Avignon off 2104 : mon Viel d’Éon

Laurent Viel (photos Catherine Cour)

Laurent Viel dans un nouveau spectacle consacré à la vie mouvementée du chevalier d’Éon, c’est de l’intensité puissance mille, c’est une convergence extraordinaire entre l’acteur et le personnage historique dont la vie fantasque et fantastique pourrait en faire notre contemporain.

Que l’idée d’incarner le chevalier d’Éon et d’utiliser ce personnage et sa vie hors-normes comme vecteur d’une série de  réflexions très actuelles et universelles sur l’appât du gain, la soif de reconnaissance, la « peopelisation », la médiatisation, la manipulation, l’escroquerie, l’espionnage, la diplomatie, la politique, le goût du pouvoir, du secret, du mensonge comme arme de séduction, de l’ambigüité, de l’identité sexuelle… soit venue à Laurent Viel, c’est, je pourrais dire, « évident », tant Laurent s’est fait une spécialité de vouloir déranger nos certitudes (en dernier lieu celles qu’on pourrait avoir sur Jacques Brel ou sur Barbara…).

Mais qu’il ait réussi à bâtir un tel spectacle, à la fois historique et moderne, épuré et foisonnant, mariage d’un James Bond, d’un roman de cape et d’épée et d’un film d’Emmanuelle, follement sobre et magiquement bouleversant… le tout en deux tableaux et en une heure vingt de spectacle, c’est un pur miracle !

Il faut dire que Laurent Viel a su s’entourer d’une équipe de gagneurs : textes des vingt chansons inédites du spectacle par Alain Nitchaeff (L’Esprit Frappeur, à Lutry), musiques composées par Romain Didier, mise en scène de Xavier Lacouture… et sur scène, son complice virtuose Thierry Garcia à la guitare et Nicolas Carpentier au violoncelle…

Laurent réussit le tour de force de rentrer tellement bien dans ces habits taillés à sa mesure, de se mettre en osmose totale avec le personnage à qui il donne chair, à qui il prête son insolence et sa fragilité, sa tendresse et sa violence, qu’il arrive à nous faire vivre par procuration ses moments de folle gloire et le tragique de sa déchéance finale… On en oublierait presque qu’il nous raconte une vraie vie et pas celle d’un personnage inventé pour l’occasion ! Il y a une telle fusion, confusion, empathie entre l’acteur et le rôle qu’il ne doit pas sortir indemne d’un tel spectacle. En tant que spectateur, on le ressent si fort qu’on n’a qu’une envier : y retourner !

Tous les jours à 17 heures à l’Arrache-Cœur. Spectacle « Barbara » tous les jours à 14h05 au Petit Louvre., puis au festival Chansons de parole de Barjac.

Le site de Laurent Viel, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.