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CharlElie Couture toujours debout !

CharlElie Couture (Shaan C, photo tirée de sa ^page facebook))

CharlElie Couture (Shaan C, photo tirée de sa page facebook et de son site)

Sur la pochette, un majestueux rapace – un gypaète barbu, on s’instruit en lisant NosEnchanteurs ! – nous regarde d’en haut, surpris en plein vol. Faut-il y voir un portrait chinois de l’artiste ? Une façon de nous dire que la poésie permet de survoler le quotidien, prendre ses distances, planer loin des contin- gences ? Allez savoir avec lui.

Lui, c’est CharlElie Couture, qui nous propose son 23ème album, intitulé Même pas sommeil. Un titre qui sied à merveille à cet artiste touche-à-tout infatigable, qui nourrit nos rêveries de son blues nocturne depuis maintenant quarante ans. Il nous fait son grand retour en France (il a quitté New York où il vivait depuis 15 ans), avec ce disque et la tournée qui suivra, mais aussi un recueil de poésie, La mécanique du ciel, 50 poèmes inchantables (paru au Castor Astral) et une exposition de peintures au Musée Paul Valéry de Sète. 2019 sera une belle année pour lui.

On avait laissé notre Nancéen en Louisiane, d’où il nous avait envoyé en 2016 son magistral Lafayette, tout en rythmes cajuns. Il nous revient avec un album plus dispersé, mais d’une agréable longueur en bouche. Secondé en studio par les musiciens qui l’accompagnent sur scène (Karim Attoumane, Martin Mayer et Pierre Sangra), l’auteur-compositeur nous offre 13 nouveaux morceaux : 10 chansons en français, 2 en anglais et un instrumental. Du blues-rock comme il sait si bien faire, à l’inspiration d’outre-Atlantique (les 2 morceaux anglophones sont d’ailleurs les plus réussis du disque). Pas vraiment surprenant, mais réalisé avec un tel savoir-faire qu’il faudrait être bégueule pour faire la fine bouche.

91agvLtRj+L._SS500_Autant Lafayette était résolument joyeux et optimiste, autant ce nouvel opus trahit l’inquiétude du chanteur. Les chevaux froids (L’importance) aborde le thème des migrants par une belle métaphore sur les chevaux sauvages, Another Man Blues évoque les bavures policières dans une Amérique à la gâchette facile, Le lamantin dresse le portrait d’un senior viré de son entreprise, Toi ma descendance se demande quelle terre nous laisserons à nos enfants, Les heures caniculaires convoquent le réchauffement climatique… L’air du temps a des relents mortifères. Puissent les artistes, qui s’en nourrissent et ne cessent de nous mettre en garde, être entendus avant qu’il soit trop tard…

Quelques chansons plus légères viennent heureusement ponctuer l’album. Ode à l’Est (partie 1 et 2) est un titre à la gloire de sa région natale. Et la chanson qui a donné son titre au disque, Même pas sommeil, est un clin d’œil malicieux au Paris s’éveille de Dutronc. Même si sa mise au goût du jour ne prête au fond guère à sourire : là où le vétéran chantait les camions pleins de lait et les balayeurs pleins de balais, il est dorénavant question de punks à chien et de réfugiés érythréens qui dorment sur des cartons… En 50 ans, la capitale a bien changé !

L’album s’achève sur le très beau Résister Sister, chanson nostalgique sur le deuil, bouleversant piano-voix rehaussé par les éclats mélancoliques de la trompette de Camille Passeri. Aujourd’hui, ton départ interstellaire / Me fait penser que t’as lâché les amarres. CharlElie Couture, lui, est bien vivant et en pleine possession de son art. Réjouissons-nous qu’il n’ait pas sommeil, il n’en sera que plus actif. Pour notre plus grand plaisir.

 

CharlElie Couture, Même pas sommeil, Rue Bleue/Flying Boat, 2019. Le site de CharlElie Couture, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. Image de prévisualisation YouTube

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