L’avis (titre définitif) sur François Morel
François Morel est un talentueux polyvalent. Surtout connu comme comédien, en second rôle attachant du cinéma français, il est aussi auteur-acteur de nombreux spectacles de théâtre et épatant chroniqueur sur France Inter, dont les billets toujours bien sentis font la joie des réseaux sociaux. Son activité dans la chanson est moins populaire, qu’il agisse comme parolier pour d’autres artistes (Juliette, Maurane, Francesca Solleville…) ou comme interprète de ses propres textes. Cette carrière-là s’étoffe pourtant peu à peu puisque vient de paraître son troisième album (son précédent Le soir, des lions… datait déjà de 2010), très joliment intitulé La vie (titre provisoire).
Ce CD est le fruit d’une étroite collaboration avec le fidèle Antoine Sahler, déjà complice de sa précédente aventure musicale, qui a écrit ou coécrit quelques textes, signé la plupart des musiques (Reinhardt Wagner, Frédéric Fresson et le regretté Hubert Mounier pour les autres) et réalisé l’album (12 ou 18 chansons, selon que vous choisirez la version normale ou la version de luxe). L’opus brasse les thèmes et les ambiances. Tourments existentiels (On ne sait jamais pourquoi ça commence / On ne sait pas plus pourquoi ça finit / La vie, la vie…) côtoient les regrets d’une relation à peine entrevue (Ce baiser vous souvenez-vous / Que vous m’aviez un jour donné / J’aimerais pouvoir entre nous / Ce soir vous le restituer). La magie du cinéma pose question (Baisers profonds de cinéma / Qui n’en finissent pas / Comment qu’ils font crénom de nom / Pour la respiration ?), à laquelle on ne peut répondre faute de place disponible dans nos cervelles encombrées (Tous ces trucs inutiles / Qu’on a dans le cerveau / Pourquoi ils restent là / Pourquoi ils s’en vont pas). Et ne comptez pas sur la clémence divine pour vous secourir, car définitivement, Petit Jésus tu m’as déçu.
Parsemé de trois duos (C’est encore long l’enfance avec Louis Chédid, Trucs inutiles avec Antoine Sahler et Amalia– bel hommage à la chanteuse de fado Amalia Rodrigues – avec Anouk Aïata), le disque nous balade entre tendresse et amertume (Le petit préféré), gravité et empathie (Celui qui), loufoquerie et excès (Striptease), pour s’achever sur une profession de foi : Pardon, y’a pas plus chic qu’une chanson populaire !
Fin connaisseur de la chanson, à laquelle il a maintes fois déclaré sa flamme dans sa chronique radiophonique, François Morel s’inscrit dans la droite ligne des grands auteurs de jadis, capables d’alterner les chansons d’amour et d’humour, les portraits caustiques et les tendres croquis. Rien de très moderne dans la démarche, mais qu’importe ! Après tout, pourquoi faudrait-il qu’il joue les faux jeunes à 57 ans ? A l’écoute des morceaux, les images de Jean Yanne, de Bernard Dimey, de Ricet Barrier ou de Pierre Louki viennent à l’esprit, comme celle du bien vivant Corbier. S’ils exerçaient toujours, parions que François Morel aurait livré des textes aux Frères Jacques… Il est de ces artistes dont les chansons prennent véritablement vie sur la scène, écrites pour s’y épanouir, soutenues par un jeu de comédien suppléant les lacunes du chant, dans la grande tradition du music-hall. Son nouveau spectacle, mis en scène par Juliette et dont la tournée débute en janvier 2017, devrait être l’occasion de le vérifier.
Le site de François Morel, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
François Morel rendait ici hommage à Hubert Mounier le compositeur de « C’est encore long l’enfance » qu’il aurait dû interpréter avec lui : https://www.franceinter.fr/emissions/le-billet-de-francois-morel/le-billet-de-francois-morel-06-mai-2016