Blanzat 2015. Jamait en gueule d’amour
Il y a sur cette scène, en ce répertoire, un peu beaucoup du cinéma romantique et réaliste d’avant guerre. Jamait en gueule d’amour à la Gabin, casquette de rigueur et mélodrames. Tout ou presque ici est fait d’amours blessés, meurtris, qui parfois, souvent, se sont fait la belle. De manque d’amour aussi, de désirs : « Caresse moi caresse moi / Ne laisse pas ce jour vieillir / Sans poser avant qu’il n’expire / Tes mains sur moi / Caresse moi… » D’infinis regrets.
Mélancolie poisseuse, tristesse belle. Comme à la fin du bal, quand on paye les musiciens, une fois les danseurs évaporés, rendus à leur destin. Cette danseuse aussi et surtout, partie on ne sait où, aux bras d’on ne sait qui. Bal, oui ça peut être ça, avec une guirlande électrique pour reliquat d’une possible fête. Un carrousel, à Dijon peut-être, un petit orchestre de balloche avec ses percussions et son accordéon. Les notes valsent encore, ça sent la bière et le trop plein ou le trop peu d’amour. C’est Jamait et sa voix éraillée, rauque n’musette, que sublime l’émotion. « Y’a des jours avec / Y’a des jours sans. » Sans elle.
Ça peut être la nuit, à déambuler seul en des itinéraires familiers, entre la gare et le Bar de l’Univers. Seul. « La lune est pleine / Je crois bien que moi aussi. » Tiens, en pleine canicule comme hier. De guerre lasse, il a tombé la veste. Il est trempe, de larmes, de sueur ou de bières. « On parle, on parle mais il se fait tard / C’est bientôt la fin du monde / Et j’ai plus rien à boire. »
L’amour, oui. La solitude. Mon gars, t’es seul. « Et je voudrais que tu sois là / Je voudrais que tu vois ça / J’avoue que je n’y crois pas / C’est beau, c’est bien, même sans toi. » Jamait, c’est ça, c’est l’amour, la sublimation de l’amour, quand l’amour s’est brisé, estompé, trompé. Il y a du Brel en Jamait, celui de Me ne quitte pas et celui, ballot, falot, des Bonbons.
Hier, ce fut canicule. Mais c’est de l’orage dont il nous entretient, dans une valse de parapluies, comédie musicale digne de Demy ou de sa moitié : « Peux-tu me dire pourquoi / Quand je pense à nous deux / Je me noie dans mes songes / Et dans ma tête il pleut ? / Puisque passe l’orage le soleil venu / Te souviens-tu encore des parapluies perdus ? »
L’art de Jamait, c’est ça, sans jamais nous plomber, simplement à magnifier le beau même s’ils parle de ruptures, d’indignations aussi (Je passais par hasard, sur la violence conjugale, est une chanson en tous points exemplaire). Et l’amour, même après l’amour, est encore l’amour. En guise de rappel après les rappels, Yves Jamait ressortira de sa mémoire un vieux titre de Maxime Le Forestier, La poupée : « J’ai mis de la vie / Dans le corps transi / D’une poupée de porcelaine… » Dans tout son récital, il en avait mis de la vie. De cette émotion qu’est la vie. Tant qu’on en est touché. Touché, coulé.
Parmi toutes ses formules scéniques, ses propositions de spectacles (Leprest, Guidoni, Tachan, Le bar à Jamait, etc), celui-ci recèle ses fondamentaux, peut être le plus beau de Jamait, le plus intime. Le plus touchant, le plus tachant cause aux tâches de vin et de bière, cause à l’amour qui saigne. Et paradoxalement le plus drôle, par ce jeu syndicalo-musical avec ses deux complices, Samuel Garcia et Didier Grebot. Ce récital-là est un grand classique : c’est le point Jamait, à partir duquel tout l’univers de notre chanteur s’organise. Un pur bijou, qui plus est serti d’un public excellent.
Le site d’Yves Jamait, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.
Que dire de plus ? J’ai été submergée d’émotion par ce concert d’Yves Jamait, c’était une belle première fois sur scène pour moi qui l’écoute depuis longtemps déjà .
LE 18 JUILLET restera un jour merveilleux ! j’écoute Yves Jamait depuis des années et ce jour là pour la 1ere fois je l’ai vu sur scène instants magiques , magnifiques du Grand Jamait , de l’émotion , de l’amour , de la tendresse , tout était là ! merci mr Jamait pour cette soirée