Hardi Krüger !
20 janvier 2019, Agend’Arts à Lyon,
« Agend’Arts me fait crédit d’une carte blanche. Et avec les cartes comme en musique : on joue mieux à plusieurs. Accompagné d’une constellation d’artistes, laissez-moi vous présenter mes différents projets, pour le plaisir d’inviter, pour la beauté du guest. » Quatre soirées consécutives, autant de répertoires différents ou presque : Mehdi Krüger est sur tous les fronts avec pour camp de base Agend’Arts, une petite salle de la Croix-Rousse, à Lyon, où des postulants spectateurs doivent attendre dehors dans le froid, en quête de sièges encore disponibles. Krüger, nos lecteurs le connaissent depuis qu’il fut l’incontestable révélation de Barjac m’en chante. Un slameur sacré dans le village gaulois de la chanson : la Capitale des Gaules.
Vendredi et samedi, c’était concert avec Ostax First et invités : Melba, Cleim Haring et Slamourai de Chine. Ce soir comme jeudi dernier, ce sont deux autres temps, presque deux mouvements. D’abord le récit, exclusif, avant la sortie d’un album promis, d’un voyage à Rome, entre Mehdi Krüger et Denis Rivet, autre lyonnais que nos lecteurs n’ignorent pas. Pour le connaître, pour l’apprécier depuis pas mal de temps, on savait que le slam de Mehdi s’inscrivait dans la chanson ; on saura dès ce soir que la chanson de Rivet s’inscrit aussi dans le slam. L’amour pour cette ville, Amor Roma, qui se lit dans les deux sens. Quatre jours en escapade, en excursion. Quatre jours pour capter, enregistrer, noircir des carnets, se souvenir. Tout avait démarré peu avant, place des Terreaux, Lyon. L’idée de partir, l’ombre d’une femme… « Pas la peine de se faire un film, j’apparais pas dans le sien ». Des phrases rimées, des notes, des chansons. Des lieux, des gens, le brouhaha, Julia, la faconde, travelling sur la ville, Elisabetta… Rome, Roma, quatre lettres dans la buée d’une fenêtre de train. Roma, Rome, quartier du Trastevere, un gigantesque vide-grenier où on achète des centaines de photos, de tranches de vies, d’anecdotes, de quoi nourrir le récit de ces quatre jours. Au micro et aux mains, au regard qui évoque et vous appelle en ses souvenirs, l’osé Krüger, l’hardi ! Rivé à son piano, au chant, Rivet et ses filets de chansons. Scènes de vies, extérieurs nuit. « Renaissant des brasiers de tes cendres / Ni ami ni amante / A l’envers de Dante ». Des mots se déposent, des notes se posent, s’entremêlent, pièce par pièce font histoire commune où « tout est triste / Rien n’est grave ». La matière artistique est ample qui, dès le printemps, se restituera sur votre platine.
Entracte. Krüger aux impros, Lionel Martin au saxo. Mehdi Krüger fait performance free-jazz, autre poésie de l’urbain, tensions et scansions. « Sentez-vous ce phénomène étrange / Sentez-vous ces phéromones qui nous prennent jusqu’aux naseaux ? » Long palabre nourri ici de mots collectés auprès du public ou phrases piochées dans des piles de livres de poche. Le hasard des pages, de phrases. Ça parle d’elles-mêmes et les liens sont faciles, moins pour les mots qui sortent, vivent, font parfois valises bourrées d’idées. « Je suis reptilien. Je suis le rêve d’une humanité retrouvée. Je suis la panthère devant laquelle les autres animaux se taisent ». Le sax livre des sons de cargos agonisants, de docks fatigués, de jours languissants. « J’veux d’la sueur / J’veux de l’acre / Un truc bestial qui pourrait se vivre ». Le débit, le talent, l’art, tout fait sens, tout fait son dans cet invraisemblable tourbillon. Krüger est magnifique, Mehdi est grand.
Le site de Mehdi Krüger, c’est ici ; sa page facebook, c’est là. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
Le site de Denis Rivet, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
Beaucoup de personnalité et de présence sur scène…A voir absolument!