Michèle Bernard et Monique Brun : le CD commun

Michèle Bernard et Monique Brun (photo Jeanne Garraud)

L’une vit dans le Bourbonnais, dans une commune dont le nom ne manque pas de piquant. Hérisson que ça s’appelle. L’autre dans une petite ville juchée dans les monts du Pilat, entre Loire et Ardèche : Saint-Julien-Molin-Molette, ça ne s’invente pas.

Si vous questionnez l’une, elle vous dira qu’Un p’tit rêve très court « recueille des mots, des textes glanés par nous dans nos petites anthologies personnelles ». Et qu’on a choisi parmi ses chansons celles qui pouvaient entrer en écho, s’adouber, s’accoupler avec ces bribes de poésie…

Si vous questionnez l’autre, ce sont les mots qui sont venus s’enrouler aux chansons… Le résultat est pareil.

Qui de l’une, qui de l’autre, tant ce mariage de textes et de chansons nous paraît désormais évident, qu’on se demande presque pourquoi ne pas en avoir eu l’idée auparavant…

Non, l’histoire n’est (presque) pas là. L’histoire, la vraie, celle dont découle ce récital, ce disque désormais, vient de cette rencontre. Une rencontre différée dans le temps, une émotion vive, entre la comédienne chanteuse qu’est Monique Brun et cette chanteuse jamais éloignée de la comédie qu’est Michèle Bernard, qui d’ailleurs a débuté sur les planches avant de se découvrir et affirmer chanteuse.

Il n’y a, chez l’une, chez l’autre, aucune stratégie. Seulement le plaisir qui désormais guide leur parcours.

Ce n’est que le dix-neuvième disque de Michèle Bernard, une de ces artistes qui font la fierté de la chanson mais ne connaissent que peu les honneurs des médias. Une des rares cependant qu’on chante entre autres dans les cours d’école où sa Maria Szusanna et son Nomade détrônent sans mal les prétendus tubes du moment vite frappés d’obsolescence. De tous les chanteurs, seule Michèle Bernard a reçu quatre fois le Grand prix de l’Académie du disque Charles-Cros, ce qui en dit long sur elle et son œuvre. 

Peu ou prou, les amateurs de chanson ne connaissent Monique Brun que par son Léo 38, singulier et émouvant hommage à Ferré. Et par ses spectacle et disque avec les quatre chantistes du groupe Entre deux caisses. Deux incursions en chanson, et cette troisième à présent (la quatrième sera pour bientôt avec Thibaud Defever, le Presque Oui de la chanson), pour celle qui prend le temps de distiller ses couleurs et de peindre ses liqueurs entre deux tournées, de théâtre s’entend.

Un p’tit rêve très court est un moment arrêté, une rencontre, un troc d’amitié et de mots, « le désir du bonheur sur la Terre en désordre / deux rires qui cascadent à l’autre bout du pré ». La rencontre naturelle, évidente, entre les chansons de Michèle Bernard – dont quelques-unes sont réveillées d’un long sommeil – et les vers précieux et bouts de textes grapillés à Jules Supervielle et à Francis Ricard, à Pierre Autin-Grenier et à Eduardo Galeano, à Norge et à Hervé Le Tellier, à Samuel Butler et à Valérie Rouzeau, à Chantal Dupuy-Dunier et à Jean Rousselot. Et à Louise Michel, que Michèle Bernard retrouve à nouveau. Singulière et remarquable anthologie.

Michèle Bernard et Monique Brun font délice et merveille dans ce répertoire conjugué, cocon soyeux pour récital intime. Que ce disque révèle à un bien plus grand public.

Notons enfin qu’Eric Nadot, le réalisateur du DVD, fut l’auteur, en 2012, dans le cadre de sa collection Tranches de scènes (collection de reportages chansons sur DVD), du volume Autour de Michèle Bernard.

Commander ce disque sur le site EPM. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Michèle Bernard, c’est ici ; de Monique Brun, c’est là.