Cachés dans le Morvan : Jean-Michel Grandjean et Gilbert Delpieu
Parc naturel pour les uns, France profonde pour les autres, le Morvan n’est pas une réserve d’Indiens en voie de disparition, mais une région où l’on a su sauvegarder l’essentiel d’une nature et d’une humanité qu’il fait bon retrouver, ne serait-ce que dans les chansons. Faut-il alors révéler ses joyaux ou les taire comme les cueilleurs de champignons ? Je prends le risque de vous les déceler sachant, amis lecteurs, qu’il n’y a parmi vous que des gens respectueux et respectables.
Jean-Michel Grandjean, le plus parisien des Morvandiaux, puisqu’il fut conducteur à la RATP et chanteur du groupe Service Public, est un modeste. Avec la complicité de ses paroliers, dont Marc Havet et Gilbert Delpieu, il se fait l’écho de la vie ordinaire des gens du Morvan, loin des tumultes et des rumeurs médiatiques. « J’suis d’un p’tit pays / Dans les champs derrière chez toi. » La vraie vie avec ses joies et ses drames qui sont trop quotidiens pour qu’on les oublie. Loin de Mallarmé, ces chansons-là sont touchantes par leur simplicité directe, leur force est dans l’authenticité qui résonne dans les cœurs de ceux qui les écoutent.
Jean-Michel Grandjean sait composer les musiques adéquates, rock, valse ou d’inspiration traditionnelle, elles posent leur empreinte entraînante, sans tapage mais avec vigueur et il les interprète d’une voix chaleureuse.
Que ce soit à Château-Chinon, à Lormes ou Sur la Place de Corancy, le Morvan est au cœur de l’album, mais « Si tu veux qu’on reste amis/ Ne dis pas du mal de Paris ! » Ma maison fait des bulles évoque l’histoire ancienne d’un barrage. « Je suis un p’tit gars / De l’Assistance Publique », ou encore La messe des anges, d’après un chant grégorien, marquent l’album de ces images un peu jaunies d’un temps révolu, mais Déconne pas papa s’éloigne de la nostalgie par la vitalité étonnante d’un vieillard. On ne regrette le passé que lorsque le présent est moche. Toutefois, la réalité d’aujourd’hui est traitée avec un humour satirique que la jaquette de l’album ne dément pas. « Chante avec moi / Mais n’écoute pas/ Toutes ces foutaises-là » ; Du pétrole dans le Morvan est un rock enflammé, dans la dérision, jusqu’à « Total… épuisement ! » Et puis l’ouverture sur le monde est bien présente avec cette Morvandelle africaine qui marie les traditions musicales du Morvan et du Niger.
À noter : une reprise très honorable de La Morvandelle de Caradec, un autre Jean-Michel. Enfin, quelques surprises en cadeau-bonus bien caché, mais n’en disons pas davantage !
Jean-Michel Grandjean, Du pétrole dans le Morvan, CD 16 titres (+ bonus). Son site, c’est ici ; sa page facebook, c’est là. Contact : bigjohn@wanadoo.fr
Gilbert Delpieu, ancien enseignant et toujours peintre, sort son dixième album (eh ! oui) Que m’en restera-t-il et il serait temps qu’il sorte aussi de sa discrétion, si celle-ci n’avait, comme pour sa belle région, une fonction protectrice. Pour ne pas être perverties, les meilleures choses doivent se mériter. Le folk singer morvandiau s’attache donc à chercher le bonheur et la sagesse dans son environnement, plein de de forêts, de rivières, de prairies, de collines parfumées, de chemins de traverse. « Si les mots sont musique en do en fa en sol /Je voudrais pour finir que ma chanson s’envole / Qu’elle porte vers le ciel les fleurs les foins nouveaux / Le vent dans les épis et les coquelicots… »
N’en déplaise aux pseudos progressistes de la croissance aveugle, les chansons de Gilbert Delpieu nous rappellent qu’il ne faut pas négliger nos racines pour que demain soit meilleur. Le retour est un thème récurrent de cet album : Revenir n’est pas une apologie du passé, mais l’art de faire machine arrière pour retrouver une certaine pureté originelle et repartir à zéro. Le retour est aussi celui de la lumière dans Reviens gentil soleil, chanson d’espoir, comme Quelque chose qui luit. La quête du passé apparaît dans Je te chercherai partout à la recherche de l’être aimé disparu alors que Petit homme vert traduit la quête future d’un improbable martien-messie, porteur de tendresse.
Chansons d’espoir donc, où se mêle une certaine sagesse dans la modération (Ne monte pas si haut ou encore Attends-moi, appel à ralentir le rythme, de l’écolier en difficulté) et une soif de liberté contre Les lignes droites, « les clôtures », « les barrières », « les bonheurs interdits ».
Ajoutons que les arrangements de cet album sont signé Sylvain Pauchard (ex Martin Circus), ce qui ne gâte rien !
Gilbert Delpieu : Que m’en restera-t-il, CD 11 titres. Sa page facebook, c’est ici. Contact : gilbert.delpieu@orange.fr
Jean-Michel Grandjean : On a trouvé du pétrole dans le Morvan
Gilbert Delpieu : Que m’en restera-t-il
Jean-Michel Grandjean, un mec bien, amoureux du Morvan.
Je viens d’écouter la belle chanson « Que m’en restera t-il? »
Le bémol (comme on dit aujourd’hui au lieu de « le problème »…)
c’est que la musique couvre beaucoup trop la voix de Gilbert Delpieu, voix qui, déjà, n’est pas tonitruante.
Il faut donc se concentrer en écoutant la chanson plusieurs fois pour bien entendre les paroles. C’est regrettable.
C’est donc regrettable que ce bon chanteur « folk » ait cédé à la mode qui veut que les instruments couvrent maintenant la voix.
On peut faire la même remarque à propos du dernier disque de Nicolas Peyrac (« Suffit que tu oses ») où l’on a un mal fou à bien comprendre les paroles. Si elles n’étaient pas écrites dans le livret,
je ne suis pas sûr que j’aurais tout compris.
Pour Gilbert Delpieu, il aurait suffi que le son des instruments soit baissé d’un chouia pour que le résultat soit excellent. Dommage!