Le souffle Chouf
Pour nourrir ses chansons, Chouf capte l’air du temps. Et tant pis si le ciel est à l’orage, si s’amoncellent des nuages, si plus tôt que tard ça va péter : « Tu entends l’orage arriver / ça va péter d’un seul coup… » En quelques vers, Chouf fait revue de presse : « fachisteries, relents de croix », politicards, « trop de guerres / de chars d’assaut / pour des frontières / ces murs trop hauts »… Et ce cimetière qu’est la Méditerranée : « Inondées les volières / Coulés cargos / Leurs rames / Tombés du ciel / Engloutis par les eaux / Morts les oiseaux ». On ne s’amuse pas du nouvel album de Simon Chouf, pas plus au reste du dernier Lavilliers. Sans être en berne, l’œuvre de ces deux-là, eux et d’autres, se drapent de tristesse et de dignité pour photographier le monde de leurs mots. Des maux. Les chansons de Chouf ne sont pas plombantes pour autant : sa musique très cuivrée, rythmée, arrive à faire danser les mots. Comme parfois un chorus à l’explosion annoncée (« Tu réveilles mes cyclones… »), mais pas un accompagnement aux cris de haine qui le précèdent. Mises à part quelques chansons d’amour, pas moins futiles (Baby doll, Fugitive…) et des sujets plus personnels (Nuits de silences, Vie de vertige), Volatils est un implacable réquisitoire, trame serrée filée de métaphores et de barbelés, ciel lourd où les hirondelles volent bas, où les notes, pour fortes qu’elles soient, n’arrivent pas à couvrir le silence. Où la peur et l’urgence sont les plus fortes.
Œuvre coutumière d’un artiste digne d’intérêt, plus même, pour autant contraint d’autoéditer son disque. Faut-il que les labels discographiques soient à ce point malades pour laisser sur le bas-côté de tels chanteurs, si forts dans l’expression, si passionnants ? Le toulousain Simon Chouf est de ces grands qu’on tait, qu’on ignore. Pourquoi et comment est-ce possible ?
Chouf, Volatils, autoproduit 2017. Le site de Chouf, c’est ici : ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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