Avignon 2013 : Elsa Gelly, déshabillez-la (elle se met déjà à nu)
C’est un pari un peu fou qu’a entrepris Elsa Gelly : délaissant le groupe des « Grandes Gueules » et leur jazz vocal, elle a choisi de proposer un spectacle entièrement a capela, solo de voix nue, sans micro, sans sono, sur des textes essentiellement en français. C’est un pari réussi. L’émotion passe davantage encore que lorsqu’une musique habille et soutient la voix. La fragilité se ressent encore plus que lorsqu’un micro amplifie les inflexions. La voix nue ne tolère aucune faille, aucune faiblesse, aucun à-peu-près. Si j’osais une comparaison, ce spectacle me fait penser à un grand cuisinier qui refuse de cacher la qualité de ses produits sous des sauces, même excellentes. Il met chaque ingrédient en valeur, il le sublime en respectant sa nature, il le valorise dans son intégrité. Elsa fait de même avec les chansons qu’elle a choisi d’interpréter. Elle les dépouille de tous leurs artifices pour nous les présenter dans le dénuement de leur beauté première. A l’ébauche de ce spectacle, en octobre dernier à Prémilhat, j’avais certes été scotchée par son impact, mais aussi inquiétée par la performance physique et vocale qu’il sous-entendait. Avec un peu l’impression d’attendre que le funambule tombe de son fil, que le dompteur se fasse bouffer par son fauve. J’aurais dû avoir davantage confiance en Elsa : sous son apparente fragilité, la douceur de sa voix, elle dissimule une force incroyable ! Il en faut pour tenir comme ça un spectacle d’une heure en enchaînant les performances vocales mais aussi physiques. Passant de Déshabillez-moi (elle annonce la couleur tout de suite !) à Vie violence en revisitant Je m’voyais déjà, Allumer le feu, We are the world ou Il venait d’avoir 18 ans. En plus des conseils de mise en scène de Michèle Guigon et de Suzy Firth, Elsa est aussi soutenue dans son entreprise par une alliée de taille : Julie Valette qui lui a concocté des éclairages au fil du rasoir, la noyant de bleu pour Le chasseur, l’habillant de rouge ou l’épinglant comme un papillon dans un phare blanc pour la Christina d’Anaïs, l’éparpillant à la fin du spectacle sous les mille éclats d’une boule à facettes… mon côté « photographe » était, lui aussi, comblé ! Que demander de plus à la sortie d’un spectacle ?
Le site d’Elsa Gelly, c’est ici.
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