Off Avignon 2019. Stef, bluffante et touchante
12 juillet, Atypik Théâtre
Stef est une bombe. Oh, pas au sens vernaculaire du terme, non. Quoique… « Il est dodu, il est joufflu, il ne passe pas inaperçu / Quand je le promène dans la rue », cette Ode à mon cul donnée en rappel, est devenue son hymne, son symbole. La fierté de toutes les femmes dotées d’appas bien féminins, d’un « bassin méditerranéen », montagnes que des modeurs n’appréciant les femmes que comme porte-manteaux voudraient réduire à de mornes plaines ou de chétives collines.
Pour éviter à la gent masculine un surcroît de tension préjudiciable à sa bonne tenue (morale), et peut-être aussi des conséquences néfastes des courants d’air sur les cordes vocales, plutôt que le justaucorps de son affiche (oui, je préfère ce mot si approprié à l’infâme body), ou le très chic maillot à pois de la parade, elle a revêtu une élégante combinaison pantalon plissée d’un beau rouge vermillon. Elle en prend une allure de déesse antique, avec une coiffure généreuse qui m’évoque Colette au mieux de sa forme.
Mais plutôt que de la forme – bien que ce soit le thème, sinon du spectacle, mais de son titre – parlons du fond. Je n’ai pas dit le fondement, on y revient. Avez-vous remarqué comme on parle de l’assise pour désigner la base, l’élément fondamental, la racine de toute chose. Stef est à la racine de l’humain, plus spécifiquement féminin. Elle en incarne toutes les valeurs, parfois les contradictions, avec toute sa générosité.
Parce que Stef, c’est surtout une bombe d’émotions. Une voix de chanteuse de jazz, presque de chanteuse d’opéra façon Marianne James, un texte et une faconde qui peuvent faire penser à Juliette, une énergie sans faille même quand ça va mal pour elle, un humour explosif mais jamais méchant parce que surtout à base d’autodérision… C’est une chanteuse fantaisiste de haut-vol, qui redonne à ce genre toute sa noblesse. Nous faisant dans ce théâtre de poche à l’ambiance cabaret, une entrée digne de Broadway.
Stef c’est la bonne copine, quelquefois les amies en abusent – hilarante revue de toutes les vacheries que certaines femmes s’échangent entre elles entre deux bisous, ou plutôt deux accolades de joues pour ne pas abîmer son rouge à lèvres… « Ah les bonnes coco, les bonnes copines ! ».
Stef c’est parfois un bon plan pour des hommes peu soucieux de sentiments durables… Une sorte de Bridget Jones méditerranéenne ! C’est la chanson pour tous ceux qui l’ont larguée, l’appel au secours avec « l’horloge biologique qui tourne », « Si vous avez un fils ? Un petit fils ? Un grand père ? Un chien ! »
Saluons Lucas Lemauff, le pianiste comédien chanteur toulousain, ex Lucas Stoipovcon de Virage à droite avec Stef pour l’occasion rebaptisée Stéphanie de Morano, ex chanteur-pianiste de B comme Fontaine, complice d’Hervé Suhubiette, toujours chanteur pianiste du Cabaret social All’Arrabiata, accompagnateur de génie qui joue les pince-sans-rire et met des glaçons dans le bouillon… procédé connu du compassé et de l’impulsive, du clown blanc et de l’Auguste porté à la perfection. Il faut l’entendre chanter Belle… pendant l’éclipse de Stef qui nous fait un numéro de femme saoule plus vrai que nature « Hier j’en ai pris une balaise / Si je ressuscite ce sera ma dernière cuite ». Tant qu’on pourrait faire une soirée à thème avec le numéro très convaincant aussi d’Agnès Bihl déjà nommée.
Sans aucun tabou Stef sait : défendre le poil, présenté comme un réfugié pourchassé : « Je voudrais vous parler d’un être meurtri… » *; présenter un numéro de bigoudène à la pêche au mâle (Je veux y aller Maman !), dans un déguisement efficace réalisé avec un simple rouleau d’essuie-tout , retenez l’activité pour amuser vos mômes un mercredi après-midi ; évoquer ses ragnagnas – et leur manque à venir, « la puberté en pire », avec une richesse de vocabulaire à nulle autre pareille ; et faire des blagues que je ne vais pas vous révéler, pour vous en laisser la primeur. Sachez que Stef n’est pas vulgaire, elle est juste drôle, et dans n’importe quelle tenue. A ce propos, Messieurs, vous ne serez pas frustrés tout le long du spectacle, je vous laisse le soin de découvrir, si vous êtes bien sages, les charmes de la dentelle noire.
Stef c’est aussi une capacité à se mettre à nu, et là je parle moralement, pour évoquer ses deux grands mères, Mamoune et Mamita, Suzanne et Rachel, un peu du Nord, un peu du Sud, couscous et tranche de moka. Une formidable chanson qui vous fait fondre d’émotion.
Encore cinq séances pour vous remettre en forme et en bonheur avec Stef. Ne la ratez pas ! C’est à vous que ça manquerait.
* un joli cadeau d’Alexandre Bonstein et Patrick Laviosa
Stef ! En pleines formes, en duo avec Lucas Lemauff au piano, 19h25, les jours pairs, jusqu’au 28 juillet, 95 Rue de la Bonneterie.
En alternance avec Garance les jours impairs.
Retrouvez Lucas Lemauff dans le spectacle All’Arrabiata, Cabaret satirique social sur les chroniques télévisuelles d’Ascanio Celestini, à 21h Bourse du travail CGT, jusqu’au 26 juillet sauf le 22.
Le site de Stef ! c’est ici. Ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, là.
je connais très peu Stef mais j’ai souvent entendu parler d’elle et votre article me donne envie de la découvrir!
par contre je connais bien Lucas son pianiste et acolyte de longue date.Et je peux dire que c’est un artiste bourré de talents qui accompagne merveilleusement bien ceux avec lesquels il travaille.
mais pas que….il chante très bien et il fait chanter les autres avec brio! car sur Toulouse il excelle dans son rôle de chef de choeur pour des amateurs amoureux comme moi de la belle chanson française,au sein de l association « voix express »
alors bravo à Lucas et à Stef et bonnes représentations en Avignon!!!
Evelyne