Pourchères 2018. Hervé Akrich : le talent, rien de moins
7 juillet 2018, festival La Chansonnade à Pourchères (07),
Il a la bouille réjouie, le bide rebondi, la barbichette alerte et le verbe joyeux, avec de vrais jeux de mots dedans, de ceux qui fonctionnent au village et calent en bourg. Si je dis ça, c’est qu’Akrich n’avait de mot, au sortir de scène, pour louer ce public si attentif, de telle qualité, cette assemblée de Pourchères si belle, qui sait ce que chanson veut dire. Faut dire aussi que la prestation et le répertoire de cet artiste méritent tous les applaudissements du monde. Subtil auteur, remarquable interprète, Akrich a tout pour plaire : il a donc plu en plein soleil. Sa Champagne est loin et on connaît peu Akrich par ici : la surprise était grande, la révélation plus spectaculaire encore.
Il y a les droits voisins. Et la chanson cousine. Celle en parenté, en parité, qui frère dans la voix d’Akrich. Ce récital-là s’appelle « Cousinages » : le premier dans lequel il reprend des chansons à autrui. En fait les fait rencontrer les siennes (et vice-versa), se confronter, cousiner. Jacques Brel, Allain Leprest, Georges Brassens, Claude Nougaro, Michèle Bernard, Font & Val, François Béranger… Rencontre au sommet donc et je ne dis pas ça que pour le cadre, cette montagne d’Ardèche où est juché ce festival. Rencontre sur des thèmes entre des chansons du Rémois et celles de ses pairs, de celle qui s’interpellent, se répondent presque. Comme ce J’vais m’y faire et Samira comme ça et Le premier d’la classe qui toutes deux nous interpellent à leur manière sur l’éducation nationale. Cohérence. Les textes (les siens comme ceux repris) sont des pépites qui parlent abondamment de nous, de cette société mal menée. « Le temps c’est un truc pervers / Un machin mal foutu / Encore un coup tordu / D’la droite réactionnaire » affirme Akrich ; « Alors c’est fini ? On change plus la vie ? / On descend les calicots / On rentre chez soi illico / On pose les pavés / Bien assez rêvé » reprend Michèle Bernard. Joyeux Noël, La fessée, La statue, Quand Freddy est parti, Je ne te salue pas, Tous ces mots terribles (*), Akrich balaie le spectre de nos vies, de nos envies, de nos dépits, de nos répits.
La neutralité ne sied pas à Akrich. Engagé, lui ? A l’évidence. Plus encore : nature. De gauche ? Humain ! Qui plus est de bon sens. S’il manie « tous ces mots terribles / qui font des chansons », il le fait avec finesse et détermination. Avec évident talent. Il dégomme l’Homme et le remet à sa juste place (« Il est grand temps Darwin Charles / De nous descendre de ce piédestal / L’homme est l‘anomalie ») ; il dézingue pareillement son dieu (« Je ne te salue pas », dans un face à face avec la petite église de Pourchères, juste devant lui).
Parler de ce passionnant récital d’Akrich, c’est aussi parler de Vincent Bardin, son bien plus que musicien : son complice, son acolyte, son presque double. Talentueux comme pas deux, comme au moins quatre. Et drôle, drôle.
En fait tout est bon chez eux, y’a rien à jeter. Parlez-en à votre salle ou votre festival de proximité. Et tenez Akrich par sa barbichette. Ne le lâchez plus.
(*) de, respectivement : Leprest, Brassens, Brel, Nougaro, Leprest, Béranger.
Le site d’Hervé Akrich, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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