14-18 : à ceux qui voulaient qu’on leur foute la paix !
« Mutins ! », 17 novembre 2014, Vingtième Théâtre à Paris,
De 14 à 18, on n’a pas fini de célébrer la der des ders, la guerre des tranchées, la boucherie de Craonne et du chemin des dames. Avec de fiers refrains guerriers qui exaltent le sacrifice de nos soldats (de ceux d’en face, aussi), avec des chansons plus modestes de troufions englues dans la boue, avec aussi – il convient de les chanter aussi – des refrains antimilitaristes, anti connerie, anti guerre. Qui, à l’époque, va-t-on savoir pourquoi, n’étaient pas forcément en odeur de sainteté.
Serge Utge-Royo, grand anar sinon devant l’éternel au moins face à l’éternité, vient de célébrer, à sa façon, le début des commémorations du centenaire. Par un spectacle non répertorié, non labellisé, qu’aucune cocarde tricolore n’atteste ni ne valide. Un spectacle libre de droit. Et c’est son droit. Un récital bien dans son registre, partagé avec des copains, un soir Eric Frasiak, Nathalie Solence et Bernard Joyet, le lendemain Jérémie Bossone, Michel Bühler et Francesca Solleville. Avec la rousse Annick Roux pour fil rouge. Pas des va-t-en guerre, non, ou plutôt si : d’une autre guerre, d’une autre et plus véridique vérité, celle des pacifistes d’alors et d’aujourd’hui.
Tout un répertoire sur cette thématique. Et ceux de nos invités qui, quoi qu’ils chantent, ne s’éloignent jamais trop de cette idée, qu’ils chantent le Monsieur Boulot qui s’est cassé dans des pays allégés de charges sociales ou . Encore plus qu’ils rechantent Verdun, chanson que son auteur Bernard Joyet n’avait pas interprétée depuis des lustres, je n’ose dire depuis la dernière guerre. Joyet ou Bülher, Bossone ou Solleville, Utgé-Royo ou Frasiak, eux-aussi sont des mutins. Pour peu ils en seraient mutants.
Paradoxalement, la chanson n’est pas avare, même et surtout en cette année 2014, à entonner de nouveau de tels vers pacifistes ou presque. La littérature aussi. Mais c’est à la marge, en de faibles tirages, vendus presque sous le manteau, en tous cas pas avec grande publicité. Les écrans cathodiques (j’allais écrire catholiques, mais c’est pareil, sabre et goupillon) font dans l’allégorie aux braves pioupious offrant leur torse poilu aux tirs ennemis. Ce n’est jamais à 20 h 30 qu’on rediffuse Les Sentiers de la gloire ni Johnny got his gun, jamais.
Intro, en fond sonore, par Joan Baez qui chante Boris Vian : « A tous les enfants qui sont partis le sac au dos / Par un brumeux matin d’avril / Je voudrais faire un monument… » Puis Utge-Royo enchaine par Brel et son Jaurès : « On n’peut pas dire qu’ils furent esclaves / De là à dire qu’ils ont vécu… » Suivent quelques titres fameux de notre Histoire de France, Giroglée girofla, Le vin de Marsala… « Si chaque goutte de sang versé par un enfant surgissait un coquelicot / La terre ne serait plus qu’une boule rouge. »
De tous ces invités d’Utgé-Royo, on l’élira pas un artiste ou au autre, ça ferait inSolence. Il y a chez eux la survivance d’un esprit rebelle, de cet idéal trahit de partout mais resté intact chez eux. « Regardez-les défiler / Dans quelques jours ils auront des fusils, des canons / Ils tueront, croix d’honneur, crois de bois » (Regardez-les défiler, Léo Ferré), « On sait le goût du sang on a vu brûler Rome » (La leçon, Joyet), « La terre est un foutoir qui ressemble à Verdun » (Verdun, Bernard Joyet)…
Si on célèbre les pauvres hères tués le fusil à la main, il est important de célébrer aussi ceux qui ont refusé de le porter, au nom d’un idéal de paix. Foutez-leur la paix, ils en rêvaient.
https://www.youtube.com/watch?v=pRjGW3djDa8
Salutaire entreprise que de chanter la paix et le refus de la guerre, salutaire aussi d’en faire un spectacle qui mériterait le 20h sur les écrans domestiques, salutaire de rendre compte de cette soirée ! Bon sang, assise devant mon écran j’aurais envie de trouver moi aussi l’occasion de défendre le droit à la Paix !
Bonjour,
J’ai récemment créé un site qui pourrait vous intéresser:
http://www.chants-de-lutte.com
Si c’est le cas, pouvez-vous dispatcher l’info?
Merci.
Jean.