Prémilhat 2013 : Mupop, le déni de chanson
Allez, on quitte l’épicentre chanson de Prémilhat de quelques kilomètres pour se retrouver dans ce musée flambant neuf (inauguré en juin dernier) des Musiques populaires : le MuPop, dans le quartier historique de Montluçon.
Disons-le tout de go : ce musée est tout bonnement remarquable, principalement par son invraisemblable collection d’instruments : vous en avez sous les yeux que vous ne connaissiez pas, qui ne peuvent exister et sont pourtant là, chefs d’œuvres de lutherie comme ubuesques et fantasques instruments, tel ce violon trompette, lui et des centaines d’autres.
Saluons cette science de la muséographique ici si bien illustrée : la visite est un plaisir qu’on pourrait prolonger des heures et des jours, pour tout voir, tout comprendre. Et surtout tout entendre, dans l’espoir un peu vain qu’on sorte ces instruments des vitrines pour leur faire prendre l’air, les requinquer, leur redonner un souffle de vie.
Mais…
Une fois de plus, la chanson (genre musical pour le moins populaire) est boutée hors des murs, hors de la (re)connaissance et de la restitution, de notre passé, de notre histoire. Si ce n’est quelques pochettes de disque ici et là (Béranger, Lavilliers, Stivell, Ange, Ferrer…), des photos et vidéos d’Hallyday et de Vartan au golf Drouot, la chanson est simplement et scandaleusement ignorée : un pan entier n’existe pas, pas ici. Ni mazarinades ni Marseillaise, ni chansons rythmant les gestes des métiers ni Chanson de Craonne, ni rive-gauche ni variété, ni Brassens ni Bertin, ni Piaf ni Souchon, ni Cloclo ni Fersen, rien !
C’est un musée de la musique populaire, me dira-t-on. Que je sache, la chanson est partie intégrante de la musique populaire, consubstantielle même et ne saurait se réduire à ses seules partitions. Alors pourquoi seule la chanson rock principalement anglo-saxonne est ici valorisée, pourquoi Woodstock est-il projeté sur grand écran et pas le moindre Olympia ? C’est marrant, les célèbres prix télévisuels de la chanson se nomment Victoires de la musique : pas de mention à la chanson dans l’intitulé. Et dans un musée de la musique populaire, la chanson est aussi absente : or il n’y a rien de plus populaire que la chanson. Nous sommes ici dans le déni complet, le négationnisme.
A croire qu’il n’y a pas une seule occasion loupée, dans ce pays, pour signifier le refus de la chanson, pas une. Pourquoi ? Nous l’expliquera-t-on un jour ?
Mon ami, je l’ai beaucoup apprécié ton article qui fait écho au mien en Août… je te trouve particulièrement mesuré et efficace dans ton propos. Je trouve surprenant qu’il n’y ait pas eu de commentaires…
Tout simplement lamentable, mais à qui la faute ? Les pouvoirs publics parlent de « Musiques actuelles », les marchands parlent de « variété ». Pourquoi le mot CHANSON fait-il peur ?
Sur le site du MuPop, il est dit que ce Musée est « activement soutenu par le ministère de la Culture et de la Communication et labellisé Musée de France ».
Musiques populaires, donc. Et la chanson est une des musiques populaires, sans doute la plus importante.
On lit sur Wikipédia : « Les musiques actuelles sont une appellation du ministère de la Culture français, qui caractérise et regroupe les différents styles musicaux de la fin du XXe siècle, début du XXIe siècle. Elles regroupent quatre grandes familles musicales, à savoir la chanson, le jazz, les musiques amplifiées (terminologie de l’administration française) et la musique traditionnelle. Cette appellation n’est pas véritablement satisfaisante car elle entend non « musique actuelle » mais « musique populaire actuelle »
Le MuPop fait fi de la définition même du Ministère de la Culture mais a tout de même son label. On marche sur la tête.
Dans ces histoires de classifications qui deviennent de plus en plus saugrenues, j’ai l’impression que chaque éminent personnage de monde culturel, quand il est question de musique, et de chanson, met un point d’honneur à trouver un nouveau terme pour faire intello. A part les bitonios électroniques qui « enrichissent » le décor musical, il me semble que les troubadours, Gaston Couté, Béranger ou Bob Dylan, font à,peu près la même chose, raconter les histoires de la vie … Billie Holiday aussi quand elle chante « Strange Fruits »… Sur le fond, je ne vois pas beaucoup de différences entre le blues de Billie et « La prière de la Charlotte » de Marie Dubas… C’est du désespoir humain en 3 mn, et c’est aussi fort que 500 pages des Misérables de Victor Hugo.. Alors que ce soit de la musique urbaine, rurale, en habit ou en guenilles, ça n’a pas tellement d’importance, mais un musée de musiques populaires qui néglige le plus populaire des moyens d’expression dans ce domaine, c’est assez bizarre. .