Ottilie [B] : que d’O, que d’O !
Sur mon bureau depuis des lustres, ce post-it de Bruno, un ami photographe, qui me recommande l’écoute de Salomé Leclerc, Ottilie [B] et de Laura Cahen. Salomé Leclerc, c’est fait, qui plus est chez elle, au Québec. Il faudra que je m’intéresse à Laura Cahen. Là, j’écoute l’ep tout neuf d’Ottilie [B], la version live d’une partie de ses Histoires d’O Deux. Bruno a décidément bon goût.
D’aucuns ont vu en Ottilie [B] un ovni. Peut-être pas, ou alors beaucoup le sont, il y a foule dans le ciel et je ne parle pas que des prétendues stars, mais c’est vrai qu’Ottilie Bouchareu trace autrement son sillon dans la chanson, sans trop de repères mais pas sans influences, ce qui peut être déstabilisant, ce qui est autrement passionnant. Elle, est de la division chanson qui avance, explore, fonce, tombe des cloisons. Légère et mutine, incisive et brûlante. Difficile de lui coller une étiquette, de la code-barrer : ça doit gêner le bon déroulement du commerce, enrayer l’enthousiasme des marchands du temple. Si un titre peut vous faire songer à Camille, l’autre (Crayons, ben tiens) vous rappellera l’Amélie, pareillement enjoué, aérien, virevoltant. La dame ne négocie pas son verbe qui épouse au plus près ses émotions : la voix est le formidable haut-parleur.
C’est l’insolite choc d’une musique électro et d’un accordéon nerveux, saccadé (comme peut l’être celui de Yoanna). Portées onctueuses, presque cinématographiques, dans lesquelles infusent des musiques du monde, qui se parent de ses lointaines origines kabyle, mongole, italienne.
« On perçoit quelque chose de primaire, sauvage, du cri primal et primitif, quelque chose qui sort de la féminité et l’incarne au plus profond. Dans sa façon d’empoigner ses instruments de tordre les notes et les mots, elle travaille comme de la glaise la matière sonore et humaine. » lit-on sur sa bio. Notre ouïe reprend, par elle, la plénitude de ses fonctions, alerte et accueil, analyse. Surprenants que puissent être ses mots, brutaux parfois, ils font jeu égal avec les notes. Paroles et musiques se mêlent en un insolite creuset où tout semble possible, même le tribal, même l’incongru. C’est presque jeu de piste que de suivre Ottilie dans les méandres de ses chansons, sirène hypnotique, « quelque chose qui sort de la féminité et l’incarne au plus profond. »
S‘il ne saurait faire l’économie de l’écoute des deux précédentes Histoires d’O et surtout pas de la découvrir en scène, ce live de six titres (mais de 28 minutes) est une intéressante porte d’entrée dans ce monde foisonnant, passionnant, inédit, de cette chanteuse qui dit n’avoir « que la peau sur les mots » et « peine à se dévoiler. » A chaque nouvel opus, elle lève pourtant un peu plus le coin du voile.
Ce live est réalisé par le musicien et chanteur Nicolas Repac.
Ottilie [B], Histoires d’O Deux [live], In/Ex 2014. Le site d’Ottilie [B], c’est là.
Merci Bruno et merci Michel pour cette découverte. C’est vrai qu’en l’écoutant, on a bien envie d’aller creuser sous ses « elles » pour dévoiler ses mystères, c’est du brut, du sauvage et du tendre à la fois, « légère, mutine et incisive », ça lui va bien, et quelque chose me dit que Gainsbourg aurait adoré écrire pour elle.
Fascinante, à tous points de vue… Je l’ai découverte récemment sur France Inter, une vraie révélation…