Spa 2017. Patricia Kaas, la douche finale
23 juillet 2017, Francofolies de Spa,
Les cinq musiciens vêtus de noir qui l’entourent prennent place sur la scène et se lancent dans l’introduction du premier morceau. Dans une superbe tenue aérienne et fleurie, elle apparaît sous les applaudissements. Elancée comme aux premiers jours, comme si le temps n’avait pas prise sur elle. Les premiers mots de la chanson s’envolent dans l’air du soir : « La langue que je parle / N’est pas celle que je chante / Elle est moins musicale / Elle est bien plus violente… » La voix, cette voix forte et profonde aux intonations uniques, qui nous l’a tant fait aimer, est intacte et nous donne les mêmes frissons qu’à ses débuts. Patricia Kaas est de retour.
Les Francos de Spa et Patricia Kaas, c’est une longue histoire d’amour. Elle était de la toute première édition, en 1994. Moi aussi j’étais là. Je n’avais pas trop apprécié le concert : trop mécanique, sans spontanéité ni émotion. Elle était ensuite revenue en 1998. Moi aussi (je suis du genre persistant et n’aime pas rester sur une mauvaise impression). Mais là ce fut pire : Patricia avait décidé de donner dans le « djeune » et avait donc réorchestré ses titres pour faire branché (enfin, le moderne de l’époque…), dansait comme Madonna, gesticulait sans fin… Bref, elle faisait le total contraire de ce qu’on aime chez elle. J’étais parti avant la fin.
Nous voici à présent en 2017, pour son troisième passage à Spa, en quasi-clôture du festival. Après la première partie et la revanche où la déception avait raflé la mise, qu’allait m’apporter la belle ?
Est-ce moi qui ai changé ou Patricia ? Suis-je plus indulgent avec l’âge ou celui-ci a-t-il eu un effet libérateur sur notre artiste ? Toujours est-il que celle-ci m’est apparue transfigurée par rapport au souvenir que j’en avais : rieuse, un peu jouette, communicative avec le public, restant bien sûr dans le canevas prévu (nous ne sommes pas chez Cali !) mais avec un naturel non feint ou bien imité… En deux mots, trois sourires, elle aura ainsi mis tout le monde dans sa poche en un tour de main. Même la pluie, présente au début du concert, s’est retirée sur la pointe des pieds, de crainte de s’évaporer au contact de ce public chaleureux à l’extrême.
Soutenue par un beau décor lumineux où le bleu et le mauve prédominent, couleurs qui collent si bien à son univers, Patricia Kaas nous a interprété quelques titres de son dernier album éponyme : Le jour et l’heure (beau titre grave sur le deuil), Adèle (ou les conseils d’une femme à sa cadette), Cogne (sur la violence conjugale), Sans tes mains… Mais elle a surtout et bien entendu passé en revue son catalogue de succès, réorchestrés pour l’occasion, souvent avec bonheur – Rose Kennedy, aux couleurs blues virant au rock strident -, parfois de manière moins convaincante (étrange option que de faire de son Mademoiselle chante le blues une sorte d’hymne disco !).
Si elle esquisse encore de temps à autre quelques pas de danse, Patricia reste dans une sobriété qui lui sied et rend sa voix encore plus émouvante. Dans cette simplicité, Entrer dans la lumière ou D’Allemagne prennent tout leur éclat et Une dernière semaine à New York nous emmène au loin. Quant à ses classiques de femme enchaînée par l’amour, pour le pire et le meilleur, que sont Je voudrais la connaître, Mon mec à moi ou Il me dit que je suis belle, ils soulignent combien Patricia Kaas est bien de la lignée des grandes chanteuses populaires comme Edith Piaf (cousinage tellement évident qu’elle aura fini par l’enregistrer !).
Un coup d’œil sur son site nous apprend que sa tournée passera pour 20 dates en Russie-Ukraine-Géorgie-Moldavie. Peu de chanteurs français peuvent se vanter d’un tel exploit. Nul doute que c’est le chant et la voix de Patricia, plus que ses textes ou ses musiques, qui lui auront permis de toucher le cœur de ces pays lointains. Peut-être devrions-nous prendre exemple sur eux et cesser d’ergoter sur le reste ?
Le site de Patricia Kaas, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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