On va l’appeler Monsieur

Monsieur et tout un orchestre

C’est une voix androgyne qui nous surprend dès le premier titre, La cigale et le tzigane, idéalement placé pour définitivement accrocher nos oreilles et résolument explorer tout le dedans de l’album. Un album joyeux, ludique, accompagné d’un bout à l’autre d’une musique un rien vintage qui saute comme un jeune cabri au lait. En fait un bon swing coloré comme on n’en fait plus, comme on n’ose plus. Vous dire qu’on est ici loin du régime guitare-voix est un euphémisme.

Lui c’est Sébastien Dufour, auteur-compositeur-interprète, de surcroît comédien, qui campe un rôle et se fait appeler Monsieur. En fait « Monsieur & tout un orchestre ». Relativisons, l’orchestre en question est un trio, mais qui joue comme quatre. Si on est à l’aise dans ses tables de multiplications ça pourrait faire douze. Je parlais d’un rôle, dont scénario et dialogues ont ici été confiés au parolier Thierry Ferrer, mais pas que. Car Monsieur a du bon goût, d’avoir choisi Ferrer certes, et de surcroît faire vivre des chansons de Roger Riffard, copain de Brassens qui fit souvent ses levées de rideau, tant qu’il mourut en 1981 deux heures avant tonton Georges. Il y a trois de ses chansons ici : La petite maison, Comme je te aime et Timoléon le jardinier (en duo avec la chanteuse Deborah Weber). Rien que de savoir ça, ça doit vous donner envie de l’écouter.

Onze titres sur ce premier album, onze tableaux fort différents, qui vont de scènes rurales avec pâquerettes à d’autres plus urbaines peuplées de « jolies salopes ». Des fables en fait, impertinentes comme il faut, souvent coquines, qui n’ont pour sagesse que d’être talentueuses.

Moustache et barbe (mais pas sur toutes les photos) lissées, crâne en partie dégarni, pompes lustrées, Monsieur cultive un look qu’a priori on ne saurait conjuguer avec le vieux-Orléans, « sorte de B.O pour une vedette américaine qui jouerait dans un western spaghetti ou un polar français des années 70 ». Car Monsieur toujours dénote et ne saurait se confondre avec le tout venant. Ni tout à fait dans la tradition, ni dans l’illusion d’une nouvelle chanson : à part, cultivant sa différence. Et sa déférence à Riffard c’est important.

Tout ça pour vous dire que Monsieur & tout un orchestre est une bien bonne nouvelle dans la chanson, un petit souffle différent et facétieux qui secoue nos oreilles ; ça fait du bien de la savoir, c’est encore mieux de l’écouter.

Monsieur & tout un orchestre, Homme demain, autoproduit/ Inouïe Distribution 2019. Le site de Monsieur & tout un orchestre c’est ici.