Stavelot 2018. Mathias Bressan : allons enfants de la batterie !
Stavelot, « Une chanson peut en cacher une autre », 20 octobre 2018,
Pour un peu, il ferait peur, Mathias Bressan. C’est que ses avant-bras tatoués, ses bagouzes et son tee-shirt donnent au Bruxellois une tout autre image que celle qui orne son CD, où son pantalon de velours et son petit gilet le feraient presque passer pour un employé-comptable modèle. Certes, à y regarder de plus près, son physique de nounours rondouillard et le sourire éclatant qu’il affiche nous rassurent. Momentanément du moins. Car l’homme a beau être avenant, son univers musical se révèle des plus anxiogènes.
Entouré de deux guitaristes (Ivan Tirtiaux et Gil Mortio, qui accompagnaient déjà Claude Semal la veille), campé derrière sa batterie mise à l’avant-scène, il débute sur les chapeaux de roue avec une chanson d’amour triste (Seras-tu là encore / Avant que je me couche / Avant que je me touche / En pensant à ton corps). Le rythme est enlevé, le chanteur martèle ses mots autant que ses peaux, les deux comparses assurent la rythmique. C’est rock et c’est bon.
Le concert se poursuivra sur cette belle lancée. Quittant parfois sa batterie pour s’armer d’une guitare, se renforçant à l’occasion des deux synthés-boîtes à rythme, Mathias Bressan maîtrise son affaire et s’y entend pour faire monter la pression. Cela désarçonne bien quelques personnes du public, plutôt férues de chanson française « à l’ancienne », mais pour peu que l’on accepte de s’abandonner, le voyage est envoûtant. La majorité des titres de son nouvel album y passe. On savoure une Bière allumeuse, on fait face à L’imprévu… La tension monte d’un cran avec Ce qui m’émeut, mélopée allant crescendo jusqu’à la transe, suivi d’un Assassin du 8 (extrait de son 1er disque) sec comme une trique, auquel succède un angoissant Rue du Silence. A ce degré d’adrénaline, il est bon de redescendre quelque peu avec deux morceaux plus calmes (Des oiseaux sur la ville et La fille venue du Nord), pour mieux éclater dans un oppressant final tout en batterie martiale et guitares discordantes, Bleu et mon cœur. Le spectateur est K.O., la partie est gagnée.
Mathias Bressan reviendra calmer le jeu, seul à la guitare, avec une reprise de Julos Beaucarne (poème de Baudelaire), suivie de sa version traduite en français du célèbre Everybody knows (« Tout le monde le sait ») de Léonard Cohen. Sur un son vintage de synthé pourrave viendra encore Un peu d’amour et à tout de suite, avant qu’il ne nous quitte sur sa chanson nostalgique évoquant la station balnéaire de son enfance, Blankenberge.
Avouons-le, nous avions quelques appréhensions à l’entame du concert. Craintes nées de l’écoute du CD (voir encadré ci-dessus). Le tir est rectifié en concert et c’est une belle pépite que la scène belge nous offre là. Du rock ambitieux et sans fioritures inutiles, mêlé de chanson française, qui ne cherche pas la facilité et ne craint pas de susciter le malaise par ses rythmiques lancinantes. Une très belle découverte. Faites passer le message.
Le site de Mathias Bressan, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. En concert le 22 novembre 2018 au Studio de l’Ermitage, à Paris, en co-plateau avec Sacha Toorop, dans le cadre des 40 ans d’Igloo Records.
Le site de Volo, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’eux, c’est là.
Mathias Bressan , « Blankenberge »
Mathias Bressan, « La bière allumeuse »
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