From & Ziel, pour le meilleur et le meilleur
Ces deux-là collectionnent plus facilement les prix que les disques. Leur précédent, un LP, remonte à il y a pile quatre ans. Samuel Veyrat et Ian Zielinsky, nos From & Ziel, rompent le silence par ce six titres. L’urgence de dire qui ne saurait attendre un prochain et régulier opus ? On serait tenté de le croire en écoutant Enfermé dehors, titre saisissant qui nous parle de Lampedusa, désastre continu où « les sanglots se ramassent / sur les rochers de la mer Méditerranée ».
Ziel au piano, From à la diction, l’addiction du verbe. Nous sommes presque à la marge de la chanson, en lisière, en liseré du genre, dans un incubateur d’énergie où s’entrechoquent les notes et les vers plus fréquemment encore, où la fission le dispute à la friction. Métaphore des mots, métamorphose. S’inventent d’autres émotions encore. Ce qu’on ressent à les voir en scène est ici pareillement restitué : le débit du verbe, la fluidité des doigts sur le clavier, tout concourt à leur dramaturgie, à capter nos oreilles et toute notre attention. On n’écoute pas From & Ziel : on entre dans leur art ou pas mais il serait dommage de rester à la porte du propos. Il faut se laisser happer par l’opulence, la gourmandise du dire. « L’amour tous les jours / Elle fait l’amour tous les jours » : les mots vont et viennent, hypnotisés par l’action, les soupirs avec. Ziel se fait orchestre, ses touches percussionnent presque. Ce demi-disque est amoureux, péché de chair, luxure de mots : « Tellement t’es belle, tellement que tout est bon / Je me rappelle l’amour sous ce plafond… » From est autant chanteur que conteur, formidable plasticien du verbe, capable de tout vous restituer, l’odeur de la garrigue comme les draps froissés, épuisés d’amour. Le fameux duo est cœur à deux soufflets, deux fonctions qui s’alimentent l’une l’autre, parfaite stéréo, osmose rare. On écoute l’un, on écoute l’autre comme on on balayerait du regard un court de tennis où chacun se renvoie la balle. L’un donne envie de l’autre, l’autre appelle l’un.
Au terme des six titres, difficile de ne pas remettre une pièce dans l’appareil, de ne pas refaire un tour avec eux, certains que nous sommes d’en apprendre encore, de vivre plus encore cette bousculade d’émotions.
From & Ziel, EP éponyme, autoproduit 2016. Le site de From & Ziel, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’eux, c’est là. Pour illustrer ce billet, un titre étranger à ce présent CD, on ne nous en voudra pas :
Bravo, c’est beau les mots, parfois!
Le lien pour écouter le premier titre en avant-première de l’EP , Méditerranée, une évocation à laquelle je suis particulièrement sensible: https://soundcloud.com/fromziel/fromzielmediterranee