Batlik, ici, ailleurs, maintenant
Batlik, 12 octobre 2017, Nomad Café à Marseille,
Si vous ne connaissiez pas Batlik, vous pourriez croire qu’il est venu avec tout un orchestre : six guitares, toutes différentes, mais toutes acoustiques, dont une quatre cordes accordée un peu plus bas, font la ronde sur scène, à gauche de la batterie. Il passe d’une guitare à l’autre, toutes accordées en open tuning, avec encore ce jeu slappé, ce rythme particulier, entêtant.
Raoul, c’est son chien, noir et blanc, il a déjà traversé la salle, comme chez lui. Dès que Batlik est monté sur scène, sans chichi, presque sans sourire, son chien l’a suivi, s’est couché sagement au fond.
Mais très vite, est-ce à cause du batteur, Benjamin Vairon qui jouerait trop fort à ses oreilles délicates, Raoul (le chien, pas le maître, qui s’appelle Stéphane, vous suivez ?) a tenu à apporter sa participation. Pas en hurlant comme tout chien chanteur, non, en aboyant aux moments qu’il juge les plus pathétiques. Ce n’est pas trop dérangeant, la voix de son maître, toute douce et agréablement voilée qu’elle soit, sa guitare, et la batterie se font suffisamment entendre, et tout le monde a trouvé ça plutôt sympa. Peut-être même que Raoul est le chargé de communication de Stéphane.
Batlik vous accueille à la maison de sa nomade balade, chez lui partout. Qu’il soit à Paris ou Ailleurs, l’ennui et le malheur sont les mêmes, et ça vous donne le ton du concert.
Il a abandonné son répertoire le plus engagé, son chant happé, pour une voix plus égale, enveloppante, et une thématique poétique universelle et sombre. La voix se balade, lancinante, parfois grimpe dans les hauteurs, les guitares dérivent en liberté, la caravane passe, et le chien aboie. D’ailleurs Raoul, il n’aime pas tellement quand ça devient trop rock, mais nous si. Ou peut-être adore-t-il, et cherche-t-il à participer. Par exemple Là ou rien ne va, où ça décoiffe gaiement sur un rythme entraînant en mélancolie active : « Quand femme amis et parents / Attirés par aspirés dans / Le large tourbillon / Auront perdu l’appétit d’avant et oublié ton nom / A cet instant à cet endroit là / Ce que je fais sera / Tout ce qui te restera . » Suivi immédiatement de cette dédicace à Elsa Triolet, satire du progrès érigé en Religion, « Pour des outils des objets / La technique et l’effet / le gain les intérêts (…) le royaume de l’encore et des roses à crédit ».
Presque tous les Lieux de ce temps perdu, y passeront, boucles d’inquiétudes sur « ce que nous sommes », sans évoquer d’actualité dramatique, mais seulement ces Paradis intérieurs « construits sur des cadavres ou des adieux. »
Intercalant quelques titres de 2012, de ce Poids du superflu dont il s’est alors débarrassé, pour ne garder du discours d’autrefois que la substantifique moelle : ces mots qui le débordent, ces espoirs de vie à deux « Avec une vraie personne / Une qu’on regarde dans les yeux » jusqu’à la vieillesse : « Du temps en ta compagnie / Pour m’accompagner jusqu’à minuit » (Hospitalité, 2012), cette quête impossible d’une vérité qui n’existe pas : « Rater avec talent / Rater un peu mais rater sûrement / Rater avec ambition ».
Le site de Batlik, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. Batlik est actuellement en tournée en France et sera le 18 novembre 2017 au Silo à Tigery (91), puis en décembre en Alsace, dans l’Ain et à Pantin Salle Jacques-Brel le 8 décembre.
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