L’air du temps de Lignières 2015 : un grand cru ! [1/2]
Retour (en deux parties) sur le festival L’Air du temps de Lignières, dans le Berry, occasion pour nous d’accueillir Marie Roosen, qui au passage intègre l’équipe rédaction- nelle de Nos Enchanteurs.
Depuis vingt-quatre ans, les Bains-douches de Lignières nous concoctent, pour le week-end de l’Ascension, un festival raffiné, aux multiples fragrances. L’exceptionnelle programmation 2015 en témoigne. Le public ne s’y est pas trompé qui a rempli les salles (94% de taux de remplissage) et suivi les animations « buissonnières » qui rendent ce festival si spécifique, familial autant que festif, toujours avec ce souci de partage et de qualité. Ces animations furent menées de main de maitre par trois « fil rouge » de ce festival : les chanteuses de Fausse note, Sandra Reinflet et Peggy Rolland, ainsi que leur compagnon de route sur ces moments privilégiés, Ben Mazué. Ballade chantée longeant l’Arnon, bucolique et patrimoniale, où marche et chanson se sont conjuguées pour le plus grand plaisir de tous. Pauses musicales aussi sous la vieille halle, présentant en après midi des chanteurs aussi différents que talentueux. Tel Ignatus, musicien inventif, pince sans rire, nous entrainant dans des contrées musicales inexplorées faites de chansons décalées, où la fantaisie le dispute au sérieux. Mountain Men, bluesmen incroyables, duo de choix : Mr Mat, guitariste et chanteur époustouflant, et son acolyte Barrefoot Iano, harmoniciste inventif qui ne fut pas en reste. Ces comparses franco-australiens nous ont emportés dans une folie musicale, avec le plaisir de la danse pour récompense finale.
Fred Radix (qu’on ne présente plus à ici car il fait partie de « la famille » comme il aime à le dire) a offert un moment de magie et de poésie incroyables avec son personnage de Siffleur. Pas un mot, mais un langage poétique que ce virtuose maitrise à la perfection : récital de grande classe conviant Schubert, Mozart, Satie… et des musiques de films cultes. Grand moment d’art pur, sans nul artifice, fait de talent et d’audace créative.
Côté salles, Constance Amiot fit l’ouverture du festival en interprétant des mélodies lumineuses, digne héritière qu’elle est des folk-singer américains. Ballades de haut vol, chantées avec sa voix feutrée, tantôt en anglais, tantôt en français. Déjà programmé en saison, La Maison Tellier fut un réel bonheur. Des frangins, cousins, beaux- frères et j’en passe, qui ont bien fait de rester en famille et de « s’acoquiner » pour nous plaire. Une énergie débordante, des textes savoureux, des musiques qui bousculent les codes d’un folk-blues-rock à la française, un répertoire inspiré et varié qui révèle des bijoux. Si le son était bon, on ne peut pas dire de même des éclairages… Comment s’expliquer qu’une personne chargée de ce que l’on appelle « la lumière » laisse les artistes, et surtout le chanteur, le plus souvent dans l’ombre pour ne pas dire dans le noir ? Ou, sans nuances et de manière redondante, le place sous des douches qui le mettent en cage ! Sans parler des projecteurs agressifs dirigés vers le public ! Effet de mode me dira-t-on : là, je dis stop !
Le lendemain, La Tribu des femmes, toutes d’univers différents, aux voix fantastiques et à l’énergie contagieuse avec, pour compagnon d’aventure et chef de tribu, Denis Péan, de Lo’Jo. Un spectacle ethnique avec des musiciennes d’exceptions, en grâce comme en rythmes, en audace aussi, où complicité et émotions sont contagieuses. Des chants qui nous emportent dans différentes contrées du soleil à la manière gipsy.
Soirée au Manège, salle de cinq cent places affichant complet, où le public venu pour Camélia Jordana, fut ébloui par une « magicienne » venu d’Israël… Réel coup de cœur pour Lior Shoov : elle dont le prénom veut dire « lumière », nous a séduits, enchantés, étonnés, amusés, émus, emportés dans son univers lunaire et poétique. Tantôt chantant en hébreux, français ou anglais… Cette jeune femme, en apparence si fragile, se distingue par sa lumineuse présence tel un phare qui se dresse ! Un moment de pur bonheur, fait d’instruments étranges aux sons magiques, de clochettes, charango, harmonica, Hang, Ukelele… çà et le talent, évident, la simplicité et la joie.
Dès les premières notes, les premiers mots, les premières vibrations chaleureuses et intenses de sa voix qui coule douce et limpide, Lior nous transporte. A elle, pour nous, le rêve, le voyage, la nostalgie, le message de paix… Clown de formation, chanteuse de rue, Lior a bien plus d’un tour dans son sac et nul besoin d’autre chose que ses petits instruments et ses qualités conjugués. On applaudit son audace, sa créativité, son originalité, sa générosité… En ces temps où la technique prend souvent plus de place que le contenu, elle est quasi nue ! Et ça marche, c’est exaltant ! Le public est debout à scander les rappels.
Difficile ensuite d’aller vers Camélia Jordana après un tel moment. Celle-ci fit un concert intimiste et réservé, au goût des spectateurs lignérois habitués à une relation plus chaleureuse entre eux et l’artiste. Ce concert de belle facture fut néanmoins un succès et la voix chaude et veloutée emplie de mystère, chargée de sa culture méditerranéenne et de voyages, fit résonance dans le public. Même en dépit de cette pudeur pour le moins surprenante.
Rétrolien L’air du temps de Lignières 2015 : un grand cru ! [2/2] | NosEnchanteurs
Petite précision : les Tellier n’ont de parenté que musicale, leurs noms réels sont tous différents. Beau programme que ce festival de Lignieres.