Granby 2014. Garoche ta sacoche et cabosse ta chanson
Il faut se mettre à la juste dimension du propos : l’une n’est pas bien grande, l’autre est taille basket, bien au-dessus du panier. Les voir ensemble est déjà gag en soi : elles en jouent en une sorte de Laurel et Hardy, duo qui détonne. Le reste est à l’avenant. Dès la fin de la première chanson, elles préviennent et rassurent, au cas où : « Les chansons sont pas toutes comme ça. Faut pas avoir peur, faut pas se sauver. » C’est vrai que la première chanson était un rien énervée. Les autres seront… étranges. D’un rien, d’un prénom, deux phrases, trois notes, elles vous torchent une chanson, sans queue ni tête. Sans tronc non plus. Du non sens allié à une poésie qui tâte Tati. A elles deux elles sont le sommet de Devos, sens dessous dessus. De la chanson mutante où les chromosones ont foutu un bordel grave. En fait Garoche ta sacoche est assez indescriptible et rien que de tenter de vous l’expliquer confine au presque surréalisme, à l’exercice de style. Sonia Brochet et Cynthia Vielleux, nos deux demoiselles, feront tant le malheur que la honte de la chanson à texte, celle de parole qu’on accroche pieusement au piton ; Garoche ta sacoche s’accroche au clou et n’en vaut pas un. Sa valeur est simplement ailleurs, quasi subliminale. En un humour et des humeurs sans repères. Une douce folie aussi… Mine de rien, ça leur a valu d’être lauréates de Granby l’an passé, de passer devant tout le monde et décrocher la précieuse timbale. Les québécois ont de l’humour qui savent, eux, désacraliser la divine chanson, s’en moquer, sans doute pour mieux l’aimer.
Au fait, savez vous le pourquoi de « Garoche ta sacoche », leur raison sociale ? Au bal, les filles posent leur sac à leurs pieds, pour ainsi être libre de leurs mouvements, et dansent autour : c’est ça, « garocher sa sacoche ». Libres de leurs mouvements, ça leur ressemble à ces deux nanas. Libres d’une chanson par elles atomisée et reconstituée en d’autres assemblages. Hier au soir, devant un public fait pour moitié de fidèles, pour l’autre de potentiels clients européens, elles ont fait beaucoup dans les contraires : chanson minimaliste pour effet maximum. Ou pas. Ce que le public du vieux continent découvrira pour deux dates en début octobre puis plus longuement en mars prochain : « Granby, ça nous fait grand car on s’en va dans les Europes. » Chu motivée chanteront-elles avant d’entonner un rudimentaire I speak in english comme si le monde des affaires s’ouvrait à elles.
Garoche ta sacoche ce 12 septembre 2014 à Bromont (Québec), les 26 et 28 septembre à Montréal, le 5 octobre à Saint-Germain en Laye et le 7 octobre à Nantes. Le site de Garoche ta sacoche, c’est ici.
Hé bien moi, je vote d’emblée pour ces deux là ! Vive la dérision, vive cette jeunesse qui décoiffe nos idées grises !
Et maintenant je saurai ce que je dois faire quand je veux danser tranquille sur la piste, débarrassée de mon sac, c’est simple comme une expression québécoise : je garoche ma sacoche !