Off Avignon 2019. Da Silva repeint le noir en couleurs

Da Silva, le mystère des couleurs (photos©Steffie-Maya)

9 juillet 2019, l’Arrache-Cœur,

Après des débuts dans des groupes punk rock ou électro à la fin des années 90, Da Silva a rejoint la Chanson dès son premier album en 2005.
En parallèle il écrit des livres-CD pour enfants en collaboration avec d’autres artistes ou/et illustrateurs, et notamment Françoiz Breut. Le premier en 2006 paru comme tous les suivants chez Acte Sud est justement ce Mystère des couleurs. A l’origine Françoiz était la conteuse et l’illustratrice. Sur scène la voix Off est celle d’Emmanuel da Silva lui-même, tantôt enregistrée, tantôt en direct, ce qui donne un petit côté surréaliste…

A gauche, le batteur Romain Viallon crée l’univers sonore : le rythme, les cymbales, mais surtout tous les bruits, à commencer par le vent…
Da Silva, c’est le corbeau Coco, il est peintre, habillé de noir avec la tenue traditionnelle des artistes, faluche, blouse et pantalon assortis, noirs comme il se doit, il n’est pas déguisé en corbeau. Il surgit sur scène, en ombre chinoise, de derrière le tambour d’une grosse caisse géante, qui fait un écran rond, sur le côté droit de la scène.
Avec son gros pinceau, il trace virtuellement sur le tondo ainsi obtenu un horizon rouge, un ciel rose, un croissant de lune, une nuée grise, puis apparaissent une bande orange, violette, tout un arc-en -en ciel qui fait monter le soleil, et pousser des fleurs.
Comme un tableau de Bioulès, de De Staël ou de Rotko, ou plus proche de nous un paysage de Marie Bobin. Son pinceau projette des étoiles sur la toile virtuelle, un enfant rit dans le public…
Et le batteur effleure ses cymbales du bout de ses pinceaux à lui, légers comme gerbe de blé… Il faut saluer son travail subtil, les percussions à secouement, les bruitages, les grelots… 

L’artiste nous fait tourner ce cercle, ce monde qu’il nous met à l’envers…Il nous dessine un requin, nous zèbre de pluie, la magie opère tout de suite, pour les petits, agenouillés sur leur siège, appuyés sur le dossier du rang précédent, pour mieux voir cet écran animé…

On pourrait croire Coco heureux, mais il n’en est rien : ses plumes sont noires, et les gens n’aiment que les oiseaux aux plumes colorées, ils disent qu’il apporte le malheur, alors qu’il n’est qu’amour… C’est la chanson des couleurs.

Coco loue son logis à l’écureuil, pour quelques noisettes. Mais son propriétaire veut lui faire signer un contrat, et Coco interroge le public pour savoir s’il doit le faire. Deux avis, les enfants, toujours positifs, crient « Signe, signe ! ». Les adultes ont repéré la métaphore, et cet écureuil là leur évoque quelques déboires, avec ces prêteurs que « votre argent intéresse », et ils disent : « Non, Non ! ». Mais il signe, car il lui faut bien une demeure…

Toujours le conte a double lecture, la couleur noire rejetée, le propriétaire intéressé, la corneille Marta, l’amie de Coco, « un peu spéciale, un peu spatiale » emportée par un courant d’air, qui se brise les ailes, tombe sur la tête et ne reprend pas ses esprits. Et qui pourtant est soignée par Chloé, la petite fille rousse. Marta se prend pour une hirondelle, « sur le bout de tes baisers, sont posées des hirondelles / qui annoncent le printemps / la saison sera belle ».

C’est Chloé  qui expliquera les couleurs à Coco, il suffit de les voir. En attendant, elle doit trouver un jardinier pour mettre d’accord entre eux les légumes du jardin. « Salsifis, salsifis, a murmuré la laitue (…) vous êtes concombre ou quoi? » La ronde des légumes qui s’affichent sur l’écran, le jardinier qui n’a pas de dents, n’aime pas la soupe, mais le vin… Le lapin nain amoureux d’un matou…Tout est prétexte à dessins, à musique, à chanson. Le batteur s’en donne à cœur joie, rythmant au tambour les passages un peu inquiétants (les enfants adorent ça!)

Après quelques réglages aux premières séances, le spectacle est devenu très fluide, bien enchaîné. Damien Luce et Da Silva ont réussi la combinaison de tout ce que souhaitait le chanteur : peinture, vidéo, expression, mime, chant, ambiance musicale, interactions des vraies ombres et des fausses, danse (le ballet des danseuses que l’on voit en ombre chinoise a été mixé avec un dessinateur en live).

Et quand Coco est expulsé, se retrouve SDF, dans une poubelle, c’est Chloé qui lui donnera la solution du remède à la mélancolie, état si difficile à expliquer aux petits, la solution du mystère des couleurs: « Dans les yeux de tes amis il y deux immenses soleils qui te regardent, plein de couleurs Coco, plein de couleurs ». Message adapté de 4 à 104 ans.

Le mystère des couleurs, Emmanuel Da Silva en duo, spectacle musical à partir de 4 ans, 13 rue du 58° RI-Porte Limbert 06 83 45 57 71, Salle Moustaki, du 6 au 29 juillet à 12h, durée 50′, relâche les mercredis.
Spectacle en tournée, prochain concert à Chelles le 12 octobre 2019 puis le 13 et 14 octobre à Paris. Prochain livre CD pour enfants Le petit nuage. Album pour adultes le 27 octobre Au revoir chagrin.

La page facebook de Da Silva, c’est ici.  Celle du spectacle, là. Ce que Nosenchanteurs en a déjà dit, là.