Louise Michel(e) Bernard, femmes Commune(s)
En ces temps où se liquéfie la gauche pour faire place à la macron-économie, où Valls les valeurs, triste danse en lambeaux, cette réédition sous une pochette bien rouge (celle d’origine n’était pas très réussie) est bienvenue. Il y a deux septennats de ça, Michèle Bernard créait, au Théâtre de la Renaissance d’Oullins, dans le Rhône, cette Cantate pour Louise Michel, alors baptisée L’Oiseau noir du champ fauve (le titre disparaît avec ce repressage). Avec le concours des Percussions du Treffort, étonnant groupe associant handicapés mentaux et musiciens professionnels. Et de l’Ensemble vocal Résonnance contemporaine, six voix solistes féminines, qui, à la suite du chœur de femmes des Nuits noires de monde de 1992 annonçait presque le travail entre la chanteuse lyonnaise et le groupe vocal Évasion sur la reprise de ces Nuits.
Ça faisait foule sur scène mais plus que ce beau monde, c’est l’image tutélaire de Louise Michel, figure phare de la Commune de Paris, en 1871, qui, par les vers de Michèle Bernard, s’imposait. C’est toute la vie de la « vierge rouge » qui ici défile. De Vroncourt (Haute-Marne) où elle est née et où Michèle Bernard va chercher ses traces derrières les volets envolés de sa maison d’enfance, jusqu’au cimetière de Levallois où, « Drôle de belle au bois / Tu dors depuis cent ans, c’est fou / Comme le temps creuse son trou », nous suivons le destin de cette femme indocile que nul, ni le Thiers ni le quart ni personne, ne saura mater. Elle qui dit n’avoir « jamais franchi nos paisibles villages » va se retrouver propulsée dans l’Histoire, au mitan de l’horreur, de cette Semaine sanglante de mai 1871 où les troupes versaillaises massacrent le peuple de Paris, tant que le souvenir nous est parvenu et toujours se chante. Dans ce récit de vie où vient l’exil Sous les Niaoulis et les prisons, Michèle Bernard appelle à elle Victor Hugo, Arthur Rimbaud, Jules Jouy (Fille d’ouvriers, où les percussions simulent le bruit du bis-tan-claque, chanson déjà reprise par Michèle Bernard dans l’Anthologie de la Chanson/La Tradition de Marc Robine), Eugène Pottier et Pierre Dupont. Et Louise Michel elle-même. Belle et sensible évocation d’une vie de luttes dédiée à la défense des opprimés, aux idéaux de la Commune, à la reconnaissance de l’égalité entre les deux sexes. Tout un pan d’Histoire, d’une plaie à jamais ouverte, qu’à son tour Michèle Bernard transmet par cette femme d’exception, cette « Vierge rouge » comme ont pu la surnommer ses détracteurs et ennemis, dont l’idéal est et reste d’une grande actualité : « L’humanité haute et libre sur la terre libre. »
Douce et nerveuse à la fois, scandée de voix de femmes, rythmée par accordéon et percussions, cette Cantate est une pièce importante pour faire vivre l’indispensable mémoire de cette femme à nulle autre pareille. D’autant que l’enregistrement est excellent et que c’en est un plaisir à l’écoute. Il vous faut l’avoir dans votre discothèque. Couplets et refrains vous armeront chaque fois que, dans une ville, vous traverserez une rue, une avenue, un boulevard Thiers, du nom du bourreau de la Commune.
Michèle Bernard, Cantate pour Louise Michel, EPM/Universal 2015. Le site de Michèle Bernard c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là. La page wikipédia sur Louise Michel, c’est ici.
Deux femmes Commune(s) exceptionnelles . La vidéo n’est pas disponible , mais on peut écouter l’album sur Deezer . . . En attendant de pouvoir l’écouter partout .
Je m’en souviens, j’étais à Bourg-en-Bresse pour ce spectacle émouvant. Je ne savais pas qu’un disque était sorti, ou j’avais oublié. Plus que jamais, nous avons besoin de femmes comme Louise Michel et Michèle Bernard. J’espère que ce disque est facile à trouver. Entre deux rayons d’électroménager à la FNAC ?
pour Thérèse : On le trouve facilement chez EPM (achat classique ou en ligne) Superbe bonne écoute