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FestiFaï 2015. Ce rail de chanson qui nous relie

Nicolas Jules (photos FestiFaï)

Nicolas Jules, Matthias Billlard (Jules & Jo), Philippe Séranne et Olivier L’Hôte (photos FestiFaï)

« Drôle de festival » écrivait Michel Kemper à sa découverte du FestiFaïen 2012. Encore mieux que le juke-box ferroviaire de Laviedurail.fr, FestiFaïnous est revenu cette année avec ses idées hauts-perchées – fanfare, train et piano sur roue, sous le thème de « l’étoile », en hommage au nœud ferroviaire du même nom, emblème de l’ancienne cité cheminote : la tête dans les étoiles certes, mais les pieds bien à quais !

 20h45 dans les gradins, une vieille dame de bleue vêtue et voûtée sur sa canne, face à la scène, attend. « Ils ont bien nettoyé là-bas d’ssous, c’est net », sourit-elle. Le concert ne commence qu’à 21h30, mais elle attend. Patiemment. Sous ses pieds, non l’habituel « Théâtre de la montagne » du Faï mais l’ancienne Rotonde, cheville ouvrière du nœud ferroviaire de Veynes – l’Etoile – où elle travailla vingt ans de sa vie avant qu’on ne la dynamite.

P1090687« J’essaye de tracer à tire d’ailes un destin qui unit les gens. » Planants, les mots électrifiés de guitare s’échappent enfin d’une des fenêtres de la rouge et crème Micheline [le train artistique du festival] après une entrée en fanfare.  Oui, vous avez bien lu, une fanfare ! « Ils jouent à bousculer les roses… » et à en planter de nouvelles, les artistes en résidence. La voix de crooner jazzy et candide de Matthias, le rock mélancolique de Nicolas Jules et l’énergie vibrante d’Olivier l’Hôte, trois voix à l’unisson sur ces paroles de Brassens qui suspendent soudainement l’espace, repris comme une vague par une valse d’applaudissements précédant même les vents ternaires de la fanfare : c’est beau, simplement. La chanson française n’a jamais été si sexy et libérée de ses carcans que sur les rails de ce FestiFaï ferrée à la voie lactée : Charles Trenet, Dalida, Loic Lantoine, Brassens, Gilles Vigneault, ils brillent astiqués   bien entourés du répertoire tantôt décapant tantôt lyrique de chacun des artistes, donnant à la Petite Grosse Fanfare un côté rétro d’orchestre de chanson française d’antan  qui lui va comme un gant.

P1090675« La lune a rendez-vous avec le soleil »

« A l’étoile » distille ses étincelles au fil des chansons qui s’enchaînent, des pépites à glaner dans un ensemble où les enchaînements se font aux regards et aux déplacements, échangeant même parfois leurs instruments. « J’avais peur que ça soit compliqué entre la fanfare et les chanteurs. J’appréhendais autant musicalement qu’humainement » confie Philippe Séranne, directeur artistique de la résidence. Une crainte partagée par certains musiciens : « je me disais ‘ils sont difficiles parfois les chanteurs’, mais non, ce sont trois crèmes de la chanson avec de supers caractères » ajoute Karine, la saxophoniste de la fanfare.

Une complicité hors-du-commun qui ne va cependant pas de soi : « Il nous faudrait bien encore une semaine de plus, c’est encore très fragile » confiait Matthias Billard lors de la générale. Après quatre jours intensifs de résidence, les dix artistes ont pu profiter de six jours de tournée ferroviaire à bord de la Micheline donnant concerts aux horaires très précis de la SNCF  -16h01, 14h29, 17h42. Mais c’est surtout l’huile de bielle des arrangements de Voël Martin, la contrôleuse du jeu de scène Nathalie Tison et l’énorme boulot des techniciens métamorphosant le « trou » à trains en une scène digne du « live à Pompéi » qui ont permis de mettre sur les rails l’ensemble où l’équilibre d’univers ne pouvait s’aiguiller sous une seule et même direction.

P1090654« Un dépaysement !» lance un spectateur, remarque qui semble aussi valoir pour les artistes : « j’ai vraiment redécouvert des morceaux que je joue d’habitude complètement différemment » évoque Olivier l’Hôte, dont sa chanson De la Lune a d’ailleurs littéralement « emporté »  une des spectatrices.

Et, pour la première fois, on entend un vrai rappel dans le public, deux cent spectateurs environ, de Veynes et d’ailleurs, habitués de poésie comme habitués de quais. Et, pour la première fois, parmi les chanteurs, on évoque de continuer à tourner « A l’étoile »..

Poussière d’étoile autour de minuit… Chaise de jardin, Nouilles au beurre, des échos des « chansons à la con » de Matthias Billard sonnent encore derrière les silhouettes  des techniciens qui démontent déjà leur œuvre.

« Ils sont plein d’astuces dans leurs chansons » glisse la vieille dame avant de repartir dans la nuit, tranquillement.

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