Gérard Palaprat, 1950-2017
Pour sa fin du monde, il a dû prendre sa valise et aller sur la montagne, mettre dans sa valise une simple chemise : « pour la fin du monde pas de vêtement ». Gérard Palaprat vient de mourir, d’un cancer, à son domicile, près de Niort.
Palaprat ? Souvenez-vous… Pour la fin du monde, Svasti, Fais-moi un signe (chanson avec laquelle il remporta la Rose d’Or de Juan-les-Pins) : des tubes du début des années soixante-dix, néo-baba-folk sauce bizness, ce bizness qui fait feu de tout bois, récup’ de toute mode même de celles tournées contre lui. Gérard Palaprat fut le baba de l’écran cathodique, bien avant Fugain et son Big Bazar. J’étais gamin et ne loupais aucun passage à la télé de Gérard Palaprat. « Je ne te demande rien / Rien qu’un seul geste de la main / Alors fais-moi un Signe / montre-moi le chemin… » De la guimauve, dira-t-on, de la variétoche, n’empêche qu’il est de nombreuses chansons, de presque toutes, comme des cailloux du Petit Poucet, qui vous aident à retrouver le chemin. Celui du parcours déjà effectué. Et ces chansons-là ont le goût de mon enfance…
Ce n’est du reste pas autre chose que les spectateurs d’Age tendre et têtes de bois viennent chercher dans les tournées de ces vieilles idoles : un peu beaucoup d’eux-mêmes, au temps de leurs culottes courtes, au temps (rien qu’une heure, une heure seulement) où ils étaient beaux (et cons à la fois…). Palaprat s’est inscrit dans ces messes-là où il retrouvait, comme ses confrères, un important public dans des mégas salles, tant la nostalgie fonctionne bien. Histoire de renouer avec un éphémère succès.
Cheveux longs, barbe fournie, Gérard Palaprat cultivait son look de hippie, jusque dans ses chansons, lui qui avait participé à la comédie musicale Hair (comme Julien Clerc puis Gérard Lenorman), affichait son goût pour la méditation et ses souvenirs de l’Inde où il avait appris, dit-on, à jouer du sitar. Les connaisseurs (pas forcément les mêmes que les amateurs de variétés) retiendront qu’il fit aussi une reprise, en français, du Space Oddity de David Bowie ; ça s’appelait Un homme a disparu dans le ciel, et ça s’applique à lui aujourd’hui.
Un jour, on me téléphone : « Monsieur Kemper ? bonjour, c’est Gérard Palaprat ». Là, au bout du fil, un des chanteurs de mon enfance, qui me prête attention, qui vient chercher auprès de moi une oreille attentive, confidente… J’étais forcément ému. Il m’a raconté beaucoup de choses, notamment sur la tournée Age tendre. C’était aigri. Mais c’était lui. Je me rappelle encore la teneur de cette conversation.
Son dernier post sur sa page facebook… https://www.youtube.com/watch?v=7nCzCamcZCg&sns=fb
Je suis triste de cette nouvelle. Gérard était un ami de mon papa, ils étaient fous tous les deux… Gérard a vécu à la maison quelque temps, les anecdotes de leurs délires ne manquent pas. Ce n’était pas triste. Adolescent à l’époque, j’admirais leurs folies, l’humour, l’absurde, l’esprit libertaire des années 70 et leur amour de la chanson. C’est ce qui reste aujourd’hui. Gérard, Dary, Germinal Le Dantec, sont des êtres d’exception qui m’ont appris à aimer les artistes et leur sensibilité. Sans ces hommes là je ne serais peut être pas complètement le même aujourd’hui. J’embrasse bien fort Germinal Le Dantec qui a perdu son ami et pense à Mélodie Surmont-Palaprat.
Il était mon ami aussi, depuis 69 dans Hair et nous parlions de nos soucis de santé évidemment les siens. Bien plus graves.
Je perds un grand ami et je suis très triste.
Les artistes ne meurent pas, Vincent Capraro. Je viens de le découvrir à partir des posts de ses amis, de vos mots doux envers lui… Ce soir les chansons de Gérard Palpbrat, un inconnu pour moi jusqu’à aujourd’hui, m’accompagnent… Courage !!!
De ces artistes délicieux qui savaient composer des mélodies et…les chanter
C ETAIT MON AMI IL A VECU ALACANAU DES ANNEES JE L AI FAIT CHANTER AVEC JEAN GUINEA SON ANCIEN BATTEUR ET LUDO
C ETAIT MON AMI A LACANAU
VOUS L
AIMIONS BEAUCOUP
Texte de Germinal lu aux obsèques de Gérard Palaprat :
Mon cher Gérard,
Lorsque tu m’as appelé la dernière fois, il y a peu, c’était pour me faire part de tes colères, de ton désarroi, des trahisons et de ce que te faisait subir cette saloperie de maladie et le milieu médical.
Mais, tu m’avais tellement habitué à tes récriminations, à tes jérémiades que je ne pouvais pas soupçonner que tu nous lâcherais aussi vite. J’interprétais tout cela comme un signe de résistance salutaire face à la déferlante. Hélas !
Et dire que cette année 2017 marquait un anniversaire notoire dans notre relation puisque c’est à la « Contrescarpe » qu’on s’est liés comme « mancheurs », grâce à la complicité d’une dame remarquable, Karine Vergès, ex-femme et belle -sœur de réunionnais célèbres, qui nous recevait souvent dans son restaurant « le Requin chagrin ». C’était en 1967 !!! Cinquante années de fidélité avec des hauts et des bas dans nos parcours, des trous d’air ici ou là qui n’affectaient jamais nos carlingues faits d’un métal particulièrement résistant, inaltérable : l’AMITIE.
Alors, ce fut ton départ pour « HAIR » avec notre vieille fripouille de DARY et son chien Cornichon. Tu m’avais offert, en guise de talisman, la guitare dont tu te servais alors. Tu franchissais une barrière, une nouvelle perspective s’ouvrait à toi.
HAIR, dans lequel, spectacle à succès, tu endossais le rôle de Woof en interprétant un titre O combien sulfureux.
HAIR, que j’intégrais aussi à votre suite, 9 mois après la création, au moment même où toi, tu t’envolais vers la gloire, sans oublier de nous faire un signe.
S’ensuivirent des années de folie et de joyeuses équipées où jamais, la fête, l’humour, les délires ne manquaient à l’appel.
Un jour, tu m’entraînes à Reims en me cachant le but de l’escapade et nous passons saluer dans l’après-midi un ami comédien, perturbant au passage le cours de Robert Hossein. Puis, le soir, tu nous diriges vers une salle de spectacle, sans m’avertir que tu figures au programme. Me voilà en train d’assister depuis la coulisse aux prestations de Sheila, Antoine et notre Gérard pour 2 titres, présentés par Danièle Gilbert.
Voilà ! c’était cela aussi Gérard : l’imprévisible, les fulgurances, les décisions intempestives, pleine de malice.
C’était, on ne pouvait l’éviter (sans jeu de mots), nos voyages intérieurs, nos quêtes d’absolu et de spiritualité. L’ésotérisme qui pouvaient nous entraîner vers des moments de magie et de ferveur pour des textes sacrés d’un autre temps d’une autre source. Autant d’expérimentations initiatrices pour aiguiser et satisfaire notre curiosité de l’ailleurs, notre goût de l’aventure.
Bien des lieux jalonnent notre itinéraire fraternel, souvent liés à la fantaisie du moment, à la liberté d’aller où bon nous semble selon les rencontres de hasard ou les opportunités et aussi dans le sillage d’un fameux amuseur public qu’était notre DARY.
Citons en vrac, sans ordre chronologique, la Méthode, le Zinzin, le Cornichon, la buvette du V ème, le Garage à Carqueiranne et surtout, par la suite, lorsque je quittais le navire du « Bizness », tes visites dans mon repaire du sud-ouest où tu venais te mettre au vert quand la pression du milieu ou l’insuccès et l’amertume te gagnaient.
Souvenirs d’un mois complice à Cogolin et St Trop, dans la belle demeure de la « grande Dany », toujours lumineuse et bienveillante qui oeuvrait tranquillement à la composition d’une « Mélodie du bonheur ». Nous y vivions là comme une tribu harmonieuse. Puis, l’apparte de la rue Massillon à Hyères où nous avons effectué les travaux d’aménagement et de déco, avec Dary, afin d’accueillir dignement la princesse Mélodie.
Dany et votre fille, Mélo, deux êtres qui eurent ensuite à pâtir de tes excès, de ton machisme insensé, comme d’autres.
Malgré ces dérives, ce qui me reste des joies ou des déconvenues, des déceptions n’ont jamais pu entamer le ciment qui nous tenait soudés depuis un demi-siècle. Parce que tu présentais aussi, hélas, tel Janus au double visage, une dichotomie dans tes comportements…Ange le matin, tu pouvais être démon le soir. Ton caractère, tes emportements irascibles, ne t’auront pas valu que des amis et si j’en ai été parfois témoin, j’ai toujours pardonné tes caprices de star, en imaginant que c’est le succès mal maîtrisé, la notoriété qui t’étaient tombés dessus à vingt ans, qui avaient façonné en toi un personnage qui ne correspondait pas à ta vérité profonde.
La maladie n’aura fait qu’accentuer ces outrances qui pouvaient t’amener à menacer caricaturalement ceux qui osaient se mettre en travers de ton chemin.
-« J’ai des amis à Paris, de vrais tueurs à gage…Il suffit que je lève le petit doigt et tu verras… »
Combien de fois, t’ai-je entendu proférer ces menaces avec des accents de Matamore qui contrastaient singulièrement avec ton physique et ta vraie nature. Personnellement, ces rodomontades me faisaient sourire.
Ainsi, après tous ces mois de souffrances physiques et psychologiques qui t’ont laminé, ces coups de fils intempestifs pour me faire part de tes aigreurs, de tes délires paranoïaques, que j’acceptais d’accueillir avec empathie, tu as décidé de rompre le contrat d’avec ce monde-ci.
Je sais bien qu’avec ton œil bleu et l’autre brun, Dieu te pardonne et te protège et que si tu as pleuré souvent, le temps est venu d’entreprendre les grands voyages colorés que tu as si bien chanté.
A bientôt mon ami, mon frère et sache que le privilège des créateurs et des artistes, c’est que leurs œuvres leur survivent afin qu’ils ne tombent jamais dans l’oubli. Ta belle voix résonnera longtemps, tu peux compter sur ceux qui t’ont compris et aimé pour y veiller.
« Longtemps après que les poètes ont disparu, leurs chansons courent encore dans les rues » (Trenet).
A bientôt Gégé !
Germinal
Merci Vincent d’avoir publié ce merveilleux hommage de Germinal écrit pour le départ de Gérard. Sa lumière nous manque beaucoup. SVASTI