Gilles Servat, 70 ans après, toujours à l’Ouest
Une autre compilation encore ? Oui, mais pas tout à fait. Gilles Servat fête, avec une nouvelle et belle équipe (de toutes les générations - voir photo ci-contre - et de tous les départements bretons), ses 70 ans… à l’Ouest « dans tous les sens du terme ». En fait 72 pour ce natif de Tarbes, d’un père d’origine nantaise et d’une mère du Croisic, bourg portuaire bretonnant de la presqu’île guérandaise. Par une sélection de ses chansons, Servat nous refait par touches son itinéraire dans l’Ouest (Le Cholet d’mon enfance, Le Croizic, Guérande, La route de Kemper, [sur] la montagne de Brasparzh… il ne manque vraiment que l’île de Groix, qu’il a jadis si superbement chanté) ainsi que, non l’inventaire mais un bel éventail de ses formes chantées d’expression : humour comme humeurs. Et toujours poésie. Comme un bref résumé qui, au moins par l’orchestration et les arrangements, ne fait pas redite.
Avec deux chansons passées presque inaperçues et désormais introuvables en disque : La douleur d’aimer, chanson-titre d’un album autoproduit de 1985, et Gros plant et muscadet, tiré d’un de ses rares 45 tours, en 1982. Soit deux titres de cette traversée du désert que nombre d’artistes « engagés » ont vécu dans les années quatre-vingt, après l’avènement du président Mitterrand.
Introuvable aussi ce Arbres (l’original est sur l’album Chantez la vie, l’amour et la mort d’il y a pile quarante ans), manifeste écologiste qui n’a rien perdu de sa verdeur même s’il est désormais chanté d’une manière beaucoup plus apaisée.
Et L’hirondelle, « blanche au ventre et noire aux ailes », comme une estampille, un ex-libris.
Pas de redite, d’autant plus que notre barde breton s’est autorisé à retoucher certains de ses textes. Parfois d’un rien, d’une conjugaison. Parfois bien plus, comme pour Le moulin de Guérande dont Servat ajoute un couplet (sur sa mère) et change le déroulé musical. Ceux qui connaissent par cœur ou presque l’œuvre de Gilles Servat identifieront sans mal petites et grandes corrections.
N’en déplaise aux esprits chagrins qui n’aiment la chanson que dans son indigence, sa totale vacuité, Gilles Servat est un de nos grands chanteurs, non seulement de Bretagne la chose est entendue, mais aussi du peuple celte en son ensemble et de la culture française en particulier. Ce qui ne l’empêche pas, à nouveau, de se faire l’ardent défenseur des Langues minoritaires « pareilles au sang et à l’or des fleurs des champs […] comme des îles sur l’océan semées » telles le gallo et le gaélique.
Le disque se clôt par le superbe Je vous emporte dans mon cœur (publié en 1982, sur l’album Je ne hurlerai pas avec les loups) : plus le temps passe et plus ce titre apparaît comme un codicille d’amitié et de fidélité.
Ce CD est comme une vague plus forte qu’une autre, charriant des profondeurs quelques joyaux. Un disque fameux.
Gilles Servat, 70 ans… à l’Ouest !!! Coop Breizh 2017. Le site de Gilles Servat, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. On retrouve Gilles Servat et 119 autres artistes en scène dans le livre « Mes nuits de concert sont plus belles que vos soirée télé » de Michel Kemper.
ah bon, on ne peut pas aimer Gilles Servat dont le premier disque pour les parisiens ne se trouvait qu’au sous sol de la librairie la joie de lire de François Maspéro sans penser qu’il existe un peuple celte?
Cher Michel, certains de ces titres avaient ete reentegistres deja il y a quelques decades dans un album intitule « Les chansons de la jeunesse », paru vers 1992 je crois. J’ai aussi souvenance d’une version de « Arbres » enregistree dite et non declamee avec violon, comme sur le disque : »Chantez la vie , l’amour la mort » de 1977. Mais c’est toujours interessant de voir comment un createur revisite ses creations…