Marion Rouxin, focales et profondeur de chant
Sorti il y a quelques mois déjà, il aurait été grand dommage de passer sous silence le quatrième album (sous son nom) de celle qui fut la voix, de 1999 à 2006, du groupe Paul et Robin. Parce qu’à nouveau il est d’une écriture fine, soyeuse, aux mots surpiqués de passion. Et parce que cette voix, ces intonations, ne peuvent nous laisser indifférent. Chacun des onze titres est en lui-même un moment précieux qu’on a envie de prolonger, replay, avant de passer au suivant ou revenir au précédent ; chaque chanson est riche de vers fluides qui presque tournoient, virevoltent, de mots qui donnent vie, personnifient. Tout est parcelle de vie ici : la pluie, l’océan et le soleil, la rivière, elle, lui, les ridules et rigoles de la peau, l’enfant, la café du matin l’odeur des croissants chauds, les miettes d’amour et de pain… C’est une chanson soucieuse de tout, qui s’émerveille de tout. Et de rien. Qui nous regarde. Et questionne.
L’autre est pluriel, habité et peuplé. C’est tant celui qu’elle aime qu’elle même. Et les autres encore. « Et passent les amis / Et viennent les parents / Des nouvelles de la vie… »
Dès la première écoute, ces chansons sont à nos oreilles d’une grande importance. La voix-écrin leur offre une somptueuse mise en scène comme un théâtre pour elles toutes seules, focales multiples et profondeur de chant sans égal. La voix nous attire, les mots sans mal nous retiennent.
Tout est ici dans le sensible. Dans la présence, dans l’absence (« C’est long comme tu es loin / J’essaye de lire un peu / De dissiper les brumes / Qui s’accrochent à mes yeux / Et puis toujours je fume… »), la distance aussi, que contrarient d’autres titres qui saisissent en plans rapprochés « ton pouls là sur ton pull / ton haleine de lait tiède » et « le long des courbes de la peau / ces longues branches, ces herbes folles / qu’le temps trace à la Picasso / à la Matisse, à la Warhol ». Tout est ici tactile. Chaque note, même, fait corps, touche à touche, avec le propos, les émotions qu’elle accompagne, qu’elle ponctue.
La surprise, pas désagréable au demeurant, vient au dernier titre, Météo marine, où, au refrain, le piano cède à l’électro et ouvre plus encore le spectre vocal. Comme un feu d’artifice d’où sont tirées les plus belles fusées.
Superbe album dont il nous faut créditer l’autre et brillant associé de cette exemplaire réussite : Edouard Leys (piano, rhodes, orgue Hammond, claviers, etc) qui co-signe avec Marion Rouxin les musiques et avec Maël Darion les arrangements.
Marion Rouxin, L’autre. Tilt/distribution Coop Breizh 2018. Le site de Marion Rouxin, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
J’ai découvert Marion Rouxin grâce a
à la chanson « la rivière » que vous nous aviez proposé d’écouter ainsi que le magnifique clip
j’en suis tombée « amoureuse » et je me suis achetée l ‘album (trouvé sur le site de Marion et helas!inconnu chez Cultura!!!)
c’est vraiment une merveille que vous avez superbement évoquée dans votre article
je vous remercie de nous faire découvrir ces perles que vous dénichez pour notre plus grand plaisir
Evelyne
J’ai appris que Marion Rouxin avait été invitée par France Culture le mois dernier.
Merci à NosEnchanteurs de nous avoir fait découvrir cette artiste majeure…il y a déjà bien longtemps !