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Anne Sylvestre, en ce dernier jour de l’année

Anne Sylvestre (photo David Desreumaux)

Anne Sylvestre (photo David Desreumaux)

France-Culture, France-Musique, Télérama… les médias culturels semblent (enfin) redécouvrir Anne Sylvestre. Et c’est tant mieux. Ainsi ses 60 ans de chansons (un de plus depuis la parution de sa dernière intégrale discographique (1) ) ne tombent pas dans l’oreille d’un sourd. Car il faudrait l’être, sourd ou malhonnête, pour ne pas savoir le chant étonnant – et persistant – de cette dame à l’œuvre remarquable qui pourtant vit à l’ombre des médias, dans une indifférence suspecte. Dans l’ombre des grands de la chanson, dont on peut affirmer qu’elle est l’égale. Mais Anne Sylvestre est « juste une femme » et ses chansons de bon sens, de grande intelligence, à la fibre féministe affirmée, ne peuvent accéder à des médias bien trop frileux.

RÉÉDITION DE L’ALBUM « GÉMEAUX CROISÉES » Il est des albums qu’on traite avec plus de précautions que d’autres : celui-ci en est un, qui plus est fameux. Paru en vinyl il y a trente ans, il n’avait jamais été réédité en CD depuis, devenant au fil du temps un collector mythique, désespérant ceux qui savaient son existence mais ne l’avaient point. Nous n’aurons pas l’insolence de le chroniquer, de porter un jugement (d’autres l’ont fait à l’époque) sur un disque paru il y a trois décennies. Reste qu’à plusieurs titres, c’est un disque important, ne serait-ce parce qu’il rassemble deux femmes qui se ressemblent. Toutes deux chanteuses arrivées à un moment de leur carrière où, pour sans doute des tas de raisons, elles sont en proie au doute. Par un Bobino puis un Olympia, Anne Sylvestre vient tout juste de laisser choir sa guitare et son micro sur pied, adoptant la liberté de mouvement que lui donne un micro HF. « « On nous avait proposé de faire un spectacle ensemble. Cela ne nous disait rien ni à l’une ni à l’autre. Et puis, je suis partie au Népal ; en rentrant, j’avais décidé de ne plus chanter et j’ai retrouvé Anne qui était chez moi. Pour elle non plus, cela n’allait pas bien fort. On a reparlé de cette idée et finalement, on s’est décidées ! Mais dès le départ, on ne voulait pas de co-récital ; plutôt quelque chose de qualité où on aurait joué, bougé et chanté ensemble » (témoignage de Pauline Julien, Je chante ! magazine, no 11, 1993). Dans la corbeille de ce spectacle commun, les deux amies mettre leurs chansons. Ça donnera ce spectacle et ce double album (enregistré en mars 1988 au Théâtre d’Hérouville) mythiques, disque qu’il nous est enfin possible de retrouver, de poser sur nos platines. Pour l’anecdote, on trouvera dans cet enregistrement une traduction française un peu oubliée de Suzanne, de Leonard Cohen, bien éloignée de celle que nous connaissons de Graeme Allwright, plus respectueuse aussi. Anne Sylvestre et Pauline Julien, Gémeaux croisées, réédition Anne Sylvestre/Universal/EPM 2018.

RÉÉDITION DE L’ALBUM « GÉMEAUX CROISÉES »
Il est des albums qu’on traite avec plus de précautions que d’autres : celui-ci en est un, qui plus est fameux. Paru en vinyl il y a trente ans, il n’avait jamais été réédité en CD depuis, devenant au fil du temps un collector mythique, désespérant ceux qui savaient son existence mais ne l’avaient point. Nous n’aurons pas l’insolence de le chroniquer, de porter un jugement (d’autres l’ont fait à l’époque) sur un disque paru il y a trois décennies. Reste qu’à plusieurs titres, c’est un disque important, ne serait-ce parce qu’il rassemble deux femmes qui se ressemblent. Toutes deux chanteuses arrivées à un moment de leur carrière où, pour sans doute des tas de raisons, elles sont en proie au doute. Par un Bobino puis un Olympia, Anne Sylvestre vient tout juste de laisser choir sa guitare et son micro sur pied, adoptant la liberté de mouvement que lui donne un micro HF. « On nous avait proposé de faire un spectacle ensemble. Cela ne nous disait rien ni à l’une ni à l’autre. Et puis, je suis partie au Népal ; en rentrant, j’avais décidé de ne plus chanter et j’ai retrouvé Anne qui était chez moi. Pour elle non plus, cela n’allait pas bien fort. On a reparlé de cette idée et finalement, on s’est décidées ! Mais dès le départ, on ne voulait pas de co-récital ; plutôt quelque chose de qualité où on aurait joué, bougé et chanté ensemble » (témoignage de Pauline Julien, Je chante ! magazine, n° 11, 1993).
Dans la corbeille de ce spectacle commun, les deux amies vont mettre leurs chansons. Ça donnera ce spectacle et ce double album (enregistré en mars 1988 au Théâtre d’Hérouville) mythiques, disque qu’il nous est enfin possible de retrouver, de poser sur nos platines.
Pour l’anecdote, on trouvera dans cet enregistrement une traduction française un peu oubliée de Suzanne, de Leonard Cohen, bien éloignée de celle que nous connaissons de Graeme Allwright, plus respectueuse aussi.
Anne Sylvestre et Pauline Julien, Gémeaux croisées, réédition Anne Sylvestre/Universal/EPM 2018.

Farouchement libre, indépendante, Anne Sylvestre n’est pas de celles qu’on fait taire, dont on relit la copie, dont on dirige la carrière pour en faire de bons et dociles vendeurs de disques. On sait sa franchise, son franc-parler, son honnêteté : tout ce que le métier n’aime pas. On écarte des chanteurs pour bien moins que ça. On ne parlera pas particulièrement de chanson engagée à son propos, même si : elle porte simplement un regard précis, pointu, sur le monde, avec souvent une longueur d’avance sur les prises de conscience, les mutations. Elle est de ceux – ils sont rares – qui nous font parfois dire que la chanson peut changer le monde, peut anticiper des lois. Et c’est dommage que son chant ne porte pas plus loin, que le grand public au pire ignore son nom, au mieux ne la connaisse encore que par ses Fabulettes, estimable répertoire enfantin qui s’inscrit dans notre patrimoine tout autant que son répertoire adulte.

Elle est, comme son public, comme celui de la « chanson française de qualité » comme on dit parfois, en une forme de résistance, dans ces lieux farouchement volontaires où vit encore cette chanson exigeante qui fait son miel de textes bien écrits, de poésie, ces chansons qui portent paroles d’un art de vivre et d’espérer, de militer et d’agir.

Cette intégrale comporte 19 CD et la place d’un vingtième. Que de fait on attend. Comme on attend de futures grandes scènes. Qui vont venir.

 

(1)    Coffret de 19 CD « 60 ans de chanson ! Déjà ? » (276 chansons + 2 CD en public + 1 CD portrait) paru en décembre 2017 chez EPM/Universal régulièrement épuisé et réédité depuis. Préface de Philippe Delerm ; photographies de David Desreumaux. Existe aussi en coffret 3 CD, Florilège, de 45 titres. Commander le coffret, c’est ici.

Le site d’Anne Sylvestre, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

A signaler également une jolie réédition collector brochée de Coquelicot et autres mots que j’aime, d’Anne Sylvestre, enrichie de dix textes inédits, chez tous vos libraires.

Anne Sylvestre, qui coule de source

(photo Eric Nadot)

(photo Eric Nadot)

Archive. Cette chronique de scène remonte au disque Partage des eaux (2000), d’où le titre du papier. Paru dans les colonnes du quotidien La Tribune/Le Progrès, cet article était sous-titré : « Tout est bon chez elle / Y’a rien à jeter / Sur l’île déserte / Il faut tout emporter ».

« Les vieux les enfants / Les enfants les vieux » comme chante Michèle Bernard, tous étaient là. Pour celle qui interprétait Porteuse d’eau il y a… très longtemps. Pour celle dont Les Fabulettes nous ont bercés mioches et ravissent sans égal les nôtres. Pour boire à la source de ses chansons qui se répondent par-dessus les années, il suffit juste de tirer le fil qui les relie…
Anne Sylvestre n’est ni laitue bien tendre ni rose de première floraison. Mais c’est à l’évidence dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes. Et ce potage-là est d’excellence… « Je prendrais à tous les sourciers / Ma baguette de coudrier / Pour aller retrouver ma source ». A qui serait oublieux ou fortement distrait, Anne Sylvestre a rappelé la grande, l’immense artiste qu’elle est, un peu la «Georges Brassens au féminin» qui berça l’enfance de sa sœur de scène, Michèle Bernard, et lui donna l’envie d’être à son tour chanteuse.
Anne Sylvestre est le naturel incarné. Si elle chante l’eau et son partage, c’est aussi pour nous dire de ne point craindre la sécheresse, qu’il lui reste encore de l’eau. De celle pure du mont Gerbier-de-Jonc, de celle fluide qui nous apporte des chansons qui, pour simples, sont étonnement profondes, interprétées avec aisance. Tant que c’en est déconcertant, que nous avons l’impression, au plein cœur d’un festival touffu de talents et de révélations, d’apprendre encore de la chanson, d’assister à une magistrale leçon, un moment aussi rare que définitif, la prestation d’une vieille amazone dont les vers sont d’une musicalité exceptionnelle, frappés au coin du bon sens, malicieux souvent, magiques tout le temps. Comme le sont ces Fabulettes qu’elle ne chante jamais mais suggère constamment.
Madame, le plaisir que vous prenez à chanter nous est, par vous, au centuple redonné. A votre encontre les critiques ne peuvent que se permettre des articles d’amour. Celui-ci en est un, sans en avoir nullement votre talent.

Entretien, Le hall de la chanson 2017 Image de prévisualisation YouTube

« Les gens qui doutent », Olympia 1998 Image de prévisualisation YouTube

5 Réponses à Anne Sylvestre, en ce dernier jour de l’année

  1. nadine Le Roscouet 31 décembre 2018 à 15 h 46 min

    bonsoir , comme d’habitude un article extraordinaire pour une personne extraordinaire . Rien à rajouter ! parfait ! Anne Sylvestre m’ accompagne au quotidien , inutile de vous dire qu’avec 19 CD + ceux des concerts en Live , ils sont présents partout: dans le salon , dans la voiture dans l’atelier, même le réveil sonne au chant de cette grands dame ……… du coup obligée d’être de bonne humeur dès le lever
    j’ai même acheté une platine vinyle pour les anciens disques ;)
    pour ceux qui ne la connaissent pas ben…… ils perdent beaucoup à mon sens alors je partage dès que je peux ! merci pour ces articles qui donnent une belle place à la très bonne chanson

    je vous souhaite à tous une très douce année musicale
    Nadine

    Répondre
  2. Brian Thompson 31 décembre 2018 à 16 h 20 min

    J’ai connu Anne en 1974 et l’ai recroisée à diverses reprises depuis. J’ai même fait 6 heures de route pour aller la voir avec Pauline Julien à Montréal, dans « Gémeaux croisés ». C’est une grande dame de la chanson et une grande dame tout court, d’une intégrité totale, une générosité remarquable. Longue vie (encore) à elle!

    Répondre
  3. OLIVIER DELANGE 2 janvier 2019 à 9 h 42 min

    Rien à dire de plus avec autant d’éloges mérités
    C’est une Grande Dame qui a bercé beaucoup d’enfance et
    Qui continue avec nous, adultes

    Répondre
  4. Marie-Françoise Mollard 31 octobre 2020 à 18 h 16 min

    Si tu revenais,
    Si tu revenais, je me ferais la marraine de ce retour
    Si tu revenais , je pourrais te décrire, le Vrai nom de L’Amour .
    Je t’écrirais de ce que je comprends , plus que jamais,
    Du « Je t »Aime toujours » et son Serment , si tu revenais
    Je te raconterais , si tu lui revenais , si avec lui , tu parlais :

    Combien des fois, tout ce que j’ai en larmes étouffées , lu dans ses yeux ,
    Combien de ce chagrin , je craignais qu’ il en deviennent si tôt, trop vieux,

    A t’attendre
    Comment j’aurais voulu l’empêcher de se perdre , à s’éteindre ,
    Qu’il lui faisait trop mal , alors sans toi , ne pouvoir plus s’étreindre
    Sa peine fut si profonde de ton absence,
    J’ai dû vivre le combat de ressentir combien,
    Fut si lourd pour lui , le manque, de ton Essence ,
    De te demander pourquoi , la Vie avec toi ,
    La vie avec toi , n’aurait pas été … si bien ?

    Il a rêvé, et ne l’a pas dit , mais gardé , le cœur serré ;
    Discrètement , si seul en se cachant il a tant, pleuré
    De ne pouvoir comprendre , et tant se questionner ,
    D’un tel départ et de ton croissant mutisme ,
    Alors que tant d’Autres de Lui , s’éprendre ,
    Ne le rendait qu’encore plus triste …

    Il multipliait les réunions, croulant sous des engagements ,
    Il a aussi dû conjuguer le nom du Ciel éperdument .
    Sans doute jours et nuits pour ne pas , sombrer
    S’efforçant en vain d’oublier, le Nom du verbe Aimer ;
    Si tu revenais , je me ferais … marraine de ce retour .
    Je pourrais te dire moi aussi , le vrai nom de l Amour

    Sais-tu, , combien , et ,des nuits, comme des jours
    J’aurais alors pu , lui clamer, ce « Je t’Aimerais toujours »

    moi, qui n’ai pu que tenter des chansons,
    Dont il ne put cependant retenir le son,
    Il ne fut que délicat de saisir le bon ton ;
    Des notes de la guitare, je saisirais à toujours,
    Moi, je n’ai pu que …lui écrire des chansons
    Alors, Si tu revenais…

    Je me ferais la marraine de ce retour,
    Je te dirais ô combien, le vrai Nom de l’ Amour

    Répondre
  5. Marie-Françoise Mollard 31 octobre 2020 à 18 h 26 min

    je voudrais envoyer quelque texte(s) à Anne Sylvestre , dont un auquel je pense…
    . -écrit par moi-même , intitulé * Si tu revenais;
    (A cette Femme ), texte pour la Femme d’un Ami, que j’Aime, profondément, pour lui dire, alors que je pourrais lui décrire LE VRAI NOM de L’AMOUR

    Brèvemodestie
    Emmeph

    Répondre

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