Plus qu’un carton, Brel fait une cartonnerie !
13 octobre 2017, salle des tilleuls à Viricelles (42),
C’est une franchise familiale à peu de succursales. Le siège social doit se trouver aux Marquises ou à Bruxelles. En Picardie peut-être, que le neveu chante comme s’il s’agissait de l’extension du plat pays. Celui de l’oncle Jacques. C’est beau, c’est beau, même sans lui. Ils ont le même accent, le même timbre, la même fougue, portée par une voix impétueuse, un peu des mêmes rêves aussi. C’est l’héritage, la descendance. Voir l’un n’est pas seulement se consoler de ne pas avoir vu l’autre, c’est prolonger l’aventure, le désir, le plaisir. C’est repartir pour un tour…
Là, dès l’entame, Brel interprète Amsterdam, comme Grand Jacques le fit en ce mémorable Olympia de 64. Identification, authentification, mêmes chromosomes. S’il se l’est longtemps interdit, Brel désormais chante Brel. Depuis pas mal de temps déjà. Hélas au détriment de sa propre production, de ses propres chansons. Comme il nous prépare un nouvel album perso pour l’an prochain, ça pourrait changer la physionomie de ses futurs récitals. Là, même les récentes chansons de Bruno se teintent de Jacques, semblent en avoir une similaire écriture, les mêmes gènes, appellent une semblable gestuelle. C’est par des chansons plus anciennes, aux sujets hélas intemporels car toujours actuels, que le talent du neveu, son génie, nous laisse coi, scotchés sur nos chaises. La rivière Bambou comme Les émigrants : « Certains enfants du voyage / Refont toujours leurs bagages / Parce qu’ils ont dans le cœur / Le goût d’un lointain ailleurs / Parce qu’il faut des rivières / Pour que s’abreuve la mer / Parce qu’il faut des mains de fer / Pour arracher les frontières… »
Bruno fit ses premiers pas dans un cabaret bruxellois il y a pile cinquante ans ; son premier album en a pile quarante. Difficile d’être un Brel, forcément à l’ombre d’un oncle devenu totem, phare. Lui aussi enfant de Canetti, Bruno Brel n’a pas su convaincre les médias. A l’époque, il était dur d’être le Fils de, chanson que Bruno chante. Alors, être neveu… Maintenant, pour être chanteur à succès, il faut presque que son père l’ait été.
Pas un bruit dans la salle, pas un pet, un éternuement, pas même le vol d’une mouche : faut-il venir ici, à Viricelles, pour savoir ce qu’est une telle qualité d’écoute… C’est impressionnant ! On retient son souffle devant le portrait de famille de Ces gens-là. On se dit critique et on s’évertue à l’être, à pinailler, à cherche la petit bête, histoire de respecter son propre égo, sa réputation. Mais Brel ruine votre aspiration à nuancer. Putain, ce type vous emporte dans ses chansons, dans celles de tonton : il pose le décor et évolue dedans, comme le meilleur des acteurs. Avec pour lui l’aide d’un bien remarquable musicien : d’ailleurs, Martial Dancourt est bien plus que ça. Complice, ami, pianiste et accordéoniste doué à l’envi. Les deux font la paire. Ils sont formidables.
Au lieu d’attendre tous les dix ans l’anniversaire posthume de Brel, allez plus souvent célébrer le vivant, le neveu, dans le répertoire de l’oncle comme dans le sien. Vous comprendrez !
Le site de Bruno Brel, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
Le site de Michel Avallone, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
https://www.youtube.com/watch?v=07qrWNwZHGQ