La Cello Woman fait deux en une
Sauf erreur ou omission, son premier album remonte à 2009. Nous étions impatients du deuxième et sommes récompensés. Doublement. Nous attendions un CD, en voici deux : 2 en une. Quand l’un s’achève, on sort le second de sa gangue, le pose sur la platine pour poursuivre la déambulation, prolonger le plaisir… Elle, c’est Katrin’ Waldteufel, « chanteuse-violoncelliste comme certains sont plombiers-chauffagistes ». Est-ce parce que son blase est difficile, dur à orthographier qu’on la nomme plus simplement la Cello Woman ?
La femme-violoncelle est notre Cello Woman. Et son instrument-amant, qui s’insinue entre ses jambes, le Monsieur Cello (pas jaloux, d’autres instruments [guitare, clavier, trombone et percussions] et de rares musiciens participent à ce disque sous la direction du chanteur Bastien Lucas qui, parfois, donne aussi du choeur). C’est ça, Cello Woman : une femme-instrument, les deux taillés l’un dans l’autre, l’un pour l’autre. Dans un rapport presque organique.
« Je m’sens pas la plus forte / Je m’sens pas la meilleure / Les jours où j’me supporte / J’m'offrirais bien des fleurs… » Ce double album est en soi, sinon une merveille d’écriture(s), au moins une addition de bien jolies chansons. Dix d’entre elles sont co-écrites avec Gilles Roucaute, cinq écrites par ou co-écrites avec Stéphane Traumat, deux voient aussi la plume associée qui de Bastien Lucas, qui de Gaël Mussati. Belle et fine équipe, que celle-ci. Tant de jeunes artistes (de moins jeunes aussi) s’estiment être bons tant à l’écriture, la composition qu’à l’interprétation et ne le sont pas (loin s’en faut souvent) sur les trois tableaux qu’il est réjouissant de constater que notre artiste a cette sagesse d’en partie déléguer sa plume à autrui, d’ainsi réhabiliter le noble métier de parolier. Merci.
« Voulez-vous de mon amour pour vous ? Voulez-vous ? » Chaque fois que Katrin’ Waldteufel trempe sa plume, l’associe à celle d’un autre, c’est pour dire « je », c’est pour dire « tu ». Pour scruter sa ligne de flottaison, mettre la main sur sa fichue partition, se remémorer un mariage pour elle calamiteux, sourire au bonheur, proposer son amour, ne pas savoir dire non, ses rejouer le coup des Passantes de Brassens et de Pol (pendant quelques instants secrets…) en inversant les rôles, se remémorer son père… Du très impliqué, parfois très personnel, intime. Quand elle est étrangère aux rimes, ce sont tableaux de vie, presque immobiles, comme ce magasin de souvenirs ou cette fenêtre fermée. Ou presque mobiles comme ces boutons d’acnée (« Comment dire sans les presser / Que les boutons, t’as eu ta dose ») témoins de l’âge d’ingratitude.
Seize textes qui nous la rendent confidente, préoccupations partagées d’un quotidien qu’elle enchante de sa fraîcheur, de sa voix joliment perchée, parfois sur le fil de ses cordes, de sa complicité avec Monsieur Cello. Du bon, du très bon boulot !
Il faudrait pas mal de moyens aux Frères de la Côte (le producteur) pour, armés de je ne sais quel bâton de pèlerin, convaincre les journalistes, programmateurs, membres de jury, d’adopter la Cello Woman, pour la reconnaître, pour la faire atteindre le public qu’elle mérite. C’est pourtant ce qu’il faut faire.
Le site de Cello Woman, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs à déjà dit d’elle, c’est là.
quel texte Michel ! Apparemment, l’oeuvre de Katrin a profité à ton écriture, sublime, comme ce CD que tu chroniques