Aubercail 2019. Je ne vis pas ma vie, je la rêve ! [2/2]
Mercredi 22 mai 2019, ouverture Festival Aubercail, Soirée Higelin,
[La première partie de cet article, c'est à lire ici]
L’entracte bienvenu est l’occasion de reprendre un peu nos esprits, l’occasion aussi de croiser dans la salle des visages vus il y a un an au Père Lachaise lors d’une certaine journée où la pluie n’était pas la seule à tremper nos visages… Heureusement, comme toujours lors du festival Aubercail, le bar tenu par les bénévoles efficaces et souriants propose des boissons et de la petite restauration éthique et pas toc. L’esprit du festival, c’est aussi de proposer du covoiturage pour regagner ses pénates à l’issue du spectacle, ou d’accueillir certaine revue de référence sur la chanson sur les stands proposant de chouettes produits dérivés, dont le t-shirt collector de cet année reprenant crânement le credo de Maitre Jacques : « Je ne vis pas ma vie, je la rêve ». Le concert reprend avec Ci git une star, morceau ô combien touchant brillamment interprété tout en sobriété par un François Puyalto très élégant en costume framboise. Nous partons ensuite avec Armelle Dumoulin au Parc Montsouris. Sa très belle interprétation en piano/voix fait remonter une certaine petite boule dans la gorge en se souvenant de ce titre diffusé lors de la cérémonie au Père Lachaise… Alors, forcément, nous nous sentons nous aussi un peu comme des routiers entre loups et chiens, même si plus que jamais, la vie c’est ce qui nous tombe dessus toujours au moment où on y croit plus… Mais voilà un parfait contrepoint à nos langueurs languides, avec L’attentat à la pudeur, puissamment mise en joute par Chloé Lacan et Laurent Madiot, putain de duo lubrique que n’aurait pas renié Stanley lui-même… Rejoints sur le final par Ottilie B. en mari outragé, ils font de ces moments zob-scène un grand moment de folie furieuse parfaitement maitrisé. Retour au calme ensuite avec Cet enfant que je t’avais fait par Lacan et Askehoug (voir photo), liés dos à dos de mots déliés, superbe hommage en guitare /voix, leur deux voix si complémentaires mariées magnifiquement. C’est à Kacem Mesbahi qu’il revient de se lancer avec brio dans le soliloque déjanté de Habla quoi ?, rejoint en cours de route par tous ses petits camarades pour une litanie faussement cacophonique ponctuée par un très beau solo de oud. Tiens, j’ai dit tiens !, nous assène ensuite Ottilie B., crâne rasé derrière ses machines avec plus que jamais un troublant petit quelque chose de Brigitte Fontaine dans la voix et dans la gestuelle. Un véritable moment de grâce suspendue… Les suivants ne seront pas mal du tout, avec les très belles versions de Mamy par Thomas Pitiot, Tombé du ciel par Laurent Madiot ou Je suis mort, qui, qui dit mieux, tellement touchant interprété qu’il est par une Sarah Olivier habitée et parfaite en divine diva déjantée… Vous reprendrez bien un petit supplément de larmes.. ? Parfaite transition, quoi qu’il en soit, pour le sublime Pars, revisité façon tango funèbre halluciné par l’accordéon de Chloé Lacan et les voix entremêlées de Dimoné et Ottilie B. Le cœur au bord de lèvres, suspendus aux mots comme des cailloux au fond d’un lance-pierre, nous sommes comme l’enfant, impatients, on aime la vie, et la mort ne nous fait pas peur ! La belle salle de l’Embarcadère tremble d’émotion toute entière et la communion païenne est sans faille au sein d’un public conquis et chauffé à blanc. Comme pour ne pas se quitter encore, l’ensemble des artistes de la soirée entonne alors en chœur et en cœur le final d’un Tête en l’air chaleureux et ô combien revigorant, qui donne irrésistiblement envie de tricoter des gambettes et se poursuivra fort longtemps au milieu des rires et des danses. Tous, toutes, sans doute, sommes alors amoureux d’une émotion légère comme un soleil radieux, dans le ciel de la fenêtre ouverte. Tout le monde descend dans la salle, partage son micro ou quelques pas de danses, une étreinte ou un sourire complice. Et je vous jure bien avoir entraperçu quelque part dans les cintres de la scène, sur la terre, face au ciel, une crinière blanche indomptable et un sourire malicieux. Tête en l’air, amoureux… Et puis, et puis,des allumettes au fond de ses yeux, des pianos à queue dans la boîte aux lettres, des pots de yaourt dans la vinaigrette et des oubliettes au fond de la cour !
Une soirée inoubliable, et la preuve irréfutable qu’une journée sans écouter Higelin, c’est bel et bien une journée de foutue… Et demain est un autre jour.
Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Jacques Higelin, c’est ici.
C’est le moment de réécouter toutes les chansons d’Higelin que NosEnchanteurs a déjà partagées en VO, si ce n’est dans les chansons du jour, en lien dans les articles :
http://www.nosenchanteurs.eu/index.php/tag/jacques-higelin/