Mac Abbé et le Zombi Orchestra : un livre-disque pour indispensable missel
Ils se nomment Mac Abbé et le Zombi Orchestra. Si vous ne retenez que leurs initiales, ça fait MAZO. C’est peut-être sous cette réduction qu’ils prendront bientôt du galon. Ils nous viennent de la région stéphanoise, de cette commune de Saint-Julien-Molin-Molette d’où on connaît déjà des Fred Radix et Michèle Bernard. On pourrait ne voir en cette formation qu’une assemblée de joyeux fêtards, ce que du reste ils sont. Forts d’un statut type « démons et merveilles », mûs par une brillante salsa-jazz-rock, ils inspectent et auscultent notre quotidien (qui a chanté qu’« un jour le diable vient sur terre / pour surveiller ses intérêts » ?) : convenez que ce point de vue est intéressant.
Eux sont en quête de « mots dégueux et d’idées crades », de trucs aptes à réveiller les morts, ces « scotchés dans leur salon / La gueule ouverte et l’oeil figé / Bloqués devant la boîte à con / Les zombies lobotomisés. » Entre danse macabre tendance jazz-rock et étrange noël de Monsieur Jack, nos MAZO font dans une chanson (textes de leur chanteur Julien Regnault) bien travaillée, paradoxalement pétrie autant de diableries que de bonnes intentions, aux rimes habiles rivalisant d’inspiration quant aux cons, aux radins, aux vendeurs de drogue, de flingues et d’âmes, aux alcooliques, aux incrédules, aux salauds, aux plus beaux que moi tumeur. Passage en revue du monde et de ceux qui y cohabitent, grenouillent et magouillent, font comme si et comme ça.
On vous rassure : ce disque (photo ci-contre) ne passera pas entre les fourches caudines de Manoukian : « Si t’es pas trop vulgaire / Là, ok, tu passes sur France-Inter / Oui mais à force de bander mou / Toutes leurs chansons ne valent pas un clou / Brassens Ferré toute cette bande d’anars / Aujourd’hui ils seraient tricards. » C’est dit.
MA, c’est Mac Abbé (Julien Regnault, chant, contrebasse), le ZO est peuplé de Franki (Alexandre Vincent, batterie, ukulélé), Herbert von Botrylis (Quentin Delaplace, piano, orgue, synthé…) et Gomez (Clément Vincent, guitares) que viennent renforcer cuivres à profusion, accordéon et percus. Belle prestations de scènes et, pour l’heure, disque impeccable.
On sait que cette diabolique formation a dans le passé produit des concerts-spectacles ahurissants, mêlant tous les arts de la scène en de vraies performances. Là, ils nous estomaquent à nouveau par ce disque qui, rien que par son visuel, est hors-normes et sera rarement égalé. C’est un disque, certes. Mais, présenté comme il est, c’est d’abord un livre avec un cédé dedans. Un livre de 68 pages dont la place est aussi sûrement dans une bibliothèque que une discothèque (si vous hésitez, achetez-en deux), superbe ouvrage illustré avec talent, bourré d’idées et de jeux, truffé d’humour, d’images et de textes de chansons. De quoi définitivement abandonner la téléchargement pour enfin feuilleter un disque. Maintenant que l’idée du cédé ne veut plus dire grand’chose, le temps est venu de vrais beaux disques : c’est révolutionnaire, c’est diabolique ! Après le récent et excellent Barrio Populo, cette nouvelle production de Carotte production mérite une salve d’applaudissement. Qui plus est c’est pas cher : « Donnez la pièce, messieurs dames / C’est rien et ça pourrait sauver votre âme. »
Mac Abbé et le Zombi Orchestra, MAZO, Carotte production 2014. Le site de Carotte production, c’est ici.
C’est d’enfer ! je veux Mazo à Mozac , quitte à y perdre mon âme !