Soldat Louis : encore un disque, toujours un rhum
Ça en fait des marées depuis Du rhum des femmes… Trois décennies presque que Renaud Detressan (Gary Wicknam, c’est lui) et Serge Danet (Soldat, c’est Louis) inauguraient à Lorient (sous le parraînage de Renaud, celui de « Dès que le vent soufflera, je repartira… ») à la fois le bateau Soldat Louis et la longue traversée qui, vu la ferveur du public, semble loin d’être achevée. Au fil des escales, le personnel à bord a certes bien changé, pas les deux cap’taines, inamovibles et talentueux. Voici le neuvième album (hors disques en public et compilations), le troisième signé chez Coop Breizh.
Il y a bien longtemps que nous ne comparons plus un nouveau Soldat Louis à l’aune du premier album, Première bordée. Non qu’ils soient en deçà du premier jus (ils le sont tous, celui-ci inclus), mais cet album est devenu en son entièreté un mythe dont tous les titres sont, au moins en scène, des tubes. Prenons les suivants pour ce qu’ils sont. Et celui-ci, à sont tour, pour un excellent album qui laboure une veine semblable au premier, pareille aux autres (des chansons « sucrées, salées, un peu piquantes voire bien épicées »), en cultivant toutefois sa singularité. De toute façon, c’est en public que les chansons se révéleront ou non : prenons le pari – ce n’est pas un gros risque – que le premier titre, Billevesées et balivernes, gagnera tôt ou tard l’envié statut de tube : « Au diable les nuits d’ivresse / De chair, de ripailles / Adieu belles négresses Maasaï / Au diable les largesses / De l’ordre des canailles / Tout ça n’est que billevesées et balivernes / Billevées et balivernes ». Moins sans doute la chanson-titre qui, elle, nous donne des nouvelles du front : de militaires, poch’trons, princesses, play-boy et canonniers. Les mercenaires font l’objet d’une autre chanson. Si l’eau (en haute-mer comme dans les bayous) est le bain commun de quasi tous les titres, c’est une fois encore le rhum que Soldat Louis nous sert en digestif : la reprise, hélas bien moins spontanée et enjouée que celle d’origine, de l’incommensurable tube du Lorientais. La bière et les femmes sont en d’autres titres, récurrents : « Toujours pas une frangine / Ou j’my prends comme un manche / Ce n’est pas faute de strings / J’ai l’slibard qui démange… » Propos crus de marin qui se fait des gonzesses en poster : l’histoire, le propos n’ont pas changés. Et c’est ce qu’on aime en Soldat Louis, qui par cet album, apporte à ses prestations scéniques non de nouvelles nourritures mais des variations bienvenues.
Trois décennies, disions-nous. Soldat Louis le chante par Trente ans déjà où il rend hommage à l’officiel parrain, le papa de Lola : « Au plaisir des dieux, ou fait du hasard / Entre nous deux, c’est trente ans d’histoire / Une fée s’est penchée, au d’ssus d’nos guitares / Nous a confié à mister Renard / C’est plus qu’un parrain, c’est presque un frangin / On s’fait la bise, il dit tatatsin ». Dans trente ans, sûr que Gauvain Sers fait une chanson presque pareille.
Soldat Louis, Quelques nouvelles du front, Coop Breizh 2018 (sorti le 8 décembre 2017 en Bretagne). Le site de Soldat Louis, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de ce groupe, c’est là.
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