Soit dit en passant, la vie comme elle va
Cet album de la maturité, selon le terme consacré, est un joli travail artisanal d’un groupe de passionnés amateurs de sons et de mots, dans le sens étymologique du mot : qui aiment. C’est le résultat d’un long chemin de vie autour de son auteur compositeur guitariste, Jean-Claude Roger, qui se consacre désormais à sa passion, la musique. Toujours entre deux projets, il allie le jazz à la chanson française. Lance des ponts en direction du Théâtre, ou de la musique classique avec le Massalia Orchestra de l’Opéra de Marseille où des solistes lyriques et de jazz interprètent des chansons.
Le jour et la nuit est un plaisant album de onze titres aux mélodies soignées, souvent très jazz, qui chante un monde en quête de sens, le quotidien et le rêve. De la comptine mélancolique (Une mélodie) à la chanson réaliste au rythme balancé qui s’avère satire politique, Madame est une Marianne qui se vend et se perd pour « les ors les lambris (…) Nous aimions les œillets / Vous nous offrez des lys. »
Les sons doux mais sans mièvrerie des guitares savent évoquer toute la palette des sentiments : les rendez-vous de Ce dimanche à Deauville, le Parfum chagrin très blues, la fin d’un amour « On s’imagine / Parce qu’on empile des jours des heures / Scellées de mille nuits d’amour / Avoir construit une demeure / Une citadelle pour toujours » ; Les petits bonheurs qui font le sel de la vie « Un regard sur le temps qui passe / en rêvassant sur une terrasse. »
Des prénoms personnifient les inquiétudes de l’auteur : Léon soucieux de l’avenir de sa fille au milieu de ce monde qui se délite « Ce jour là devant sa télé / Discrètement il a pleuré (…) Au paradis des illusions / Léon / Il défendra ses convictions / Plutôt que perdre la raison. » La voix ronde et veloutée de Géraldine Bueno, aussi à l’aise dans les aigus que dans les graves, sait en rendre toute la dimension dramatique, sur l’accordéon déchirant de Christina Beoletto. Isabelle, face à son mari violent, donne le change aux yeux du monde (« On pourrait croire qu’elle est heureuse »), délicatement, comme dans une scène de cinéma. La note de fantaisie et d’humour, non dénuée de dérision, est donnée par cette Psycho chiffon enlevée « Je fais les boutiques à nanas / Je viens suspendre mes idées noires / Mes coups de blues mes désespoirs / Aux cintres de leurs présentoirs » Que celle qui n’a pas acheté sa cinquantième paire d’escarpins lui jette la première pierre !
Jacques Bournot aux cuivres, Norbert Lallemand aux guitares et basse sont les deux autres musiciens de ce quatuor, tous de formation classique, jazz et variété, qui composent un orchestre très équilibré. Il met bien en valeur la voix expressive de la chanteuse, soliste soprano aussi à l’aise dans la world, la chanson ou le jazz (pianiste elle–même).
Soit dit en passant, Le jour et la nuit, autoproduit 2015. En concert le 29 avril 2016 à à l’Espace culturel Jean-Ferrat à Septèmes-les-Vallons puis le 20 juin au Cagnard au Tholonet, dans les Bouches-du-Rhône. Le site de Soit dit en passant, c’est ici.
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