Evelyne Gallet, bombe à fragmentation
La bio jointe à cet album nous dit qu’Evelyne Gallet « se taille un nouveau costume ». Nouveau, c’est pas dit pour qui la connait, même si ces chansons-là indiscutablement sentent le neuf ; toujours est-il que notre lyonnaise agrandit sa garde-robe avec, ma foi, une garde rapprochée de paroliers-compositeurs qui nous fait plus songer à de la haute-couture qu’au rayon habillement de chez Auchan. Haute-couture et, permettez-moi, haute-culture. Pensez : Patrick Font et Matthieu Côte (deux pour qui la Gallet sera toujours d’une absolue fidélité), Stéphane Balmino, Jeanne Garraud, Frédéric Bobin et désormais Reno Bistan, Lucarne, Martin Luminet, Max Lavégie (que des lyonnais !) et Clément Bertrand, Cédric Laronche, Dimoné et Thibault Defever. Si vous êtes client de la prose des Barbelivien et autres parvenus du tout-venant, ça ne vous dira rien, mais je vous jure, là, qu’on tape dans le haut du tableau, la cime de la chanson, le presque septième ciel. « On s’embrasse puis on s’embarrasse / On baisse la tête / On se dit «mais qui veut de moi ?» / Et toutes ces années on s’est habitué / À très bien faire n’importe quoi / Nous On est pareil que des gens malheureux / On est pareil mais en mieux… » : c’est lumineux, oui c’est Luminet !
Il est rassurant de savoir qu’une artiste, douée à l’envi, va plus loin encore dans son art, pousse les portes, élargit les murs, change la moquette et invite à tout va. La demeure de Gallet est agréable, accueillante. On la connaît et on sait ce que la dame sait faire, sait dire Mais « Je ne crois pas que l’on puisse dire de moi / Que je me mets vite en émoi / Je ne crois pas non plus que l’on puisse me taxer / D’être une vierge e?arouchée / Parler crûment ne m’a jamais bien effrayée / Déjà enfant je jurais comme un charretier / J’ai la langue ?eurie et je m’exprime librement / Tout du moins la plupart du temps… / Car / Ça me gêne, ça me peine / Je ne sais pas dire je t’aime / Les mots se planquent / Le courage me manque / Je ne sais pas, je ne sais pas… » lui fait chanter Reno Bistan.
C’est d’ailleurs presque à qui connaît le mieux sa Gallet, tel Balmino : « Je suis une ?eur de la rue / Je suis celle qu’on s’évertue / Sans jamais réussir vraiment / À caser c’est insolent / Une bombe à fragmentation / Un compte à rebours à rebonds / Contradictoires c’est évident / Un pollen au jardin du vent / Et que l’on m’aime ou quand bien même / On récolte ce que l’on sème ». Ce n’est pas que tout le monde écrit et décrit sa Gallet, mais chaque texte s’approche de la dame et quelque part nous apprend d’elle, presque nous surprend. La complicité est évidente dans cette espèce de confrérie d’amitié.
Toutes sortes de tenues ? Non, en fait qu’une : celle de l’émotion dans son nuancier de couleurs, de fragrances. Dit comme ça, ses auteurs et compositeurs ne sont pas que couturiers. Aussi parfumeurs qu’artificiers, ils inventent de nouveaux arguments à la chanson. Evelyne Gallet est la plastique même, une star, une diva, la modèle par excellence pour qui un auteur se damnerait afin d’être à son générique.
Evelyne Gallet, La fille de l’air, InOuïeS distribution 2018. Le site d’Evelyne Gallet, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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