gardé l’esprit 68-70′…Que je préfère au commercial bling bling du 80-90, bien qu’on trouve à toutes les époques de belles créations, surtout dans la chanson de proximité, mais pas que.
Quant à la musique actuelle, je parle de la vraie, elle est heureusement riche et diverse, et je déplore qu’il y ait des chapelles d’un côté ou de l’autre pour donner des jugements sans appel sur tel ou tel…
Je ne sais pas ce qui a été dit entre les titres, mais dans les chansons le « Je » n’est employé que dans le titre cité par Michel, Tout le poids.
Tous les artistes parlent d’eux-mêmes dans leurs chansons, et s’ils sont sincères, c’est là qu’ils sont le plus universels.
Jean-Louis Bergère emprunte une voie qui, bien sûr, désarme. Sa musique est autant influencée par la « chanson », mais celle des créateurs exigeants (Manset, Bashung, Gainsbourg, Murat) que par le folk anglo-saxon (Cohen, Dylan). Il y inclut des sonorités d’aujourd’hui et ne reste pas figé dans une époque. C’est un chanteur de notre époque. Sa voix grave interprète une poésie rare. Oui, le silence aussi fait partie de son univers et c’est tant mieux. Il a sa propre personnalité et ne ressemble qu’à lui car il a son monde intérieur. Enfin,son dernier album « Ce qui demeure » vole au-dessus de ce que l’on entend d’habitude dans la « chanson ». Il a su se défaire d’un carcan, d’une étiquette « chanson française » pour aller plus loin, chercher d’autres espaces, ce qui déroute logiquement un public conventionnel. « Ce qui demeure » restera.
Qu’il fasse débat n’est pas un problème. Jean-Louis Bergère a l’exigence des créateurs, des créatifs. Michel Kemper ne s’y trompe pas dans ses commentaires. Bien sur, moins variété rive gauche, que les habituels pensionnaires de Barjac(et ce n’est pas péjoratif pour ceux ci)Jean Louis et ses amis explorent les chemins qu’explorèrent naguère, Manset, Collection D’arnell Andréa, la veine sombre de la poésie baudelérienne et symboliste…Poésie Mi ballade mi Joy division,Jean Louis Bergère explore un chemin exigeant ,celui de l’écriture d’une oeuvre…Un oiseau chante toujours la même petite chanson, je crois que celle de Jean louis Bergère ravira ses Ouailles, et à l’avenir, les autres.