Natasha St-Pier, animation d’un 21 juin
21 juin 2018, Fête de la musique à Firminy (Loire),
Comme chaque année il y a foule sur la place du Breuil, à Firminy, pour cette fête de la musique. Une musique qui, ici, ne squatte pas les rues piétonnes, les bars et les places, mais se concentre en ce lieu unique, avec chaque fois sa « star ». Ce fut Cali l’an passé, qui succédait à Thomas Fersen. En 2013, on s’en souvient encore, c’était Jacques Higelin. Ce soir, changement de braquet : Natasha St-Pier y officie. Y’a pas plus de monde pour autant, comme quoi avoir les faveurs à outrance des médias ne change pas forcément la donne.
En première partie, Odlatsa, formation stéphanoise, dans un set bien mené et des mots acérés, chansons fortement engagées qui unissent colère et poésie : «?Aux frontières de l’anarchisme, de la sagesse et de la poésie » disent-ils. Conviction dans la voix de Xuan Dao, le chanteur, qui n’est pas sans faire songer à HK. Les mots sont violents, ne négocient pas, n’abdiquent rien. Il ne fait pas bon être l’incarnation du pouvoir face à cet artiste-là, lui et ses cinq compagnons de scènes et de route (guitare électrique, basse, batterie, violon et accordéon), qui forment bel ensemble et dispensent une énergie enviable. Niaque et talent font bon ménage.
Et Natasha St-Pier, une artiste qui nous vient du Nouveau-Brunswick, ci-devant vedette de la soirée. Elle et ses trois musiciens.
Si le son d’Odlatsa était bien équilibré, là, avec pourtant le même matériel, c’est quasi sono de fête foraine (de vogue, comme on dit ici), criante, gueularde, désagréable au possible, tant qu’on ne comprend pas. Les paroles, si ; l’intention, non.
Comment dire ? Natasha St-Pier chante bien, belle voix mais sans réelle émotion, un peu artificielle. Elle surjoue, ouvre tant la bouche qu’on y voit toutes ses dents, les amygdales en plus. Comme la Boulay, comme la Dion, pareille. Tant que parfois, c’est son guitariste-chanteur qui fait les finitions… Elle enfile ses chansons, parfois les lie d’un commentaire, parlant ici de son pays, là de son Pascal Obispo : celui qui lui a écrit tant de tubes et notamment Tu trouveras (de fait, elle l’a trouvé, le succès) qu’elle chante sans que l’assistance n’en soit plus émue que ça : « J’ai pas toujours les mots qu’il faut / Mais si tu lis entre les lignes / Tu trouveras dans mes chansons / Tout ce que je n’ai pas su te dire ».
Son dernier album en date est celui sur lequel elle bâtit ce présent tour de chant. Sur l’Acadie, son pays. Retour aux sources, un peu comme l’avait fait Nolwenn avec Bretonne, chipant ici et là des titres passés pour se légitimer dans un répertoire identitaire et ainsi se forger un nouveau statut gagnant dans la chanson. Avec du Michel Fugain (Tous les Acadiens, bien éloigné du fait acadien), du Zachary Richard (Travailler c’est trop dur, que Julien Clerc popularisa du côté de chez nous), et Isabelle Pierre (Évangéline, mythe identitaire par excellence pour les Acadiens). Et d’autres, des nouvelles. Du bien écrit, du bien chanté, sans plus. Et l’évocation d’une tribu qui appelle les esprits, les morts, et fait la fête toute la nuit… Mélange de folklore, de tranches d’Histoire et de clichés, répertoire attrape-tout pour brasser large, toucher tous les publics mais qui, au final, n’émeut guère. Les applaudissements sont de pure forme, sans particulière adhésion. Comme si on n’y croyait pas, ou si peu.
Les précédentes scènes de cette fête de la musique nous ont habitués à rencontrer des artistes avec une identité affirmée, un univers. Là, ce n’est qu’une interprète qui fait son show, sans plus. Il n’en restera pas grand-chose.
Le site de Natasha St-Pier, c’est ici.
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