Léo Ferré : 100 ans, ça s’entend pas assez !
A chacun son Ferré, ça dépend quand on l’a « rencontré », apprécié, même et surtout avec difficulté, parfois méfiance. Vous pouvez ne l’avoir découvert en scène que dans le symphonique de sa musique, avec ou sans orchestre, bien souvent uniquement piano et bande son. Vous êtes bien plus âgé et vous vous souvenez de lui au cabaret : L’inconnue de Londres, Le piano du pauvre… Puis Monsieur William, Comme à Ostende… Caussimon, comme le meilleur de Ferré. Vous étiez dans l’amour anarchie d’une après-révolution qui secoua les pavés du quartier latin et gardez en vous Le conditionnel des variétés et Les anarchistes…
Vous êtes de ceux qui avez découvert Ferré après Ferré. Par Bernard Lavilliers, par Annick Cisaruk. Par Josette Kalifa, Natasha Bezriche, Manu Lann Huel, Christophe Bell Oeil, Alain Aurenche, Marc Ogeret, Morice Benin, Têtes de bois, Yves Matrat, Joan-Pau Verdier, Mama Béa, Catherine Sauvage, Philippe Guillard, Ann Gaytan, Emmanuel Depoix, Marcel Kanche, Michel Orion, Serge Utge-Royo… Vous avez cru voir Ferré derrière Michel Hermon, vous l’avez presque touché, happé, avec Philippe Léotard.
Ferré nous est encore mystère. Et, matière vivante, c’est pas pour rien qu’il soit aussi interprété qu’il l’est actuellement. Autant Brassens est une figure de style et un copain, un sage, qu’il faut avoir à son répertoire, autant Brel sombre dangereusement dans l’oubli de possibles interprètes (si sa fille France ne faisait obstacle à tous les projets qui lui sont soumis…), autant Ferré offre à toutes, à tous, cent possibilités, mille combinaisons de se l’approprier, pour un titre, pour tout un récital. On n’a pas fini de redécouvrir le génial monégasque de la chanson, de se faire les dents de ses crocs, de tenter de pénétrer ses vers par tous les temps, fussent-ils chimériques.
Matière vivante, volcanique aussi. On le sait quand il fustige les bassesses quotidiennes, vomit la politique, déverse ses crachats. On le sait quand il offre à la chanson, « cet air qui vaut pas dix ronds », de nouvelles perspectives, des champs et des chants qui sans lui seraient encore vierges. Qu’il nous soit donné de chroniquer un de ses repreneurs et déjà nous nous inquiétons des gardiens du temple qui seront prompts à s’écrier, à gueuler. Pas facile d’anticiper tant il y a de Ferré, de façons de l’aimer ou de le détester, de l’envisager. C’est à ce titre une des figures objectivement la plus intéressante de la chanson française. L’homme Ferré est à la hauteur d’une grande œuvre, foisonnante, complexe, passionnante, aux ramifications telles qu’on en découvre toujours des nouvelles. Tant qu’elle est assurée de défier les difficiles temps à venir
Pas de prime-time ce soir sur les écrans français et monégasques. D’une vieille gloire du showbiz on l’eût fait : vous pensez, 100 ans ! Tino l’a eu. Mais oser prendre une soirée pour exposer la tignasse du vieux lion serait un peu trop… Ça fait cent ans, pile, que Léo poussait le premier de ses cris, à Monaco. Mort un 14 juillet 1993 dans sa maison de Toscane, c’est à Monaco qu’il sera discrètement inhumé dans la caveau de famille. Et c’est à la télé que le silence public parachève la discrétion. Avec pour dérisoire et accidentelle queue de poisson le spot des sardines Le Connétable : ce sera déjà ça, ce sera alors extra.
Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Léo Ferré et de ses repreneurs, c’est ici. A noter les dernières sorties des éditions EPM : Léo Ferré : « Les années chansons / L’ascension », coffret 5 disques, 100 titres ; « Léo Ferré et les poètes » collection Chansons et poètes, coffret 3 disques, 55 titres.
Permettons-nous de rajouter parmi les repreneurs sus-cités la sensible et sauvage Christiane Courvoisier…
Je suis de ceux et celles qui l’on vu et entendu à temps, c’est à dire peu de temps avant sa disparition…
A quelques km de chez moi, je ne l’ai pas regretté.
Je l’écoute toujours bien sur avec ses enregistrements.
Mais aussi , j’apprécie un grand nombre d’interprète que vous avez cité ci-dessus.
Merci Michel pour cet hommage, car en effet il ne faut rien espérer de nos médias…
A signaler aux amateurs, aux admirateurs,aux fans, aux fous de Léo Ferré : Les CAHIERS D’ETUDE LEO FERRE édités par le Petit Véhicule : http://www.lepetitvehicule.com/2013/03/cahiers-detudes-leo-ferre.html
Léo
T’es ou Léo ?
T’ai caché ou
T’es ou, les hauts c’est comme
Les bas
Ça monte ou ça descend mais là
Ça descend un peu trop…
Trop bas
Toi tu nous entraînais là-haut
Là-haut vers un rêve plus beau
Un rêve Léo, un rêve Léo,
Léo…
T’es ou Léo ?
T’es mourus ou
Tu sais la terre, c’est comme
La mer
Ça bouge et nous autres dessus
Nous autres on est un peu
Perdus
Toi tu naviguais sur les mots
Et ça nous faisait des bateaux
En mer Léo, en mer Léo,
Léo…
T’es ou Léo ?
T’es parti ou
T’es ou car les haubans,
Léo
Ça bouge ou ça casse oui mais là
Les mats bougent un peu trop
Ça craint là-haut
Toi tu nous serrais sur tes os
C’était de l’amour qui tient chaud
L’amour Léo, l’amour Léo,
Léo…
Reviens Léo !
Ici c’est tout
C’ que j’aime pas trop, la guerre
Partout
Ça fait du bruit, ça en fait trop
Et là le ciel il est
Moins beau
Toi tu criais sur les salauds
Aux loups tu caressais la peau
Les loups Léo, les loups Léo
Léo..
02/15 – 10/15
Joli Lionel !
à signaler aussi, les Copains d’la Neuille…
http://lescopainsdlaneuille.hautetfort.com/
« sentant » mauvais , cette sardine la satisfait surement une conne a table. je n’en conserve que la mémoire de la merde !
Bonjour,
Merci pour cet article perspicace.
L’absence de reconnaissance officielle de Léo Ferré était à prévoir dans un pays médiatiquement déconnecté de son passé et entretenu dans la confusion et le mépris de soi subliminal par ses « élites ».
Vous choisissez de conclure avec une anecdote oubliable, peut-être auriez-vous pu mentionner le fait que le site officiel de l’artiste a été refait à neuf et propose un contenu généreux, sans aucun équivalent chez les autres « grands noms » de la chanson française ? La prochaine fois peut-être…?
Bon courage dans votre combat pour la bonne chanson et contre la colonisation culturelle. Nous allons en avoir besoin !