Avignon Off 2016. Vincent Tronc, accordez nous le paradis !
« Chants de bataille », La maison de la parole, 29 juillet.
Il a pourtant toute une carrière derrière lui Vincent, bien des rencontres et quelques voyages depuis sa naissance à la Roque-sur-Cèze dans le Gard. Mais si je n’avais pas bien regardé le programme du festival ni écouté ses chansons sur un célèbre site de partage de vidéos, j’aurais pu passer à côté. Il y a des fois où l’intuition vous mène au bon endroit au bon moment. Un seul regret, l’avoir vu le dernier jour de sa programmation.
Le visage ciselé par la vie, cheveux attachés dans le cou, fine barbe et moustache, chemise pourpre, souriant ou inspiré, c’est en petit comité qu’il nous arrive avec ce très bel accordéon à son cou, « Je m’envoie des messages à moi-même / Pour me dire que je m’aime (…) Mais dites-moi qui après le chaos / Portera le chapeau ? »
D’emblée on est étonnés, séduits : la belle voix grave et claire au très léger accent du midi, ponctuée parfois d’un sifflement mélodieux, la poésie où les mots de tous les jours se marient en rencontres étonnantes, son attention au monde, à « Tous ces gens / De toutes les couleurs qui traversent le temps / Les yeux pleins de soleil, de rêves et de tourments ».
Ses doigts volent sur les touches noires et blanches, sur les boutons nacrés, qu’il caresse ou percute doucement, lui arrache parfois des dissonances. Avec lui l’instrument s’anime et prend vie, réagit comme s’il était un être vivant autonome qui pulse, respire, s’étire, frissonne, amoureusement s’enroule autour de lui. Son souffle est vent, vagues qui nous portent vers des pays lointains, de l’Europe centrale à l’Orient ou les grands espaces américains, de la valse à la java, du tsigane au gitan mais toujours en joie et en rythme.
Si ce qui est chanté est Chants de bataille, ses seules armes sont ses mots, sa voix et son accordéon, et sa résistance au chaos du monde est toute pacifique : il s’en prend à ce système, ce « Business chaud » tout dédié à l’argent, à ce diable Derrière la scène « qui brise le cœur des poètes » et qu’il faudrait tremper dans l’huile, puis le pendre comme dans la chanson !
Ou au son du kalimba évoque le paradis perdu des colonisés par tous ces « Soldats, curés ou missionnaires / venus forcer civiliser » parce que « Là y’en a de l’or, là ».
Les mots de l’âme, il nous les conte avec cette fraîcheur un peu naïve, des métaphores bibliques, l’arche de Noé, le paradis. Le sujet revient en leimotiv dans ses chansons. Mais lui en a pris son parti « Ah ! ah ! tant pis pour moi / ah ! ah ! j’vais rater ça » car le paradis, il est sur terre pour ceux qui savent aimer.
Le bonheur, il nous enjoint de nous le faire nous-mêmes « Ami, brisons nos verres et dans la nuit étoilée / Sans couleur, sans colère, soyons des rois lactés». En remettant les choses à leur place : «Ça ne fait rien, ce n’est pas grave » Et en gardant au cœur la liberté : « Chantez tout le temps(…) Cliquez l’icône du temps / Et pénétrez dans le programme . Mais, mais… / Mais ne vendez pas votre âme ».
Parce que ce Voyageur qui cherche le bonheur de pays en pays, il l’a enfin trouvé, et nous aussi « Et sous nos fenêtres on entend sa voix / Il s’est arrêté là ».
Le site de Vincent Tronc, c’est ici.
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